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74e Congrès de l’Ordre des experts-comptables : l’expert-comptable au cœur des flux

74e Congrès de l’Ordre des experts-comptables : l’expert-comptable au cœur des flux
Publié le 19/10/2019 à 09:30

Les 25, 26 et 27 septembre derniers s’est tenu, au Palais des congrès de Paris, le 74e Congrès de l’Ordre des experts-comptables. Plus de 6 000 professionnels du chiffre se sont réunis pour réfléchir ensemble – à travers de nombreux ateliers, flashs, et plénières – sur le sujet de « L’expert-comptable au cœur des flux », thème choisi pour rappeler combien ces professionnels jouent un rôle central pour guider les dirigeants d’entreprise dans toutes les interactions numériques, humaines, économiques qu’ils rencontrent.







Pour la 74e édition du Congrès de l’Ordre des experts-comptables, les rapporteurs généraux du Congrès, Sanaa Moussaid, vice-présidente du Conseil supérieur en charge du secteur stratégie numérique, Dominique Perier, président du comité technologique du Conseil, et Fabrice Heuvrard, expert-comptable et commissaire aux comptes, ont choisi le thème suivant : « L’expert-comptable au cœur des flux ». Pour les organisateurs, en effet, on observe depuis des décennies que les entreprises évoluent de plus en plus dans un environnement où circulent des flux financiers, humains, dématérialisés, virtuels, etc. Par conséquent, « maîtriser les flux de données, les flux d’informations, c’est maîtriser l’économie de demain », assure Charles-René Tandé, président du Conseil supérieur de l’Ordre des Experts Comptables (CSOEC), dans un document de présentation du Congrès. Au sein de ce nouvel écosystème, les experts-comptables sont une aide précieuse aux côtés des dirigeants d’entreprise, pour les conseiller, mais aussi pour gérer, sécuriser et exploiter les flux  « afin de restituer à [leurs] clients une information fiable qui va leur permettre d’optimiser la gestion de leur entreprise », poursuit Charles-René Tandé dans ce document.



En outre, il s’agit également, pour la profession, de s’investir et de se transformer pour parvenir à maîtriser elle-même ces nouveaux outils numériques, anticiper les nouveaux marchés, et se doter de nouvelles organisations…


Pour ce congrès 2019, le choix de la Ville lumière n’est pas non plus un hasard : la capitale française est en effet au cœur des flux touristiques et économiques mondiaux.


 


DES EXPERTS-COMPTABLES-CHEFS D’ORCHESTRE


En ouverture du congrès, le 25 septembre, le président du Conseil supérieur s’est d’abord exclamé : « tous les records sont battus, vous êtes plus de 6 500?experts-comptables inscrits, plus de 220?exposants ! », avant de lancer, sur un gigantesque écran, un clip vidéo sur la profession en mutation. À son avis, avec l’essor des nouvelles technologies, les experts-comptables ont devant eux « un formidable champ de développement ».


Quant au journaliste Patrick Cohen qui animait cette plénière d’ouverture, celui-ci a déclaré, non sans emphase, que l’expert-comptable était « au cœur des flux, de toutes sortes de flux : il est une sorte de chef d’orchestre ».


Raison pour laquelle est ensuite monté sur scène le chef d’orchestre et musicien Philippe Fournier, fondateur de l’Orchestre symphonique Confluences, qui a illustré cette comparaison au piano. Selon lui, le rôle de l’expert-comptable consiste à mettre les chiffres en musique, à tirer des tableaux Excel des tableaux de bord et des projections, comme les musiciens tirent de leurs portées des notes et des morceaux harmonieux.


En outre, « la musique nous apprend comment de quantité de différences, on fait de la complémentarité et de l’harmonie » a-t-il ajouté, tout en invitant les professionnels du chiffre à toujours penser collectif pour réussir à l’unisson.


Dans cette partition, qu’elle soit musicale ou professionnelle, chacun a son importance : « un chef d’orchestre comme un manager est au même niveau que ses musiciens, sauf qu’il est en avance » a expliqué l’artiste, avant de jouer avec son orchestre un air issu de Carmen de Bizet.


Lors de cette plénière, était également présent le spécialiste en intelligence artificielle Rand Hindi, qui a vanté les mérites de la profession comptable : « ce que j’espère, c’est que vous réalisez à quel point, aujourd’hui, le métier d’expert-comptable ne se limite pas juste à faire des calculs sur des nombres » a-t-il déclaré. Se voulant rassurant, il a également ajouté : « et quand bien même les machines vous assisteront dans votre travail au jour le jour, je ne vois aucune possibilité où elles vous remplaceront totalement ». Des déclarations qui ont boosté la salle.


Quoi qu’il en soit, prendre le virage digital est indispensable pour toute profession qui souhaite perdurer. Heureusement, en ce qui concerne la profession comptable, selon la co-rapporteur du congrès Sanaa Moussaid : « nous avons la capacité de nous emparer des technologies émergentes, nous avons la capacité également de faire évoluer notre vision ».


Lors de la plénière de clôture, Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances, et Charles-René Tandé étaient du même avis. Ces derniers ont également insisté sur le rôle crucial des experts-comptables dans le développement des entreprises en France, mais aussi les défis qui attendent ces derniers, ainsi que ceux qu’ils vont devoir relever dans un avenir proche.



 



ENTREPRISES ET EXPERTS-COMPTABLES FACE AUX DÉFIS DE DEMAIN


« Sans vous, les entrepreneurs, les commerçants, les artisans seraient bien seuls », a commencé par déclarer Agnès Pannier-Runacher dans son allocution. « Vous êtes les premiers professionnels vers qui un chef d’entreprise se tourne quand il a besoin d’aide », a-t-elle ajouté, tout en soulignant le rôle central des experts-comptables dans le maillage entrepreneurial français. Sur le statut de l’expert-comptable, Charles-René Tandé a rappelé de son côté que ceux-ci « ont prêté serment, ils font partie d’une profession réglementée, sous tutelle du ministère de l’Economie et des Finances. À ce titre, leur signature est synonyme de confiance ».


Les missions de ces derniers sont également multiples : accompagnement de quatre entreprises sur cinq au quotidien, assistance aux dirigeants dans la gestion et relations avec leurs clients, gestion de leurs comptes, accompagnement dans la stratégie numérique et de développement…


Bref, le rôle de l’expert-comptable est essentiel dans un environnement économique en mutation, a ainsi reconnu la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances.


Les entreprises doivent en effet faire face, à l’heure actuelle, à « deux défis majeurs pour notre économie » a poursuivi Agnès Pannier-Runacher.


D’abord le défi du numérique. Selon cette dernière, l’essor des nouvelles technologies concerne en effet toutes les entreprises « dans les grandes villes comme dans les petites, dans les métropoles comme dans les territoires ruraux les plus reculés » a précisé la secrétaire d’état. Jouant pour l’occasion les Cassandre, celle-ci a ajouté : « Celles qui ne prendront pas le tournant du numérique seront, à terme, reléguées en deuxième division ou amenées à disparaître ».


Quant au second défi, il sagit, selon cette dernière, du partage de la valeur dans l’entreprise. Partager entre tous la richesse créée par l’entreprise est indispensable, selon elle, pour encourager les salariés, et faire en sorte que ces derniers se sentent pleinement investis dans la réussite de la société.


Le gouvernement en a fait son cheval de bataille depuis deux ans, a indiqué Agnès Pannier-Runacher. En témoignent notamment, en 2018, l’augmentation de la prime d’activité, la défiscalisation des heures supplémentaires, la baisse de l’impôt sur le revenu pour plus de 17 millions de Français et plus de 1,5 million d’entreprises, et, en 2019,?la suppression de la taxe sur l’intéressement dans les entreprises de moins de 250 salariés ainsi que sur la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés.


Concernant l’intéressement, la secrétaire d’État a ajouté que l’objectif du gouvernement était de doubler, d’ici la fin de l’année prochaine, le nombre de salariés couverts par un accord d’intéressement dans les PME. On passerait ainsi de 1,4 million à 3 millions de salariés qui bénéficieraient de la richesse produite par leur entreprise, s’est réjouie la secrétaire d’état.


L’essor des nouvelles technologies n’impacte pas seulement le fonctionnement des entreprises, mais aussi le métier d’expert-comptable lui-même, ont affirmé Charles-René Tandé et Agnès Pannier-Runacher.


« Le numérique et l’intelligence artificielle vont changer à bien des égards les techniques comptables et le quotidien de vos équipes » a ainsi assuré la secrétaire d’État.


Face à ce défi du numérique, les professionnels peuvent « voir le verre à moitié vide » a déclaré de son côté le président du CSOEC, ou bien adopter une attitude optimiste. En tout cas, pour lui, l’ambition du 74e Congrès serait plutôt de « conforter les optimistes dans leurs convictions et modifier la perception des plus pessimistes ».


Il reste que si la révolution numérique constitue une véritable opportunité de transformation pour la profession et une chance de rendre des services plus pointus, de nombreuses difficultés liées à la formation des collaborateurs et à l’acquisition d’expertises complexes vont aussi apparaître.


Les experts-comptables, en outre, seront de plus en plus sollicités par les attentes accrues du monde de l’entreprise, a affirmé Agnès Pannier-Runacher.


Déjà, les professionnels du chiffre doivent intervenir sur des questions sociales ou de ressources humaines, apporter leur expertise dans les domaines du droit des sociétés, en droit du travail, en matière d’investissement, d’innovation, etc.


« La diversité de ces besoins ne fera que s’accroître dans les années à venir », a prédit la secrétaire d’État. Les experts-comptables devront par conséquent multiplier leurs compétences.


Pour parvenir à relever ces nombreux défis, les experts-comptables ont besoin de l’aide du gouvernement, a assuré Agnès Pannier-Runacher, tout comme le gouvernement a besoin des experts-comptables pour « accompagner les entrepreneurs, les artisans, les commerçants ».



 


EXPERTS-COMPTABLES ET POUVOIRS PUBLICS : UNE COLLABORATION NÉCESSAIRE


« C’est en travaillant ensemble que nous répondrons au mieux aux attentes des entreprises et des Français », a assuré la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances.


Cette dernière a ainsi reconnu que l’aide des experts-comptables était précieuse aux pouvoirs publics pour mener à bien la transformation économique du pays : « Vous êtes le meilleur relai de la transformation économique que nous portons, pour rendre notre économie plus compétitive, plus innovante » a ainsi assuré Agnès Pannier-Runacher. « Vous avez accompagné les mesures du début de quinquennat : l’allègement de la fiscalité sur les bénéfices et le capital, la mise en œuvre du prélèvement à la source, la bascule du CICE en allègement de charges, les ordonnances travail » a-t-elle précisé.


Et pourtant, cela n’a pas toujours été facile pour les experts-comptables, du fait des moult revirements du ministère. Prenant l’exemple du prélèvement à la source, le président Tandé a affirmé que « cela aura été difficile pour nos équipes. (…) Du fait de la succession des changements, de leur vitesse de mise en place, des délais, du peu de temps dont nous disposions entre l’élaboration des textes et leur application… ».


Les professionnels du chiffre ont également été présents au côté du gouvernement pour porter l’opération Initiative France num, projet qui consiste à numériser toutes les TPE et PME d’ici 2022. En effet, comme l’a rappelé Agnès Pannier-Runacher, une petite centaine d’experts-comptables se sont inscrits pour devenir des « activateurs », c’est-à-dire pour proposer des diagnostics numériques aux entreprises.


Le gouvernement compte également sur l’aide des professionnels du chiffre pour mener à bien son projet de doubler d’ici fin 2020?le nombre de salariés couverts par un accord d’intéressement dans les PME.


En effet, pour atteindre cet objectif, le ministère de l’Économie et des Finances va fournir des « accords clés en main en ligne », a précisé la secrétaire d’État. Ces derniers seront en ligne sur le site du ministère. Les entreprises n’auront plus qu’à les remplir et choisir la meilleure formule d’intéressement ou de participation en fonction de leur situation.


« Vous êtes idéalement positionnés pour informer les entreprises de ce dispositif et les conseiller sur la meilleure façon de le mettre en œuvre » a affirmé Agnès Pannier-Runacher à ses interlocuteurs.


Enfin, des cabinets d’expertise comptable se sont engagés, il y a peu, dans une expérimentation menée par le ministère dans les Hauts-de-France, expérience qui a pour but de vérifier, auprès des dirigeants d’entreprise, « s’ils ont choisi le régime statutaire, fiscal ou social le plus adapté à leur situation » a indiqué la secrétaire d’État. « Il s’agit notamment de mieux faire connaître le régime de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) et la possibilité d’opter pour l’impôt sur les sociétés » a-t-elle encore précisé.


« Je me félicite des échanges que nous avons pu avoir depuis votre prise de fonction et qui montrent que l’avis des experts-comptables vous importe : je pense au statut du dirigeant, aux mesures “gilets jaunes”, à la préparation du Brexit… Autant de sujets sur lesquels vous nous avez consultés » a déclaré Charles-René Tandé à la secrétaire d’état.


Le président de l’Ordre lui a cependant lancé un appel, et, à travers elle, au gouvernement : « Madame, aidez-nous à bien faire notre travail. Aidez-nous également à lever les obstacles qui limitent notre capacité à bien conseiller nos clients ».


En réponse à cette injonction, la secrétaire d’État a mis en exergue, dans son allocution, tout ce que le gouvernement a déjà fait pour aider les experts-comptables à répondre aux défis de demain, notamment via la mise en œuvre de la loi PACTE.


Ainsi, a-t-elle rappelé, pour valoriser l’activité de conseil, la loi a donné la possibilité aux professionnels du chiffre de fixer des honoraires aux succès. En effet, a-t-elle expliqué, certains professionnels interviennent sur des questions liées à la croissance de l’entreprise, il est donc logique qu’ils soient « rémunérés en cas de succès ».


La loi a également permis aux experts-comptables de bénéficier d’un mandat implicite pour faciliter les démarches de leurs clients auprès des administrations fiscales et sociales.


En matière de gestion des créances et de paiements des clients, les prestations des professionnels du chiffre ont également été diversifiées.


Enfin, parce qu’un certain nombre d’experts-comptables souhaite « changer de mode d’exercice » au cours de sa carrière, la loi PACTE (plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) a créé un statut d’expert-comptable en entreprise.


Le président de la CSOEC a lui-même reconnu : « Je pense que les avancées obtenues dans le cadre de la loi PACTE doivent nous permettre de mieux nous positionner pour améliorer la performance de nos clients. »


Il reste que si le ministère de l’Économie et des Finances a apporté son soutien aux nombreuses propositions de modernisation de la profession comptable, les experts-comptables restent dubitatifs sur certains points du PACTE, notamment les articles de la loi concernant les commissaires aux comptes et la facture électronique.


Au sujet du statut du CAC, Agnès Pannier-Runacher a tenu à rassurer la profession, sachant qu’un nombre non négligeable d’experts-comptables est aussi commissaires aux comptes : « Nous restons, avec le ministère de la Justice, particulièrement vigilants sur le déroulement de cette réforme structurante. »


À propos de la facturation électronique, la secrétaire d’État a rappelé ses objectifs : alléger la charge administrative des entreprises et mieux lutter contre la fraude. En outre, la facturation électronique interentreprises ne sera pas obligatoire immédiatement, mais se fera progressivement entre 2023 et 2025.


Toutefois, selon Charles-René Tandé, pour que la profession puisse profiter de tous les avantages de la facture électronique, il faudra que celle-ci soit entièrement généralisée.


Bref, « le monde change », a reconnu avec sagesse le président du Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables. Plein doptimisme, il est certain que, la profession comptable est capable de ne pas subir ce changement, mais de le devancer et de l’accompagner : « notre profession est promise à un très bel avenir, notamment grâce au numérique ! », s’est-il réjoui.


Charles-René Tandé a clos le 74e Congrès des experts-comptables en donnant rendez-vous à tous les participants au prochain congrès, qui aura lieu à Bordeaux, du 30 septembre au 2 octobre 2020, sur le thème du management, du marketing et de la marque employeur.


 


Maria-Angélica Bailly


 


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