Élu le 6 décembre 2018 à
Bruxelles à la tête du Conseil des notariats de l’Union européenne (CNUE),
Maître Pierre-Luc Vogel, notaire à Saint-Malo, ancien président du Conseil
supérieur du notariat (CSN), a dévoilé le 15 janvier dernier, lors d’une
rencontre avec la presse organisée à l’occasion de sa prise de fonction, les
priorités de son mandat.
Notaire à
Saint-Malo depuis 1985, âgé de 63 ans, marié et père de trois enfants, Maître
Pierre-Luc Vogel a été élu président du Conseil des notariats de l’Union
européenne (CNUE) le 6 décembre dernier. Il succède à
Marius Kohler, notaire allemand (voir Journal
Spécial des Sociétés n° 89 du 12 décembre 2018).
Lors de son
intervention boulevard de la Tour Maubourg, Maître Vogel a commencé par
présenter le Conseil des notariats de l’Union européenne.
Il s’agit
d’un organisme officiel qui fédère les 22 notariats de l’Union européenne,
représentant 40 000 notaires et 200 000 collaborateurs. Ce Conseil détient un
bureau permanent à Bruxelles, car il est l’interlocuteur des instances
européennes. Quatre notariats interviennent également comme observateurs du
CNUE. Cette institution est primordiale pour le notariat européen, car, « si la
fonction notariale est la même, la manière de l’exercer est tout à fait
différente d’un pays à l’autre, les périmètres d’activité sont différents » a
expliqué le nouvel élu.
« Une Europe qui protège est une Europe qui a besoin de
ses notaires », avait-il déclaré lors de son élection. Celui qui a
déjà été vice-président du CNUE en 2018 et président du Conseil supérieur du
notariat de 2014 à 2016 compte donc bien faire entendre la voix de ces derniers
tout au long de son mandat. Pour cela, il s’est fixé quatre objectifs
principaux à remplir pour l’année 2019.
QUATRE OBJECTIFS À REMPLIR
OBTENIR UN CHANGEMENT D’ATTITUDE
ENVERS LA PROFESSION
Pierre-Luc
Vogel est d’abord parti d’un constat : aujourd’hui, selon lui, nous sommes en
présence d’une forme de crise dans la relation entre l’Europe et les citoyens.
On constate un déficit de proximité des instances européennes avec les
citoyens, ce qui suscite chez ces derniers de la méfiance envers l’UE.
Par
conséquent, « c’est la responsabilité du
notariat de prendre sa part, pour essayer de rapprocher les souhaits, les
aspirations des concitoyens avec les instances européennes » a déclaré
Maître Vogel.
Le premier
objectif pour le CNUE sera donc d’obtenir un changement d’attitude des
instances communautaires à l’égard des professions réglementées. Depuis
plusieurs années déjà, en France, la profession notariale subit des attaques
quant à son statut, a rappelé le notaire. Selon lui, celles-ci trouvent leur
origine dans la doctrine ultra libérale prônée par l’Europe.
Or, cet
ultralibéralisme est actuellement remis en cause. Les notaires quant à eux
estiment qu’une régulation maitrisée est protectrice pour le citoyen. Cette
dimension protectrice est donc au cœur des aspirations du CNUE pour 2019.
PROMOUVOIR LE DROIT CONTINENTAL
Le deuxième
objectif pour le Conseil sera de défendre le système de droit continental qui
fait partie intégrante de la culture européenne. Par sa prévisibilité, ce droit
codifié protège, il est donc essentiel, pour Maître Vogel, d’en faire la
promotion. « Nous allons poursuivre notre
travail de lobbying. C’est-à-dire faire valoir les atouts de ce droit, ses
arguments… » a-t-il déclaré.
« Pour cela,
l’un des objectifs de ce mandat sera de renforcer l’unité des notariats »,
a-t-il ajouté. En effet, autour de ce statut commun (rôle de puissance
publique), il existe une grande variété de modalités d’exercice et de
périmètres dans lesquels les notaires européens interviennent. Certains
notariats peuvent intervenir dans la vente de voitures par exemple.
Le but étant
de parvenir à l’unité sur un certain nombre d’objectifs et de réussir à
homogénéiser les notariats, a expliqué Maître Vogel.
« La diversité sera gardée, mais de la même
manière qu’il y a un citoyen européen, il y aura un notaire européen autour des
mêmes valeurs » a-t-il affirmé.
DEVELOPPER LES NOUVELLES
TECHNOLOGIES
Le troisième
objectif de ce mandat sera d’orienter la stratégie d’avenir de la profession
autour des nouvelles technologies. Pour le nouveau président du CNUE, il s’agit
véritablement du chantier majeur et prioritaire pour les notaires d’Europe.
« Pour cela, il faut réussir à mutualiser nos
moyens au niveau européen, car nous irons plus vite ensemble », a-t-il
préconisé.
Le numérique
représente en effet une source d’économie importante.
Maître Vogel
a ainsi salué la mise en œuvre des actes authentiques électroniques, ainsi que
l’installation des plateformes qui permettent de dématérialiser les relations
entre la profession et les États. Ainsi, dans l’Hexagone, les informations qui
permettent de gérer le fichier immobilier sont transmises de façon
dématérialisée.
Le président
du CNUE a également mentionné l’utilisation de la technologie blockchain avec le projet sur la
transmission des copies exécutoires, mis en place en Belgique, Italie et
France.
Il reste que
les notariats, en raison des tailles inégales des États, disposent de moyens
différents. Dans les pays baltes par exemple, les habitants possèdent une carte
d’identité électronique avec une signature électronique, ce qui ouvre des
perspectives et avantages dont nous ne pouvons pas bénéficier en France. Ce
système est en effet plus difficile à mettre en œuvre dans un pays aussi grand.
S’IMPLIQUER DAVANTAGE DANS LA VIE
DE L’UE
Enfin, le dernier objectif pour
cette mandature 2019 sera de s’impliquer dans des projets concrets en lien avec
l’Union européenne.
Et ce
d’autant plus que le contexte est particulier : Brexit, et élections
européennes.
« Nous allons nous impliquer dans le cadre des
élections en faisant un certain nombre de propositions que nous allons bâtir
très rapidement » a affirmé Maître Vogel.
Ainsi, dans
le domaine juridique, la profession compte faire le bilan des textes qui ont
été mis en œuvre. Concernant le règlement succession par exemple, les notaires
vont établir un bilan d’application ainsi que des propositions d’amélioration,
notamment pour le certificat successoral européen, « peu utilisé, car trop complexe ».
Autre
intention : les notaires vont mettre en œuvre un certain nombre d’actions pour
inciter les citoyens à participer aux élections européennes. Les dernières élections
ont en effet rassemblé 43 % seulement de la population, a rappelé Maître Vogel.
En novembre
prochain, la CNUE va également organiser une exposition au Parlement européen
qui comprendra deux volets : la présentation des actes authentiques et actes
notariés historiques qui concernent des personnes ou évènements célèbres ; le
second volet permettra de présenter les outils technologiques mis au point par
les différents notariats européens.
Enfin, en
juillet prochain, les notaires européens ont prévu de diffuser les prix de
l’immobilier dans les grandes villes européennes, en indiquant les évolutions
de prix, en faisant des comparatifs. Objectif ? Montrer la plus-value apportée
par le notariat dans la transparence du marché de l’immobilier, et permettre
aux États qui disposent de ces statistiques d’orienter leur politique du
logement. Dans ce domaine, Pierre-Luc Vogel entend d’ailleurs étendre les
compétences des notaires français aux autres pays de l’Union européenne.
Maria-Angélica
Bailly