Défini par le Code rural et de la pêche maritime en son article L. 214-6 I comme étant un "animal détenu ou destiné à être détenu par
l’homme pour son agrément", l’animal de compagnie occupe une place essentielle en France. La
Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie STE 125 du 13 novembre 1987 précise que
l’homme détient un tel animal « notamment dans
son foyer, pour son agrément et en tant que compagnon ». Cette notion de « compagnon » est au cœur
des droits et devoirs attachés à la possession d’un animal de compagnie.
Un foyer français sur deux possède un animal de compagnie, et les enjeux
économiques liés à leur détention sont conséquents et ne font que croître.
Assurances, soins, jeux, éducation, nourriture, garde, objets connectés… autant
de postes sur lesquels les propriétaires ne lésinent plus.
Il est dès lors intéressant, à l’heure où le bien-être animal devient un
sujet brûlant d’actualité, de se pencher sur la question des droits (I) et
devoirs (II) d’un propriétaire d’un animal de compagnie.
Droits d’un propriétaire d’un
animal de compagnie
Droit,
parfois restreint, d’acquérir un animal de compagnie
À titre liminaire, il
est important de rappeler que détenir un animal de compagnie est un droit. En
effet, toute personne peut posséder un tel animal – qui est un bien –, même si
certaines pistes de réflexions existent et ont déjà été développées par certains pays, comme la Belgique, visant à
instaurer, par exemple, un permis pour détenir
un tel animal.
À l’heure actuelle, en France,
seules certaines catégories de personnes ne peuvent détenir librement un animal
de compagnie :
• les mineurs de moins de 16 ans doivent,
en effet, obtenir le consentement de leurs parents (article R. 214-20 du Code rural) ;
• les majeurs protégés
peuvent être également restreints puisque la possession d’un animal de compagnie constitue un acte d’administration ;
• les personnes qui se sont vues appliquer la
peine d’interdiction de détenir un animal (définitive ou temporaire) sont donc
exclues d’une telle possession et privées de ce droit.
Par ailleurs, des restrictions existent pour détenir certaines
catégories d’animaux (article L. 211-13du Code
rural), tels les chiens susceptibles d’être dangereux mentionnés à l’article L. 211-12 du Code rural – de première et de deuxième catégorie.
Ainsi, outre les mineurs et les majeurs en tutelle, les personnes condamnées
pour crime ou délit à une peine d’emprisonnement et les personnes dont la garde
d’un chien a été retirée ne peuvent posséder un tel chien.
De même, pour les nouveau animaux de compagnie (NAC) non domestiques, il
est nécessaire pour le futur propriétaire d’obtenir un certificat de capacité,
qu’il convient d’adresser, avec une attestation d’expérience, à
la Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des
populations (DDCSPP) du département du domicile du requérant.
De surcroît, des délais de sevrage – 8 semaines pour les chiens et les chats – sont à respecter, et imposés par
le Code rural en son article L. 214-8.
Des peines d’amendes sont, par ailleurs, prévues en cas de manquement
par les professionnels à ces obligations.
Si toute
personne a le droit d’acquérir, à titre gratuit ou onéreux, un animal de
compagnie, on ne peut, en revanche, acheter son animal dans n’importe quel
lieu, puisque cette cession ne peut se dérouler au sein des foires, brocantes,
marchés, salons ou expositions non consacrés aux animaux. La vente sur Internet
de chiens et de chats a également été réglementée, avec l’obligation pour le
vendeur de mentionner son numéro SIREN.
Le propriétaire se verra remettre, lors de l’acquisition, un certificat
vétérinaire, ainsi qu’une attestation de cession et une carte d’identification.
Droit de détenir son animal dans son logement et de le transporter, sous
conditions
Le propriétaire d’un animal de compagnie qui est
locataire de son logement a le droit de le détenir à son domicile. Cela
correspond précisément à la notion de « compagnie » qui a entraîné la création
de cette catégorie spécifique d’animaux, définie comme tel par la Convention
européenne susvisée. Un bailleur ne peut ainsi interdire à son locataire de détenir un ou
plusieurs animaux de compagnie dans le logement loué (article 10 de la loi du 9 juillet
1970), sauf s’il s’agit d’un chien dit « d’attaque » ou « de
défense », ou dans le cadre d’un contrat de location
saisonnière ou d’un contrat concernant un logement meublé de tourisme.
C’est également un droit pour le propriétaire de pouvoir circuler
librement dans les transports avec son animal de compagnie, sous réserve de ne
pas dépasser un poids maximum pour l’animal (bus, train, avion) et de respecter
les obligations d’identification, de vaccins et de surveillance.
Enfin, amener son animal de compagnie au travail est également un droit
pour la plupart des propriétaires, sauf exception : au sein des
administrations, dans le secteur de l’alimentation, ou si la convention
collective l’interdit.
Droit d’ester en justice en lien avec l’acquisition ou la possession de
son animal de compagnie
Bien évidemment, un propriétaire d’un animal de compagnie peut ester en
justice pour faire respecter toutes les obligations liées à l’acquisition ou la
détention de l’animal qui est encore soumis, en France, au régime des biens,
même s’il bénéficie de quelques spécificités puisqu’il est reconnu
comme étant doué de sensibilité.
Néanmoins, des actions particulières peuvent exister, comme le fait d’exercer
une action, postérieurement à l’achat de l’animal, en garantie des vices dits
rédhibitoires s’agissant de maladies ou de défauts définis dans les conditions
prévues à l’article L. 213-4 du Code
rural.
Enfin, parce que détenir un animal de compagnie répond le plus souvent à
un besoin d’affection du propriétaire, ce dernier s’est vu accorder depuis
longtemps le droit de faire reconnaître son préjudice moral en cas de mort de
son animal, préjudice ouvrant ainsi le droit à une indemnisation spécifique (arrêt
Lunus, Cass., Civ 1re, 16 janvier 1962).
Si la propriété d’un animal de compagnie génère des droits, elle suscite
également des obligations.
Obligations des propriétaires
d’animaux de compagnie
Obligations
à l’égard de l’animal
L’article 515-14, inséré dans le Code civil par la loi
n° 2015-177 du 16 février 2015, consacre légalement la qualité
d’être vivant doué de sensibilité de l’animal, une telle mention ayant été
préalablement inscrite au sein du Code rural et de la pêche maritime par l’ordonnance
n° 2000-550 du 15 juin 2000 qui pose, en
son article L. 214-1, l’obligation, pour le propriétaire, de
placer son animal dans « des conditions compatibles avec les impératifs
biologiques de son espèce ».
Il en résulte, selon le même Code, l’interdiction pour toute personne qui
élève, garde ou détient de tels animaux de les priver de nourriture ou
d’abreuvement nécessaires à la satisfaction des besoins physiologiques propres
à leur espèce et à leur degré de développement, de les laisser sans soins, de
les placer et de les maintenir dans un habitat ou un environnement susceptible
d’être –, en raison de son exiguïté, de sa situation inappropriée aux
conditions climatiques supportables de l’espèce considérée ou de l’inadaptation
des matériels, installations ou agencements utilisés –, une cause de
souffrances, de blessures ou d’accidents, enfin, d’utiliser, sauf en cas de
nécessité absolue, des dispositifs d’attache ou de contention, clôtures, cages,
tout mode de détention inadaptés à l’espèce considérée ou de nature à provoquer
des blessures ou souffrances.
Le Code pénal réprimait déjà, depuis 1994, les actes de cruauté et
sévices graves envers un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité (à
l’exception des coqs destinés aux combats et taureaux réservés aux corridas où
une tradition locale ininterrompue peut être invoquée).
Ces délits résultant, depuis 2004, de l’article 521-1 du Code pénal, ont été complétés, et visent désormais également les actes de nature sexuelle auxquels les magistrats étaient déjà confrontés, ainsi que les abandons.
Il n’est pas inutile de rappeler ici que la pratique d’expériences ou de
recherches scientifiques ou expérimentales sur les animaux reste interdite,
sauf à se soumettre aux prescriptions fixées par décret en Conseil
d’État. Par ailleurs, et sans la logique d’une échelle de gravité, le Code pénal
réprime, au titre de contraventions de 5e et 4e classes,
le fait, sans nécessité, de donner volontairement la mort à un
animal de compagnie et le fait d’exercer «
sans nécessité » et volontairement des mauvais traitements envers de tels
animaux.
Enfin, le fait par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou
manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposé par la loi ou les
règlements, d’occasionner la mort ou la blessure d’un tel animal, constitue une
contravention de 3e classe.
Considérer ces seules obligations serait restrictif, car le propriétaire
d’un animal de compagnie n’est pas uniquement responsable du fait de ses
agissements à l’égard de l’animal, il est également tenu d’obligations du fait
de l’animal.
Obligations
à l’égard des tiers
Un animal ne peut être utilisé pour tuer, blesser, menacer ou pour
solliciter, s’il est dangereux, une remise de fonds. De manière spécifique,
l’homicide ou l’atteinte même involontaire à l’intégrité des personnes est
également réprimée lorsqu’il/elle résulte de l’agression d’un chien.
Le propriétaire d’un animal susceptible de présenter un danger pour les
personnes ne peut laisser divaguer cet animal, l’exciter ou ne pas le retenir
lorsqu’il attaque ou poursuit un passant.
Et tout fait de morsure d’une personne par un chien doit être déclaré
par son propriétaire à la mairie de la commune de résidence du propriétaire,
lequel doit aussi soumettre l’animal à une évaluation comportementale durant
une période de surveillance.
Cette responsabilité du fait de l’animal est
également rappelée, sur le plan civil, par l’article
1243 du Code civil : « le propriétaire
d’un animal, ou celui qui s’en sert, pendant qu’il est à son usage, est
responsable du dommage que l’animal a causé, soit que l’animal fut sous sa
garde, soit qu’il fut égaré ou échappé ».
Une telle responsabilité fait actuellement l’objet
d’un débat et de travaux destinés à modifier la législation applicable en la
matière.
De manière spécifique, si la détention d’un animal
dans un local d’habitation est un droit, elle reste
subordonnée au fait que l’animal « familier » ne cause aucun dégât à l’immeuble
ni aucun trouble de jouissance aux occupants de celui-ci.
Enfin, et pour des raisons de sécurité sanitaire et
publique évidentes, des dispositions légales et règlementaires sont applicables
à la mort de l’animal.
En premier lieu, seul un vétérinaire ou une personne
compétente peut procéder au « sacrifice » d’un animal de
compagnie, excepté, en cas d’urgence, pour mettre fin aux souffrances de
l’animal et lorsque l’aide d’un vétérinaire ou d’une autre personne compétente ne peut être obtenue rapidement ou dans tout
autre cas d’urgence prévu légalement.
De plus, il est interdit de déposer les cadavres
d’animaux sur la voie publique ou dans les ordures ménagères ainsi que de les
jeter dans les mares, rivières, abreuvoirs, gouffres et bétoires ou de les
enfouir d’une façon générale à moins de 35 mètres des habitations, des puits,
des sources et dans les périmètres de protection des sources et des ouvrages de
captage et d’adduction des eaux d’alimentation prévus dans la règlementation
des eaux potables.
Le propriétaire d’un animal domestique peut donc
enterrer son animal sous conditions, dont celles précitées, ou dans un
cimetière animalier. Il peut également laisser la dépouille de l’animal chez un
vétérinaire afin qu’il soit incinéré.
Si les animaux de compagnie restent soumis au régime
juridique des biens, il n’en demeure pas moins que des dispositions spécifiques
viennent étendre les droits et les obligations de leur propriétaire. Au-delà de
la protection de l’Homme, de « l’autre », pointe également celle de l’animal : « les
hommes ont oublié cette vérité (…) Mais tu ne dois pas l’oublier. Tu deviens
responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé » (Le Petit Prince, Antoine de
Saint-Exupéry).
Laurence Joseph-Theobald,
Avocate au barreau de Paris
Anne-Louise Nicolas Laurent,
Avocate au barreau de Rennes