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La fiabilité des copies électroniques

La fiabilité des copies électroniques
Publié le 20/01/2017 à 09:00

Le décret relatif à la présomption de fiabilité des copies a été adopté le 5 décembre 2016, (Journal officiel du 6 décembre 2016). Il fait suite à la réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations du 1er octobre dernier. Un décret très important pour les entreprises qui à l’heure actuelle conservent à la fois les copies et les originaux.

 


Le 1er octobre 2016, la réforme du droit des obligations (introduite par l’Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations) est entrée en vigueur. Les règles concernant la formation et l’exécution des contrats ont été modifiées. Mais plus encore, des modifications en lien avec la preuve des obligations ont été ajoutées. Avant la réécriture, l’article 1334 du Code civil disposait : « Les copies, lorsque le titre original subsiste, ne font foi que de ce qui est contenu dans le titre, dont la représentation peut toujours être exigée ». Le document original devait donc toujours pouvoir être produit et exigé.


 

la force probante des copies


L’article 1379 issu de la réécriture a remplacé l’article 1348, il précise maintenant : « La copie fiable a la même force probante que l’original. La fiabilité est laissée à l’appréciation du juge. Néanmoins, est réputée fiable la copie exécutoire ou authentique d’un écrit authentique. Est présumée fiable jusqu’à preuve du contraire toute copie résultant d’une reproduction à l’identique de la forme et du contenu de l’acte, et dont l’intégrité est garantie dans le temps par un procédé conforme à des conditions fixées par décret en Conseil d’État. Si l’original subsiste, sa présentation peut toujours être exigée ». Cet article dit tout simplement que toutes les copies dès qu’elles sont fiables ont la même valeur probante que l’original. Les critères de fiabilité, eux, sont laissés à l’appréciation du juge.


Le 5 décembre 2016, le décret « relatif à la fiabilité des copies et pris pour l’application de l’article 1379 du Code civil » vient préciser les conditions de mise en œuvre de la présomption de fiabilité des copies. Que nous dit ce décret ? D’abord, il opère une distinction entre la copie fiable si elle est le résultat « d’un procédé de reproduction qui entraîne une modification irréversible du support de la copie » (on remarque que rien ne change par rapport à l’ancien article du Code civil) et la copie procédant d’une reproduction par voie électronique (article 1er du décret). En ce qui concerne cette dernière, ce nouveau décret apporte des précisions très utiles.


 

La présomption de fiabilité des copies électroniques


L’article 2 du décret précise d’abord que le procédé utilisé doit reproduire les informations liées à la copie, destinées à l’identifier. Ces informations doivent préciser le contexte de la numérisation (dates de création, qualité du procédé justifié par des tests et des contrôles).


Il s’agit ensuite de garantir l’intégrité de la copie (article 3). Les utilisateurs doivent disposer d’une empreinte numérique « qui garantit que toute modification ultérieure de la copie à laquelle elle est attachée est détectable ». Cette condition est remplie lorsqu’est utilisé un horodatage, un cachet ou une signature électronique qualifiée « au sens du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 (...) ».


L’article 4 évoque les conditions de conservations des copies numériques. Celles-ci doivent être conservées de manière à ce qu’aucune altération de leur forme ou de leur contenu ne soit possible.


Quant à l’article 5, il impose de conserver des traces et des empreintes qui auront été générées en application des articles 3 et 4 dudit décret. Elles seront conservées « aussi longtemps que la copie électronique produite et dans des conditions ne permettant pas leur modification ».


Les notions de confidentialité et de sécurité sont primordiales pour que la force probante des copies soit indiscutable (article 6 et 7). Ainsi, l’accès aux procédés de reproduction et de conservation décrits ci-dessus doit être totalement sécurisé. De même, l’ensemble des dispositifs et mesures prévues aux articles 2 à 6 doit être formalisé et décrit « dans une documentation conservée aussi longtemps que la copie électronique produite ».


Les démarches semblent lourdes pour faire reconnaître à une copie numérique la même valeur que l’original. Mais, ces précisions étaient très attendues par les entreprises, les juristes et les professionnels dont le travail consiste à garantir la valeur juridique des copies numériques.


 

Un décret très attendu par les professionnels du droit et les entreprises


Les précisions fournies par ce décret devront d’abord permettre aux juristes d’exiger des fournisseurs de solutions informatiques un dispositif qui garantisse le respect des conditions demandées. Ainsi, la qualité de copie fiable ne pourra être contestée à ladite copie (étant précisé que la copie fiable ne bénéficie que d’une présomption simple), et de nombreux litiges pourront ainsi être évités.


Pour les entreprises et les organismes (URSSAF, CPAM, CAF, etc.), ce décret est très important, car nombreuses sont celles qui numérisent leurs documents papier, mais qui conservent à la fois les originaux et la copie électronique. Avec ce décret, la gestion électronique des documents (GED) devrait être facilitée et sécurisée. En outre, la destruction des originaux papiers est désormais possible, ce qui constitue une grande avancée du point de vue du régime juridique de l’archivage en France. Notons que des pays européens comme le Luxembourg et la Belgique ont déjà réformé leur système d’archivage. (…)


 


Maria-Angélica Bailly


 

Retrouvez la suite de cet article et l’avis d’Éric Caprioli, avocat à la cour de Paris, docteur en droit, membre de la délégation française aux Nations unies, dans le Journal Spécial des Sociétés n° 5 du 18 janvier 2017


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