Le découvert est l’autorisation donnée par le banquier à l’entreprise de
laisser son compte devenir débiteur pour une durée plus ou moins longue. C’est
une forme de crédit particulièrement utilisée par les entreprises françaises.
Le découvert est destiné à :
à financer les décalages
de trésorerie des entreprises ;
pallier les besoins de trésorerie temporaire ;
financer les besoins fluctuants du BFR (besoin en fonds
de roulement)
L’autorisation de découvert fait souvent l’objet d’une négociation
entre l’entreprise et la banque qui fixe :
le montant ;
la durée ;
les modalités d’utilisation et de fonctionnement ;
l’objet ;
le taux.
L’autorisation de découvert est en général accordée pour une période
d’un an renouvelable, mais celle-ci peut faire l’objet d’une nouvelle
négociation en cours d’exercice en cas de besoin.
Il convient de ne pas confondre le découvert avec :
• La facilité
de caisse qui peut s’apparenter au découvert mais se distingue par des
utilisations courtes et répétées (fin de mois par exemple) ;
• Le crédit
de campagne, crédit plus spécialisé, qui a pour objet le financement d’une
campagne d’achats ou de fabrication qui est accordé en général sur une longue
période ;
• Le crédit
« spot », qui correspond à un découvert accordé pour une durée de 1 à
6 mois (ou plus), formalisé très souvent par des billets financiers ;
Accordé par plusieurs banques, en pool, cette forme de concours est
également désignée parfois par le terme « crédits consortiaux » ;
• La ligne de
crédit, qui permet de mettre à disposition de l’entreprise, un en-cours de
crédit à court terme ou à moyen terme, que celle-ci utilise au fur et à mesure
de ses besoins : BFR ou investissements ;
• Le crédit
revolving, qui finance souvent le BFR, renouvelable selon les besoins de
l’entreprise.
Rappel : ces crédits court terme par excellence, ne doivent pas remplacer les
capitaux permanents…
Découvert confirmé
Signalons
que l’entreprise a la possibilité de solliciter un découvert confirmé,
moyennant l’application d’une commission de confirmation qui peut varier de
0,50 % à 2 %.
Cette
confirmation est généralement faite par simple lettre du banquier qui précise
le montant, la durée et les conditions particulières.
Cette
procédure, assez rare, n’est pas recherchée par les banques.
Découvert et taux d’usure
Les
entreprises bénéficient de la règlementation relative à l’usure uniquement pour
les découverts bancaires (Art. L. 313-5-1 du Code monétaire et financier).
Concernant
les prêts qui leur sont consentis, les taux ne sont pas soumis à la
règlementation de l’usure.
Au 1er janvier 2019, le taux d’usure pour les découverts bancaires accordés aux
entreprises est de 13,93 %.
Rupture
abusive de crédit (Art. L. 313-12 du CMF)
Tout
concours à durée indéterminée, autre qu’occasionnel, qu’un établissement de
crédit consent à une entreprise, ne peut être réduit ou interrompu que sur
notification écrite et à l’expiration d’un délai de préavis fixé lors de
l’octroi du concours. Ce délai ne peut, sous peine de nullité de la rupture du
concours, être inférieur à soixante jours.
Dans le
respect des dispositions légales applicables, l’établissement de crédit
fournit, sur demande de l’entreprise concernée, les raisons de cette réduction
ou interruption qui ne peuvent être demandées par un tiers, ni lui être
communiquées.
L’établissement
de crédit n’est pas tenu de respecter un délai de préavis, que l’ouverture de
crédit soit à durée indéterminée ou déterminée, en cas de comportement
gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit ou au cas où la situation de
ce dernier s’avérerait irrémédiablement compromise.
Le
non-respect de ces dispositions peut entraîner la responsabilité pécuniaire de
l’établissement de crédit.
Attention
toutefois :
Dénonciation
de découvert
La dénonciation d’un découvert doit toujours faire l’objet d’une
notification préalable et écrite, même lorsqu’elle peut être faite sans délai
de préavis.
Il a été jugé que sans notification préalable, une rupture de crédit
est abusive, et ce, même lorsque la banque est autorisée à ne pas respecter un
délai de préavis, pour supprimer le découvert accordé à son client.
(Cass. com. 18 mars 2014, n° 12-29583)
Autorisation
exceptionnelle
Une
autorisation exceptionnelle de découvert ne constitue pas une autorisation
tacite de découvert durable, dès lors que la banque ne s’est pas engagée à
renouveler l’opération.
(Cass.com.
14 octobre 2014, n° 13-13622)
Pas de
préavis pour une facilité de caisse occasionnelle
Une banque peut mettre fin, sans préavis, à une facilité de caisse
ponctuelle consentie à une entreprise.
En l’espèce, il n’existait aucune convention de compte entre la banque
et l’entreprise.
(Cass.com. 27/01/2015, n° 13-26475)
Découvert à
durée déterminée
De façon
discrétionnaire et sans préavis, une banque est en droit de ne pas renouveler
les ouvertures de crédit à durée déterminée.
Un crédit à durée déterminée prend normalement fin lors de la survenance
de son terme, sans qu’il soit nécessaire, pour la banque, de respecter un
préavis.
(Cass.com.
25/10/2017, n° 16-16839)
Fonds de roulement et découvert
Le fonds de roulement permanent ou structurel de l’entreprise doit être
financé comme un véritable investissement par :
• des fonds
propres ;
• des apports
en compte courant d’associés ;
• un crédit
moyen terme ;
• un
autofinancement suffisant.
Il ne doit pas être financé par un découvert chronique.
Seul le besoin fluctuant du fonds de roulement peut être financé par du
découvert.
Pour bien conduire sa croissance, l’entreprise doit financer
l’augmentation des BFR dus à la progression de son chiffre d’affaires, en
priorité par l’accroissement de son autofinancement. En cas d’insuffisance de
financement dû à un autofinancement trop faible, il faut prévoir de remplacer
cette insuffisance par des capitaux permanents (stables) supplémentaires :
• crédit à
moyen terme ;
• apport en
fonds propres ;
• apport en
compte courant d’associé.
À défaut, l’insuffisance de capitaux ressortira en découvert…
Coût du
découvert
Le coût du
découvert comprend :
• l’intérêt
des capitaux utilisés (appelé : intérêts débiteurs calculés selon la
méthode des nombres) ;
• la
commission de plus fort découvert (qui peut majorer les intérêts débiteurs de
50 %...) ;
• la
commission de compte ou commission de mouvement ;
• la
commission d’ouverture ou de confirmation ;
• la
commission fixe (mensuelle ou trimestrielle) ;
• la
commission de dépassement (éventuelle) etc.
La plupart de ces commissions sont négociables.
Compte tenu de ces différentes commissions, un taux de découvert de
base de 6 % peut atteindre un taux de
revient de 12 %... (d’où le taux d’usure).
Gestion du découvert
Les chefs de PME considèrent souvent, à tort, le découvert comme un
véritable moyen de financement par la souplesse qu’il procure.
Il ne faut cependant pas perdre de vue que celui-ci doit financer les
besoins cycliques et fluctuants de l’entreprise et non devenir chronique.
Il ne doit pas prendre la place des capitaux permanents, capitaux
stables par excellence.
Cette dernière situation pose problème pour le banquier et pour
l’entreprise.
L’entreprise
se trouvant devant un découvert chronique et en accroissement devra repenser
son financement et remplacer son découvert par des capitaux permanents :
apports en compte courant, augmentation de capitaux propres ou crédit de
restructuration de fonds de roulement.
La gestion du découvert fait partie intégrante de la gestion du besoin
en fonds de roulement qu’il finance en partie. Minimiser les besoins en fonds
de roulement revient à minimiser le recours au découvert.
Le découvert d’une entreprise peut avoir plusieurs origines :
• investissements
mal financés ;
• accroissement
des besoins en fonds de roulement insuffisamment financés par son
autofinancement (rentabilité) ou par des capitaux permanents ;
• réalisation
de pertes fréquentes ;
• prélèvements
personnels trop importants (entreprise individuelle).
À noter : un découvert autorisé n’est pas un passif
exigible ; par contre, un découvert non autorisé peut rapidement le
devenir…
Michel di
Martino,
Expert-comptable,
Diplômé
Commissaire aux comptes