Le fonctionnaire, qui avait
été suspendu par la municipalité après sa condamnation pour détournement de fonds
publics, demandait à geler cette sanction en raison du crédit immobilier qu’il
devait payer. Le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a
estimé qu’il n’était pas placé dans « une situation d'urgence »
financière.
Pas de retour au travail pour
l’agent administratif de Corbeil-Essonnes qui avait été suspendu – en tout cas,
pas pour le moment. Tel est le contenu de l’ordonnance
en date du 18 avril 2024 qui vient d’être rendue publique par le tribunal
administratif de Versailles.
Ce fonctionnaire employé à la
direction générale des services de la commune, service technique de
l'évènementiel, avait fait l'objet, via un arrêté du maire Bruno Piriou, d'une
mesure de suspension de fonctions sans traitement pour une durée de quatre mois
à compter du 6 mars.
Cette mesure faisait suite à
la condamnation de cet homme en janvier dernier, par le tribunal correctionnel
d'Evry-Courcouronnes, à un an d'emprisonnement avec sursis et 2 500 euros
d'amende, pour soustraction, détournement ou destruction de biens d'un dépôt
public et abus de confiance – décision dont il a par ailleurs fait appel.
Pour le fonctionnaire privé
de rémunération, l’urgence est remplie
Dans sa requête enregistrée
début avril auprès du juge des référés, le fonctionnaire réclamait la
suspension de l'exécution de l'arrêté pris par le maire et sa réintégration.
Il invoquait à l’appui de sa
demande que la condition d'urgence, nécessaire à une requête en référé, était
remplie, étant donné qu’il était « privé » de
rémunération depuis un mois et que celle de son épouse était « insuffisante »
pour faire face aux frais de la famille, en particulier ceux afférents à leurs deux
enfants et à leur crédit immobilier.
L’agent municipal soutenait en
outre que la décision du maire était entachée d'illégalité car la suspension n’était
« pas motivée par l'intérêt du service », et qu'il avait
exercé ses fonctions les six dernières années « sans difficulté
disciplinaire ».
Lors de l’audience publique,
le 11 avril, l’avocat du fonctionnaire a par ailleurs fait valoir que ce dernier
n’avait pas été suspendu au moment où la commune était partie civile au procès.
La mesure intervient « sept ans après les derniers faits reprochés »,
a-t-il également souligné, avant d’arguer que la condamnation prononcée par le
tribunal correctionnel concerne « des faits étrangers à ses fonctions »
De son côté, l’avocat qui
représente la commune a au contraire avancé que les faits commis par l’agent
municipal l'ont été « au détriment de la commune ». Les sommes
détournées ont été signalées par le service de renseignement français Tracfin et
s’avèrent « très supérieures aux rémunérations en cause »,
a-t-il pointé. Et d’ajouter que si l’agent n’avait pas été suspendu avant le
jugement du tribunal correctionnel, c’était en réalité pour préserver la
présomption d'innocence.
Des pièces justificatives insuffisantes selon le TA
Des arguments qui ont fait
mouche. Finalement, le tribunal administratif de Versailles juge dans son
ordonnance du 18 avril que les pièces produites « ne justifie[nt] pas
que [le fonctionnaire] se trouverait, du fait de la décision en litige, placé dans une situation
financière telle qu'en résulterait pour lui une situation d'urgence ».
Pour conclure au rejet de la
requête de l’agent communal, la juridiction estime que si celui-ci justifie de ses
charges fixes, et notamment des échéances de son crédit immobilier, « le
seul relevé de compte chèques produit est un extrait relatif au détail des
virements (…) qui ne permet pas d'apprécier l'état de sa trésorerie ou s'il
disposerait d'une épargne ».
Elle ne manque pas non plus
de souligner que le fonctionnaire n'a contesté l’arrêté du maire « que
près d'un mois après qu'il ne produise ses effets ». Toujours pas vraiment
compatible avec l’urgence, donc, selon elle.
Le tribunal administratif de
Versailles doit désormais réexaminer la légalité de la décision d’ici plusieurs
mois.
Bérengère
Margaritelli