Le Premier ministre a
notamment annoncé une réduction moindre des allègements de charge, et l’annulation
des hausses de taxes sur l’électricité. Il a également assuré les patrons de
son intention d’accélérer sur la simplification économique.
En sursis, Michel Barnier était
en opération séduction devant les entrepreneurs, à l’occasion du salon Impact
PME organisé par la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), jeudi
28 novembre à Station F.
Le Premier ministre a souligné
le « moment grave » que traverse par la France, conjonction d’un
contexte géopolitique instable, de tensions sociales et d’une situation
politique intenable. « C’est un moment qui exige du sang froid et du
calme », a-t-il expliqué.
Mais le locataire de Matignon
n’était pas venu les mains vides, et a formulé plusieurs annonces. Michel
Barnier s’est félicité d’un « dialogue social qui porte ses fruits »,
avec un accord avec les partenaires sociaux sur l’assurance chômage et l’emploi
des séniors, et a déclaré souhaiter dans les prochaines semaines lancer des
concertations sur la santé au travail, la prise en charge des arrêts de
travail, l’absentéisme et les maladies professionnelles, « avec écoute,
respect et dialogue ».
Sur la maîtrise de la dette,
le Premier ministre a estimé que le retour sous la barre des 3% exigé par l’Union
européenne doit se faire « de la manière la plus juste et la plus
équilibrée possible ». La trajectoire, qui prévoit le retour dans les
clous des demandes de Bruxelles d’ici 2029, passera par un déficit de 5% en
2025, contre un peu plus de 6% en 2024. Michel Barnier a à ce titre reconnu un
budget « imparfait », promettant des améliorations d’ici le
vote final.
Plusieurs annulations de
recettes
Axe d’inquiétude pour les petites
entreprises, l’apprentissage devrait être préservé par le gouvernement, selon
son chef qui compte « faire en sorte de ne pas casser son essor ».
Les allègements de charges pour
les entreprises, « dont le coût pour l’État est passé de 55 milliards
en 2019 à 80 milliards cette année » selon Michel Barnier, ne seront
pas réduits jusqu’à 2,25 smic. Alors que le projet initial prévoyait de
supprimer 4 milliards d’euros de ces allègements, la loi de finances devrait
finalement limiter à 1,6 milliards d’euros cette baisse. Soit 2,4 milliards à
aller chercher ailleurs.
Et ce ne sera pas sur le pacte
Dutreil que le gouvernement va récupérer ce manque à gagner. Ce dispositif
facilitant la transmission d’entreprises via une exonération partielle des
droits de succession était
dans le collimateur de Bercy. Mais Michel Barnier a annoncé son maintien,
sous les applaudissements des entrepreneurs venus assister à son discours.
Le crédit d’impôt innovation
sera prolongé, et le dispositif « jeune entreprise innovante »
(JEI) sera « globalement préservé malgré une légère baisse de l’avantage
fiscal ». Le chef du gouvernement a aussi annoncé le « maintien »
du prélèvement forfaitaire unique (PFU) sans détailler si ce maintien se ferait
au taux actuel de 30% ou au taux voté par le Sénat de 33%.
Autre annonce importante, le
Premier ministre a déclaré ne pas augmenter les taxes sur l’électricité. « Cela
permettra une baisse des prix en février 2025 de 14% au lieu des 9%
initialement prévus. »
« Il faut que les
lois soient moins bavardes »
Michel Barnier a aussi abordé
longuement la règlementation dans les entreprises, rappelant qu’un agenda de
simplification avait été engagé par le gouvernement. « Je pense qu’il y
a plusieurs points de PIB à gagner dans notre pays, au moins deux, en
simplifiant, en décentralisant, en dérèglementant tout ce qui peut l’être. »
Le projet de loi pour la
simplification de la vie économique, adopté en première lecture par le Sénat le
22 octobre dernier, arrivera au début d’année prochaine à l’Assemblée
nationale. Le Premier ministre a annoncé soutenir la mise en place d’un « test
PME » avant l’adoption de nouvelles règlementations. Ce test permet
de faire tester une norme par un panel d’entreprises et d’évaluer la charge
administrative qu’elle représente avant. Une première expérimentation de ce test
avait été lancée pour l’application de la directive CSRD. Une nouvelle
tentative devrait avoir lieu pour la généralisation de la facturation
électronique, a annoncé Michel Barnier.
La fin des Cerfa a également
été évoquée. Prévue pour 2030, elle sera précédée d’une première étape d’ici la
fin de l’année 2026, avec « la rationalisation drastique en supprimant
certains formulaires, en dématérialisant ceux qui ne le sont pas encore, et en
passant autant que possible à un simple régime de déclaration lorsque les
entreprises entreprennent un nouveau projet.
L’ancien commissaire européen
a regretté la surtransposition de certaines règles par le Parlement français.
Une commission bicamérale sera chargée de regarder les textes en question, afin
de supprimer les dispositions « qui créent des concurrences déloyales,
ce que nous ne pouvons plus nous permettre ». L’occasion de citer le
socialiste Jean Jaurès devant les patrons : « Aller à l’idéal et
comprendre le réel. »
« Il faut que les
lois soient moins bavardes », a-t-il asséné, regrettant que le pays soit
allé « beaucoup trop loin » sur la transposition de la
directive CSRD, en prévoyant par exemple des actions pénales, dont le Premier
ministre a annoncé leur future suppression. « On va appuyer sur pause »,
a assuré Michel Barnier, très applaudi. À moins que ce soit un stop que le
gouvernement subisse prochainement…
Alexis
Duvauchelle