Devant la 6e
chambre correctionnelle versaillaise, un barbecue trop arrosé dégénère en violences et se termine avec
22 mois ferme.
« Vous l'avez
rencontré en cure... Une cure thermale ? », demande un avocat à
Simon L.. Bien sûr que non. C'est bien en cure de « désintox »
qu'il a croisé John F.. Puis, il a enchaîné avec une postcure de deux mois.
Cette dernière était finie depuis moins de quinze jours lorsque les deux
copains se sont retrouvés pour un barbecue.
Ensemble, ils ont descendu
quelques bières, et un bon litre de whisky. Et puis, Simon L. a commencé à
faire des avances à la compagne de John F. lorsque ce dernier avait le dos
tourné, notamment en posant une capote bien en évidence sur la table basse. Quand
un ami du couple est passé leur rendre visite, il a eu l'outrecuidance de ne
pas dire bonjour à Simon L., lequel a dégoupillé illico.
Il s'est battu avec
l'importun, tandis que la compagne de John F. emmenait les enfants dans leur
chambre, puis mettait la musique à fond pour couvrir les cris. Après avoir mis
un coup de tête et un coup de poing, Simon L. a fait une clé d'étranglement à John
F. et s'est saisi d'une faucille. L'autre l'a fait tomber et l'a étranglé à son
tour. Alors Simon L. lui a mis un coup sur la tête avec la bouteille vide (7
jours d'ITT).
Lorsque les gendarmes sont
arrivés, il avait toujours à la main la faucille avec laquelle il venait de
casser la porte vitrée de la chambre des enfants. « Ils racontent qu'à
leur arrivée, vous étiez fortement alcoolisé », euphémise la
présidente, « et que vous avez agité la faucille en leur direction en
faisant mine de la jeter ». Il a aussi, par la même occasion, agoni
les gendarmes d'injures, notamment raciales.
« J'avais trop bu »,
indique Simon L. à la barre : « J'aurais pas dû boire. J'ai perdu
le contrôle, et puis voilà. » La présidente semble trouver ça un peu
court. « C'est parti d'une dispute futile, d'une broutille, c'était
sûrement de ma faute », ajoute simplement le prévenu, avant
d'expliquer que « je me suis laissé tenter, j'étais content de revoir
un copain que j'avais rencontré en cure ». Il concède que « j'aurais
dû être plus fort, j'aurais pas dû boire d'alcool fort. J'étais abstinent
depuis des semaines. » Enfin presque : « J'avais fait un
seul écart, j'avais bu deux bières, mais je m'étais repris en main tout seul. »
Il reconnaît tout, à
commencer par le traumatisme pour les enfants du couple, âgés de 4 et 6
ans : « J'ai honte d'avoir fait ça, je suis moi-même père d'une
petite fille ». « Ça aurait pu redescendre au moment de
l'interpellation », relance la présidente, « mais pas du
tout ». D'ailleurs, même lorsqu'on lui a notifié ses droits, après
dégrisement donc, il est reparti dans les outrages : « Fils de
pute, j'encule ta mère, je baise tes filles, va niquer ta grand-mère ».
« En fait, vous ne redescendez jamais », résume la présidente.
« Je ne m'en rappelle pas bien, mais c'est possible que je l'aie dit »,
concède Simon L..
« J'ai pas envie d'être
incarcéré pendant des mois et des mois... »
Il n'a plus de permis à cause
de l'alcool, que l'on retrouve aussi dans toutes ses mentions au casier :
il a pris du sursis, puis du ferme, qu'il devait exécuter sous bracelet. Il
était même convoqué le lendemain de cette audience pour une énième conduite
sous l'empire d'un état alcoolique (et sans permis, donc). Le juge de l'application
des peines (JAP) a émis un avis favorable à la révocation de 10 mois de sursis
probatoire. « Je vais pas recommencer, proteste Simon L.. J'ai
pas envie de tout perdre, d'être incarcéré pendant des mois et des mois, de
perdre mon emploi, mon appartement... ».
« Laissez-moi une
chance, tente-t-il. En me mettant sous bracelet électronique et en
renforçant mon suivi. Je veux pas terminer en prison. J'ai pris conscience que
c'est parti trop loin. » « Alors, effectivement, il reconnaît
l'intégralité des infractions, entame la procureure. La difficulté,
c'est plutôt la peine à prononcer en répression. » Elle estime « qu'aujourd'hui,
il a une attitude à porter à son crédit, on voit bien qu'il est affecté et
qu'il y a une problématique de souffrances derrière ». Elle réclame 14
mois ferme et 6 mois de révocation.
Place à l'avocat de la
défense : « Je retiens tout de même que […] c'est quelqu'un
qui était dans une dynamique positive depuis 4 ou 5 mois. Il n'est pas dans le
déni et dans le refus de soins. » Il souligne que son client « est
traumatisé depuis son enfance. Il a des failles de la personnalité qui relèvent
de la psychiatrie et que l'alcool est venu combler. […] Vous allez
le déclarer coupable, et j'ai énormément de peine pour lui, parce que ça
faisait plusieurs mois que je n'avais plus de nouvelles, et j'en étais très
heureux. »
À la reprise, Simon L. écope
de 12 mois ferme avec maintien en détention, auxquels s'ajoutent 10 mois de
révocation. « Ça veut dire que vous partez pour 22 mois, récapitule
la présidente. C'est l'occasion de tout reprendre à zéro. Et pas
seulement l'addiction, parce qu'elle révèle autre chose. Il va falloir mettre à
profit ce temps-là... »
Antoine
Bloch