JUSTICE

Didier Migaud installe les missions d’urgence pour la justice

Didier Migaud installe les missions d’urgence pour la justice
Publié le 28/11/2024 à 19:47

Trois missions, chacune gérées par cinq à six professionnels de la justice, devront trouver des solutions pour recentrer la justice sur son rôle, améliorer les délais d’audiencement et mieux exécuter les peines. Les conclusions sont attendues pour la mi-février.

Une semaine après l’annonce par le ministre de la Justice du lancement de trois missions d’urgence pour la justice, Didier Migaud a officiellement installé ces missions, ce jeudi 28 novembre à la Cour de cassation.

Un choix de lieu symbolique pour le garde des Sceaux : « La Cour de cassation incarne par ses décisions l’État de droit et la justice dans notre pays. » Entouré de nombreuses personnalités du monde de la justice, comme les Premier président et procureur général près la Cour de cassation Christophe Soulard et Rémi Heitz, mais aussi Thomas Lyon-Caen, président de l’Ordre des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation, Didier-Roland Tabuteau, vice-président du Conseil d’État.

A cette occasion, Didier Migaud a rappelé son souhait d’avoir une justice « mieux reconnue, respectée et appréciée ».

C’est en ce sens que le ministre de la Justice a établi trois constats : justice débordée par le nombre de procédures, délais d’audiencement « déraisonnables et parfois insupportables », et surpopulation carcérale. Sur ce dernier point, loin des procès réguliers en laxisme judiciaire intentés par certains détracteurs, Didier Migaud a jugé au contraire qu’elle fait preuve d’une fermeté qui explique la surpopulation carcérale historique, que le retard du plan 15 000 places de prison ne permettra pas de limiter. Conséquence : « L’exécution des peines est souvent différée bien après leur prononcé, ce qui en fait perdre le sens»

« Toutes les options doivent être sur la table »

À ces trois constats vont être adossées trois missions d’urgence.

Première d’entre elles : le recentrage de la justice sur son cœur de métier, en renforçant l’utilisation de dispositifs alternatifs afin de désengorger la justice judiciaire, « sans que cela ne conduise à une dépénalisation des faits portant le plus gravement atteinte à la probité et à la confiance publique ». La question du recours aux voies amiables sera l’un des axes forts de cette mission qui devra rendre plus efficiente l’action de la justice tout en simplifiant la vie du justiciable.

La deuxième mission aura pour objectif de juger dans des délais raisonnables. « Face à ces enjeux, toutes les options doivent être sur la table », a assuré le ministre de la Justice, qui admet être « inquiet, très inquiet même, pour l’audiencement en matière correctionnelle ».

Le sujet d'une meilleure exécution des peines sera au menu de la troisième et dernière mission. Didier Migaud a à ce sujet souhaité « une réflexion sérieuse » sur les courtes peines d’emprisonnement, déjà évoquées par le Premier ministre Michel Barnier dans sa déclaration de politique générale. Mais « on ne peut pas faire de courtes peines dans l’état actuel de nos prisons », a estimé le ministre. L’effectivité plus immédiate des peines, en particulier pour les mineurs, est également mise en avant.

Avec ce plan, Didier Migaud souhaite « répondre rapidement au sentiment majoritaire [des] concitoyens d’une justice trop complexe, trop lente et peu efficace ».

Cinq à six professionnels du droit, « dotés chacune et chacun d’une solide expérience dans leur domaine de compétence », auront la charge de mener à bien chacune des trois missions. On peut notamment citer Frédérique Agostini, conseillère à la Cour de cassation, pour la première mission, Maryvonne Caillibotte, procureure de la République près le tribunal judiciaire de Versailles, pour la seconde, et Clotilde Lepetit, avocate au barreau de Paris, pour la troisième.

Deux mois et demi pour trouver des solutions

Comme leurs noms l’indiquent, les missions d’urgence seront particulièrement éphémères. Leurs conclusions seront rendues dans des délais resserrés, avec un objectif de rendu au ministre de la Justice au 15 février, soit seulement deux mois et demi pour trouver des solutions. « Vous n’aurez pas à tout réinventer, personne ne vous le demande. Vous aurez à vous appuyer sur l’existant, sur tout ce qui a été dit, écrit et pensé, afin de pouvoir, fort de votre propre expérience mais également des consultations auxquelles vous aurez libre choix de procéder, en tirer rapidement les conclusions en proposant les meilleures évolutions concrètes, utiles et opérationnelles ; celles qui mériteront d’être mises en œuvre rapidement », a rassuré Didier Migaud.

Les trois rapports seront par la suite rendus publics, et le garde des Sceaux annoncera, après concertation avec le Premier ministre, les mesures retenues puis mises en œuvre par son équipe. Si le gouvernement n’est pas tombé d’ici là, ou que le successeur de Didier Migaud décide de reprendre le dossier.

Alexis Duvauchelle

 

Les membres des missions d’urgence pour la justice :

 

Recentrer la justice sur son rôle

  • Pascal Bougy, avocat général à la Cour de cassation
  • Frédérique Agostini, conseillère à la Cour de cassation
  • Rémy Schwartz, conseiller d’État
  • Nathalie Escaut, conseillère d’État
  • Louis Gautier, procureur général honoraire près la Cour des comptes
  • Thierry Savy, conseiller maître à la Cour des comptes

 

Juger dans des délais raisonnables

  • Jacques Boulard, premier président de la cour d’appel de Paris
  • Franck Rastoul, procureur général près la cour d’appel d’Aix-en-Provence
  • Nathalie Poux, présidente du tribunal judiciaire de Dijon
  • Maryvonne Caillibotte, procureure de la République près le tribunal judiciaire de Versailles
  • Pascal Rouiller, avocat au barreau d’Angers

 

Mieux exécuter les peines

  • Jean-François Beynel, premier président de la cour d’appel de Versailles
  • Marie-Christine Tarrare, procureure générale près la cour d’appel de Besançon
  • Peimane Ghaleh Marzban, président du tribunal judiciaire de Bobigny
  • Cécile Gensac, procureure de la République près le tribunal judiciaire de Nîmes
  • Bruno Clément-Petremann, directeur du centre pénitentiaire de Paris La Santé
  • Clotilde Lepetit, avocate au barreau de Paris

 

0 commentaire
Poster

Nos derniers articles