Au titre des préconisations qu'il formule dans un livre blanc,
le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce suggère de
fiabiliser le Registre des bénéficiaires effectifs en étendant le mécanisme de
radiation d’office déjà en vigueur pour le Registre du commerce et des sociétés.
Un an après l’annonce par le
ministère des Comptes publics d’un plan de lutte contre la fraude sociale et de
ses mesures pour y parvenir, le Conseil national des greffiers des tribunaux de
commerce (CNGTC) a dévoilé ce 23 mai son Livre blanc portant 15 recommandations
pour la profession, afin de donner plus de moyens aux greffiers pour lutter contre le
blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT).
Ces experts font en effet partie des 48 professions assujetties à l’obligation de déclaration à TRACFIN
d’opérations suspicieuses : en 2023, les greffiers de tribunaux de
commerce ont envoyé 1 431 déclarations de soupçon auprès du service de
renseignement français.
Donner l’accès aux greffiers
à la base de données nationale FICOBA
Pour affermir l’arsenal à
disposition des greffiers, le CNGTC préconise de renforcer les missions de
police économique au service de la transparence, par exemple en donnant la
possibilité aux greffiers de vérifier la réalité du compte bancaire déclaré par
les sociétés au moment de leur création.
Car si les greffiers peuvent
contrôler les pièces déposées justifiant de l’ouverture d’un compte au nom de
l’entreprise en formation pour les SA et SAS, pour les SARL et EURL, « l’attestation
de dépôt n’est pas nécessaire, il suffit d’indiquer librement dans les statuts
le montant des apports constituant le capital ainsi que les nom et adresse de
la banque » est-il expliqué dans le livre blanc.
Le CNGTC recommande en
particulier d’automatiser les relations électroniques avec la Banque de France,
ce qui permettrait d’identifier immédiatement les comptes ouverts par les
entreprises en formation. Les greffiers seraient aussi autorisés à interroger
la base de données nationale FICOBA qui recense les comptes de toute nature que
gèrent les administrations publiques notamment.
Vers la création d’un
registre officiel des entreprises exclues des marchés publics
Parmi ses recommandations
également, le CNGTC fait le point sur les outils dont devrait se doter, selon
lui, l’écosystème de la LCB-FT, afin de faciliter les missions des autorités et
des professionnels assujettis. Deux d’entre elles entendent notamment créer
deux registres distincts, dont un registre officiel des entreprises exclues de
la passation des marchés publics.
En effet, contrairement aux
États-Unis par exemple « où une liste de l’ensemble des personnes
exclues des marchés publics est compilée par une agence publique et mise à
disposition des acheteurs publics », ou bien « à certaines
pratiques des banques de développement, qui, comme La Banque Mondiale,
prévoient une exclusion des marchés publics pour les sociétés condamnées pour
corruption et établissent des listes y afférentes », la France ne possède
pas de tels dispositifs, pointe le CNGTC.
Par ailleurs, aucune mention
de ce type de condamnation n’apparait sur l’extrait Kbis de l’entreprise. En
créant ce fichier national dont la gestion serait confiée au CNGTC, le Conseil
a pour ambition de permettre la sécurisation de la commande publique et
constituerait « un outil de première importance dans le renforcement
des dispositifs de prévention des difficultés des entreprises ».
Le livre blanc formule en
outre cinq propositions afin de gagner en efficacité dans la tenue du Registre
des bénéficiaires effectifs (RBE), dont celle d'étendre le mécanisme de radiation d’office actuellement
en vigueur pour le Registre du commerce et des sociétés, une mesure qui selon le CNGTC permettrait « de
fiabiliser le registre des bénéficiaires effectifs et serait une mesure de
prévention, ces sociétés étant le plus souvent des coquilles vides qui peuvent
être détournées à des fins frauduleuses ».
Une recommandation propose
par ailleurs la restauration de l’obligation de déclaration des chaînes de
détention au RBE qui prive actuellement « les administrations
françaises et européennes d’éléments essentiels dans l’identification des
bénéficiaires effectifs ».
Le président du CNGTC Victor
Geneste l’assure, « La gestion de situations
multiples et variées en lien avec l’ensemble des parties prenantes du monde de
la justice économique a abouti à ces quinze mesures » pour lutter contre la criminalité
financière. Plusieurs propositions ont d’ailleurs été reprises
dans le rapport de la Commission d’enquête du Sénat sur l’impact du narcotrafic,
dont les conclusions ont été présentées le 14 mai, telles que la recommandation
sur la radiation d’office des entreprises ne respectant pas leurs obligations, indique
un post LinkedIn du conseil.
Allison Vaslin