DROIT

Le Conseil constitutionnel rejette dix recours contre le décret convoquant les élections législatives

Le Conseil constitutionnel rejette dix recours contre le décret convoquant les élections législatives
Publié le 20/06/2024 à 18:05

Les requérants demandaient son annulation, assurant que les délais serrés porteraient atteinte à la sincérité du scrutin. Les Sages assurent pourtant que le texte respecte la Constitution.

La décision ne faisait que peu de doutes. Le Conseil constitutionnel a rejeté, jeudi 20 juin, dix requêtes visant à annuler tout ou partie du décret du 9 juin 2024 portant convocation des électeurs pour l’élection des députés à l’Assemblée nationale. Des requêtes déposées, entre autres, par des députés sortants, à l’image de Manuel Bompard et Olivier Taoumi, mais aussi des associations, comme l’Association de défense des libertés constitutionnelles (Adelico).

Des requêtes que l’institution a pu analyser en raison de la prérogative lui permettant « exceptionnellement de statuer sur les requêtes mettant en cause la régularité d’élections à venir, dans les cas où l’irrecevabilité qui serait opposée à ces requêtes risquerait de compromettre gravement l’efficacité de son contrôle de l’élection des députés et des sénateurs, vicierait le déroulement général des opérations électorales ou porterait atteinte au fonctionnement normal des pouvoirs publics ».

La date d’effet du décret disputée

Sur l’article 1 fixant les dates du premier tour de l’élection (dimanche 30 juin, sauf dans certains territoires ultramarins où le scrutin est avancé au samedi 29 juin), des requérants soutenaient que le délai entre la publication du décret et la tenue du scrutin était contraire à la Constitution qui impose un délai minimal de 20 jours pour l’organisation des élections. Selon eux, le décret publié le 10 juin au Journal officiel ne devrait prendre effet que le lendemain de sa publication « en application des règles de droit commun régissant l’entrée en vigueur des lois et règlements », soit 19 jours avant le premier tour.

Certains estimaient également que le délai très court séparant l’annonce de la convocation des électeurs et le scrutin « porterait atteinte à la liberté et à la sincérité du scrutin ».

Des remarques balayées par le Conseil constitutionnel, qui assure que le décret du 9 juin portant dissolution de l’Assemblée nationale a pris effet le jour même, respectant ainsi le délai minimal fixé par la Constitution.

La Constitution prévaut sur le Code électoral

Très contesté également, l’article 4 fixait les listes électorales utilisées pour les législatives anticipées à la date du 9 juin 2024, empêchant les électeurs ayant constaté leur radiation au moment de leur vote aux élections européennes de pouvoir modifier leur situation pour le prochain scrutin (en dehors de cas spéciaux comme les citoyens ayant récemment acquis la nationalité française ou obtenu la majorité qui peuvent demander à être inscrits jusqu’à ce 20 juin). En Nouvelle-Calédonie, ce sont même les listes électorales arrêtées le 29 février 2024 qui seront utilisées.

« De nombreuses personnes pourraient être privées de la possibilité de participer au scrutin », estimaient les requérants, redoutant une insincérité du scrutin. Ils assuraient également que l’article L17 du Code électoral entraient en contradiction avec la Constitution. Cet article fixe la date limite pour s’inscrire sur les listes électorales avant une élection au sixième vendredi précédent le scrutin, soit dans le cadre des législatives anticipées… le 24 mai, plus de deux semaines avant l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale.

« Les dispositions de la Constitution qui fixent le délai dans lequel doivent avoir lieu les élections générales après la dissolution et auxquelles s’est conformé le décret du 9 juin 2024 prévalent nécessairement sur ces dispositions législatives », ont sur ce point estimé les Sages, jugeant que les contraintes matérielles auxquelles font face les mairies imposent une date limite relativement éloignée du scrutin pour s’inscrire sur les listes électorales. Les électeurs victimes d’une radiation abusive, en raison d’une erreur matérielle par exemple, peuvent toujours saisir un tribunal judiciaire, rappelle le Conseil constitutionnel.

La demande dématérialisée de procuration validée

L’article 9 du décret, qui permet pour les personnes disposant d’une identité numérique d’établir une procuration sans avoir à se présenter physiquement aux autorités – une méthode utilisée pour la première fois lors des élections européennes – était aussi pointé du doigt par certains requérants, redoutant que cette dématérialisation supprime « la possibilité d’une vérification du caractère personnel de ces demandes », augmentant ainsi le risque de fraude. Ils alertaient aussi sur la possibilité d’une défaillance du système informatique pouvant altérer la sincérité du scrutin. L’absence de dispositif de lutte contre les pressions dont pourraient être victimes les majeurs protégés était également relevée.

Le Conseil constitutionnel a simplement assuré ici qu’« une telle procédure n’est pas, par elle-même, de nature à affecter la régularité du vote des électeurs ».

Alexis Duvauchelle

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