L’inflation
finira-t-elle par faire son grand retour dans un environnement de reprise
post-pandémie ? Comment un portefeuille diversifié peut-il s’y
préparer ?
Il ne fait
aucun doute que les effets désinflationnistes de la pandémie continueront de
dominer à court terme. Par ailleurs, les forces déflationnistes structurelles à
l’œuvre ne devraient pas non plus changer : niveaux d’endettement
excessifs, vieillissement démographique et disruption technologique, pour n’en
citer que quelques-unes. Celles-ci continueront de peser sur l’inflation dans
un avenir proche. Face à une inflation toujours atone, on peut se demander si
les mesures de relance budgétaire et monétaire exceptionnelles déployées pour
lutter contre la pandémie doperont l’inflation.
Un
motif de complaisance ?
Confortés
par l’absence d’inflation après l’assouplissement quantitatif mis en place
pendant la crise financière mondiale de 2007/2008, les investisseurs semblent
verser dans la complaisance. Un consensus existe sur le fait que la situation
restera inchangée dans un avenir proche. Mais est-ce bien le cas, et sinon,
comment expliquer l’évolution au cours de la dernière décennie ?
La base
monétaire, la masse monétaire et l’inflation sont étroitement corrélées. En
d’autres termes, si les banques centrales font tourner la planche à billets via
l’assouplissement quantitatif, la masse monétaire et l’inflation augmentent
tandis que la vitesse de circulation de la monnaie reste constante. Toutefois,
à la suite de la crise financière mondiale, la base monétaire a augmenté, mais
la masse monétaire n’a pas suivi le mouvement tandis que le multiplicateur de
monnaie et la vitesse de circulation de la monnaie ont diminué. La monnaie qui
a été « imprimée » n’a pas débouché sur une augmentation de la masse
monétaire en raison de la croissance anémique du crédit. En effet, la
quasi-totalité de la monnaie créée est venue gonfler les excédents de réserves
de la Réserve fédérale américaine et des autres banques centrales.
Une
impulsion pour les prêts bancaires
Le cycle
actuel sera-t-il différent ? C’est possible. Certains signes montrent que
l’inflation pourrait repartir à la hausse. Les rendements réels resteront
ultra-bas, et les dépenses publiques financées par le déficit devraient
continuer à soutenir la reprise économique. La Réserve fédérale assouplit
actuellement la réglementation, encourageant les banques à prêter pour stimuler
l’économie. Après les avoir accusées d’être à l’épicentre de la crise
financière mondiale et les avoir sanctionnées en conséquence, la Fed cherche
aujourd’hui des moyens d’inciter les banques à prêter davantage et à utiliser
leurs fonds propres et réserves de liquidités à cet effet. Il s’agit là d’une
véritable nouveauté et certains signes montrent que ces politiques commencent à
porter leurs fruits. Outre l’augmentation significative des actifs de la Fed et
de la base monétaire, le crédit augmente pour la première fois à un rythme à
deux chiffres, aussi bien dans le privé que dans le public.
Toutefois,
d’autres conditions doivent être réunies pour que l’inflation décolle. Il faut
vaincre la pandémie et relancer l’activité économique. Le chômage doit baisser
afin que la pression sur les salaires augmente, tandis que le taux
d’utilisation des capacités doit augmenter dans tous les secteurs pour exercer
un effet sur les prix. Il est difficile d’évaluer à quel rythme ces conditions
se concrétiseront, mais le risque d’une montée de l’inflation dans les
économies est évident.
Le
dilemme des taux nuls
Les spécialistes de l’allocation du capital sont face à un dilemme :
comment construire un portefeuille diversifié solide susceptible de résister
aux corrections des marchés actions dans un environnement de taux nuls sur fond
de hausse de l’inflation ?
Il semble évident que compte tenu des taux d’intérêt quasi nuls que les
banques centrales tiennent à conserver, les emprunts d’État dégageront des
rendements faibles et, dans le meilleur des cas, proposeront une réduction des
risques modérée. Cette situation plaide en faveur d’une exposition accrue aux
actifs couverts contre l’inflation (obligations indexées sur l’inflation, or,
actifs réels) pour obtenir un portefeuille diversifié, là où les investisseurs auraient
précédemment privilégié des obligations nominales.
Si la stratégie consistant à remplacer des actifs nominaux n’offrant pas
de rendement par des actifs réels rémunérateurs peut sembler évidente dans le
scénario d’une remontée de l’inflation, elle ne résoudra en rien le problème de
la préservation du capital. Par conséquent, quels actifs choisir pour couvrir
les portefeuilles d’investissement contre les risques extrêmes ? Les
stratégies d’options longues convexes et de volatilité, notamment axées sur les
primes de risque avec un profil de rendement asymétrique, peuvent s’avérer
utiles et rendre les coûts de couverture abordables si elles sont structurées
efficacement.
Aron
Pataki,
Gérant
chez Newton IM,
boutique de BNY Mellon Investment Management