ÉCONOMIE

Les parlementaires trouvent un accord pour rendre la France plus attractive

Les parlementaires trouvent un accord pour rendre la France plus attractive
Pasée devant Londres, la place boursière parisienne est maintenant en concurrence avec Amsterdam
Publié le 31/05/2024 à 17:15
Députés et sénateurs se sont entendus le 28 mai dernier sur un texte visant à faciliter le financement des entreprises sur les marchés financiers français. Portée par le député de la majorité Alexandre Holroyd, la proposition de loi doit désormais repasser devant le Parlement la semaine prochaine.

La place financière de Paris est-elle suffisamment attractive face à ses concurrentes internationales ? Pour le député Renaissance Alexandre Holroyd, certaines mesures devaient en tous cas être prises pour améliorer l’attractivité de la France sur le marché de la finance internationale, dans le but de faciliter le financement des entreprises de l’Hexagone sur le marché. C’est le sens de sa proposition de loi, sur laquelle députés et sénateurs ont trouvé un accord en commission mixte paritaire, le 28 mai.

L’exposé des motifs souligne bien que Paris est redevenue une place plus attractive que Londres, devenant le premier marché boursier européen en termes de capitalisation, et que la compétitivité financière du pays avait permis de créer 7000 emplois entre 2017 et 2022. Mais c’est désormais avec Amsterdam et New York que la concurrence se joue car ces marchés offrent beaucoup de facilités aux investisseurs.

Alexandre Holroyd présente son texte comme une continuité de la loi Pacte, dans le but de « permettre aux entreprises de poursuivre leur développement grâce à la mobilisation des capitaux des investisseurs, français, européens et internationaux ». L’enjeu est en effet que les entreprises françaises aient des conditions suffisamment favorables pour se financer sur le marché domestique et non aller chercher des capitaux sur des places financières étrangères. Le texte vise aussi à rendre les échanges commerciaux « plus fiables, plus simples et plus fluides ».

Mieux financer les entreprises, dématérialiser les titres, numériser les assemblées générales

Le premier titre, centré sur les capacités de financement des entreprises, vise notamment à faciliter les introductions en bourse (article 1) en autorisant les actions à droits de votes multiples (et donc de dépasser la règle générale d’une action égale une voix). Cela permet aux fondateurs d’entreprises d’augmenter leurs capacités de financement en bourse tout en gardant le contrôle sur leur société.

Il autorise aussi les fonds communs de placement à risque (FCPR) composés de titres d’entreprises non cotées en bourse, à accompagner les entreprises cotées jusqu’à une capitalisation boursière de 500 millions d’euros contre une limite actuelle de 150 millions (article 2). Les modalités d’augmentations de capital sans droit préférentiel de souscription sont également assouplies (article 3). La proposition de loi donne également aux entreprises françaises le droit de transmettre certaines informations à des autorités étrangères, notamment de supervision (article 4). Ceci est actuellement interdit et empêche parfois, selon l’exposé des motifs, d’obtenir des agréments demandés par des sociétés de gestion françaises.

L’ensemble du titre 2 est centré sur la dématérialisation des titres transférables, c’est-à-dire des documents incorporant des droits qui ne peuvent être transférés indépendamment du transfert du document, afin de faciliter la croissance à l’international des entreprises françaises. Les titres transférables sont très utilisés dans le commerce international car ce sont ces documents qui permettent d’avoir accès aux marchandises. Pour l’instant, ces titres doivent suivre des procédures physiques avec de la documentation papier. Les titres électroniques auront la même valeur que les autres, et il sera possible de convertir les titres d’un format à l’autre.

Enfin, le dernier titre de la proposition de loi vise à « moderniser, simplifier et renforcer l’attractivité du droit en faveur de l’économie française ». Il favorise la tenue à distance sous forme numérique des assemblées générales d’actionnaires (article 10). Il prévoit également que la cour d’appel de Paris se spécialise dans les recours en matière d’arbitrage international (article 11).

Un accord trouvé sur les mesures phares

La proposition de loi, déposée le 12 mars 2024, a été voté en première lecture à l’Assemblée nationale le 10 avril et au Sénat le 14 mai. Mais les deux chambres divergeaient sur un certain nombre de points.

Au Sénat, le rapporteur Les Républicains Albéric De Montgolfier a notamment estimé que « « de simples ajustements techniques ne suffiront pas face à la concurrence fiscale et juridique d'Amsterdam et New York » », et regretté que le gouvernement n’ait pas déposé de projet de loi sur le sujet, qui aurait eu plus de poids qu’une proposition d’un député et permis la réalisation d’une étude d’impact. La gauche s’est quant à elle opposée au texte, regrettant en substance une financiarisation de l’économie.

La chambre haute a souhaité encadrer la possibilité de vote à droits multiples, en limitant à 25 le nombre de droits de vote associés à une action. Elle a aussi voulu faciliter le financement des petites entreprises, en assouplissant leurs critères d’éligibilité au PEA-PME (plan d’épargne en actions permettant aux particuliers de placer de l’argent dans les titres d’entreprises intermédiaires), ainsi que les critères pour les sociétés cotées sur un marché de croissance aux fonds communs de placement d'entreprise (épargne salariale).

Le Sénat a aussi validé un amendement introduit par le ministère de l’Économie, prévoyant la possibilité pour le gouvernement de légiférer par ordonnance sur l’autorisation d’achat d'actions fractionnées, ce qui permettrait aux particuliers d’acheter seulement une portion d’action, d’obligation ou de part de fonds s’ils le souhaitent. Ces fractions de titres permettront de bénéficier des mêmes droits que les détenteurs d’un titre entier, mais les performances, les risques et les dividendes sont proportionnels à la part achetée.

Le Sénat a également apporté un amendement pour plafonner les indemnités de licenciement des « preneurs de risque », c’est-à-dire notamment les traders et leur hiérarchie. Les sénateurs ont également voulu améliorer les procédures contentieuses pour les actionnaires dont les résolutions ne sont pas inscrites à l’ordre du jour des assemblées générales sans que les justifications du conseil d’administration ne soient légitimes. Le tribunal de commerce serait ainsi autorisé à statuer sur la forme et le fond.

Le texte issu de la commission mixte paritaire conserve la mesure phare d’actions à droit de vote multiples. Ces droits seront finalement limités à 25 par action sur les plateformes multilatérales de négociation (MTF, marché boursier alternatif créé pour concurrencer les grands marchés historiques), mais illimités sur les marchés réglementés. L’accord conserve aussi le plafonnement des indemnités de licenciement, mais elle le limite aux traders et à leurs managers.

Cette nouvelle mouture de la proposition de loi sera débattue en séance le 3 juin au Sénat et le 5 juin à l’Assemblée Nationale.

Aude David

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