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Le 27 septembre, au sein de l'Assemblée nationale, la délégation aux
collectivités territoriales et à la décentralisation présentait un rapport d'information sur les articles 4 et 10 du projet de
loi pour le plein emploi. De quoi nous donner un aperçu des enjeux que recouvre
ce projet de loi pour les collectivités territoriales.
C’est un
exercice peu habituel auquel s’est livrée la Délégation aux collectivités
territoriales et la décentralisation, le 27 septembre dernier, à l’Assemblée
nationale : examiner un rapport pour avis sur un texte législatif. « On
a la possibilité de le faire à la Délégation, avec la différence par rapport
aux commissions qu’on n’a pas vocation à formuler des amendements (…) »,
explique le député Renaissance David Valence, président de la délégation. Dans
le viseur, le projet de loi pour le plein emploi, « texte que nous
sommes en train d’examiner depuis le début de la semaine, sur lequel nous nous
sommes saisis des articles 4 et 10, et avons désigné Didier Le Gac, député du Finistère,
comme notre rapporteur pour avis sur ce texte et ces dispositions ».
Le président rappelle,
pour justifier ce rapport, la participation déjà ancienne des collectivités au
service public de l'emploi. Il évoque notamment les missions locales, dans lesquelles
« les élus locaux sont très
investis, et qu'ils financent », ou encore les maisons de l'emploi,
ainsi que la responsabilité pour les maires d'élaborer des plans locaux
pluriannuels d'insertion pour l'emploi, mais aussi le rôle des régions dans la
formation professionnelle des adultes, et celui des départements dans le suivi
des bénéficiaires du RSA.
Dans un
contexte de « nette amélioration sur
le front de l'emploi » (le taux de chômage est aujourd'hui de 7,1%), le
député formule l'objectif du projet de loi : « améliorer l'accompagnement des personnes les plus fragiles en levant un
certain nombre de freins à l'emploi », parmi lesquels figurent en premier
lieu une insuffisante coordination des acteurs accompagnant les chercheurs
d'emploi, mais aussi l’épineux sujet de la garde des jeunes enfants.
De son côté,
Didier Le Gac évoque rapidement les mesures emblématiques du projet de loi pour
le plein emploi, telles que l'inscription systématique de tous les demandeurs
d'emploi à Pôle emploi, renommé France travail. Avec notamment dans le viseur
les allocataires du RSA, dont moins de la moitié est aujourd'hui suivie par Pôle
emploi, explique-t-il. Le rapporteur évoque également la mise en place d'un
« contrat d'engagement unifié », par lequel « l'intéressé(e) s'engage à suivre un parcours
personnalisé de retour progressif ou d'accès à l'emploi direct ».
Un
article 4 sur le réseau des acteurs de l'insertion et de l'emploi
L'article 4 du
projet de loi vise à la création d'un dispositif intégré, pour associer l’État,
les collectivités territoriales, et leurs opérateurs, pour faciliter un « suivi harmonisé de tout demandeur d'emploi ». Le projet de ce réseau France
travail suscite des interrogations sur le rôle des collectivités territoriales
dans sa gouvernance, indique le président. Pour le rapporteur, l'article 4
consacre la légitimité des collectivités à agir en matière d'aide à l'emploi,
dans le prolongement d'une évolution initiée avec la création des missions
locales, il y a 40 ans.
Le député souligne
que le projet du gouvernement d'apporter des éléments de cadrage aux acteurs de
l'insertion et de l'emploi a suscité quelques émois chez les élus locaux,
craignant un mouvement de recentralisation. En effet, le texte initial
comportait « des points de déséquilibres entre l’État et les collectivités »,
relève-t-il. Il était ainsi prévu que la co-présidence des comités territoriaux
de l'insertion et de l'emploi soit conditionnée à la signature d'une charte
d'engagement, disposition sur laquelle le Sénat est revenu. Ce premier texte
donnait également une prééminence aux niveaux de la région et du département
dans la direction de ces comités, au détriment des communes, ce qui a également
été modifié par le Sénat.
Une autre
critique concerne les comités locaux du réseau, dont l'abaissement du pouvoir
de décision au niveau du département risquait de limiter les capacités,
l'entité pertinente étant celle des bassins d'emploi (au nombre de 300 selon
l'INSEE), parfois à cheval sur deux départements ou deux régions. Ce qui fait
souligner au rapporteur l'importance qu'un président de région soit à la tête
d'un comité local. Aussi, les travaux menés en commission des affaires sociales
ont permis d'aboutir à un « nouvel équilibre », remarque-t-il,
notamment en rétablissant le pouvoir d'intervention du préfet de région. Par
ailleurs, la « charte d'engagement » envisagée est remplacée par une
« charte de coopération » dans le texte modifié par la Commission des
affaire sociales. Une nouvelle mouture du texte qui, pour l'élu, aboutirait à
une « gouvernance équilibrée et respectueuse des territoires ».
Concernant l'article
10, le
président de la délégation évoque l'engagement présidentiel d'organiser un
service public d'accueil du jeune enfant, et cite quelques
chiffres éloquents donnant la mesure de l'enjeu. Ainsi, parmi un peu plus de 2
millions d'enfants de moins de 3 ans en France, 56% sont gardés par leurs
parents, selon les données de la Drees. Par ailleurs, le nombre de places
d'accueil pour les jeunes enfants stagne depuis quelques années, avec
aujourd'hui un taux de couverture de 58 places pour 100 enfants de moins de 3
ans. Didier Le Gac souligne que malgré sa progression, le taux d'emploi des
mères de jeunes enfants connaît un différentiel avec celui des pères, ce qui
justifie la présence de cet article 10 dans ce projet de loi pour le plein
emploi.
Le rapporteur
évoque également les inégalités territoriales de l'offre, un déficit d'environ
10 000 assistantes maternelles, ainsi que les 120 000 départs à la retraite que
verra cette profession d'ici à 2030. Une pénurie de personnel qualifié qui
ralentit l'ouverture de nouvelles places. Aussi, explique t-il, dans le but
d'améliorer la lisibilité de la politique d'accueil du convention d'objectifs
et de gestion (COG) entre l'Etat et la Caisse nationale d'allocations
familiales définira des objectifs pluriannuels en matière d'extension des
places d'accueil et d'accès à des places pour des familles défavorisées ou avec
un enfant en situation de handicap.
Le texte adopté
par la commission des affaires sociales fait des communes les autorités
organisatrices de l'accueil du jeune enfant. Une compétence facultative pour
elles, rappelle le rapporteur, alors que « 96% des communes de plus de 3 500 habitants, et un tiers des EPCI, ont
développé un service d'accueil du jeune enfant ». A partir du seuil de
3 500 habitants, elles devront élaborer un schéma pluriannuel communal de
maintien et de développement de l'offre d'accueil du jeune enfant, et celles de
plus de 10 000 devront mettre en place un relais « petite enfance ».
Le député Le
Gac évoque les échanges avec le cabinet du ministre et les associations d'élus
(ADF, AMF, l'ADCF) qui ont permis d'aboutir à « des solutions
consensuelles », évitant par exemple ce qu'il nomme « l'écueil
de faire l'accueil du jeune enfant un droit opposable ».
Étienne Antelme
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