Conseil national des barreaux - Dix propositions adressées au président de la République


vendredi 30 juin 20175 min
Écouter l'article

Le 15 juin dernier, le président du Conseil national des barreaux (CNB) Pascal Eydoux a remis au conseiller justice du président de la République et du Premier ministre dix propositions « en matière d’accès au droit et à la justice, de simplification des procédures, d’élargissement du champ d’intervention de l’avocat et d’évolution souhaitée des modalités de l’exercice professionnel ».


1. Adopter une loi quinquennale de programmation pour la justice


Une loi de programmation de la justice fixerait, pour la durée du quinquennat (2017/2022), des engagements et des priorités. Cette loi s’inscrirait dans le cadre d’une programmation quinquennale des finances publiques. Un montant de 8 milliards d’euros des crédits du budget de la justice en 2022 serait un objectif réaliste et ambitieux.


 2. Réformer le système de l’aide juridictionnelle



Chacun s’accorde sur la nécessité de réformer le système de l’aide juridictionnelle, afin d’assurer un meilleur accès au droit et à la justice aux justiciables disposant des ressources les plus faibles. Cette réforme doit passer par :


La systématisation de la consultation rémunérée d’un avocat préalable à toute action judiciaire pour une personne bénéficiant de l’aide juridictionnelle. Cette consultation permettra de garantir le bien-fondé de l’action et la qualité nécessaire à la rédaction de l’acte de saisine ;


Un financement complémentaire pérenne de l’aide juridictionnelle par la taxation des actes juridiques de toute nature, lors de leur dépôt, de leur enregistrement ou de leur publicité. Le nombre très important de ces actes juridiques permettrait de fixer un taux de taxation ou un droit fixe de faible montant, assurant un rendement important.


Ces nouvelles recettes fiscales seraient affectées à un « fonds de financement de l’aide juridique » permettant la pérennisation de ce financement complémentaire. La gestion de ce fonds serait assurée par des représentants du CNB, des magistrats, des représentants du ministère du budget et des représentants de la Chancellerie.


3. Étendre l’assurance de protection juridique


En matière de protection juridique, le CNB constate que la loi n’est pas appliquée par les compagnies d’assurances et demande qu’elle le soit systématiquement, notamment s’agissant de l’information des assurés sur les domaines couverts par la protection juridique. Un élargissement de ces domaines est souhaitable, en matière familiale par exemple. Ces assurances de protection juridique doivent pouvoir venir se substituer ou compléter la prise en charge par l’aide juridictionnelle.


4. Créer un crédit d’impôt égal au montant de la tva sur les honoraires des avocats pour les particuliers


Afin de compenser l’impossibilité, pour les personnes physiques, de récupérer la TVA acquittée sur les honoraires d’avocats, il est proposé la création d’un crédit d’impôt égal au montant de la TVA acquittée.


Cette somme, soustraite du montant de l’impôt dû, présente l’avantage de pouvoir être remboursée en totalité ou partiellement si le montant de ce crédit d’impôt dépasse celui de l’impôt dû ou si la personne bénéficiaire du crédit d’impôt n’est pas imposable.


Le CNB suit, avec attention, les propositions faites en 2016 par la Commission européenne dans son plan d’action sur la TVA et, en particulier, l’option consistant à octroyer aux États membres une marge de manœuvre accrue quant au nombre de prestations bénéficiant d’un taux réduit de TVA et au niveau de ce taux.


5. Simplifier et unifier les modes de saisine des juridictions


Les modes de saisine et les délais de recours en première instance et en appel doivent être simplifiés et unifiés. Le CNB propose l’unification des délais impartis pour conclure, l’assouplissement des sanctions encourues en cas de défaut d’exécution des formalités procédurales. Les parties doivent reprendre l’initiative dans le déroulement de la procédure.


6. Systématiser la dématérialisation des échanges devant les juridictions


La dématérialisation systématique des procédures devant l’ensemble des juridictions doit être une priorité du ministère de la justice pour le quinquennat. La profession d’avocat est en pointe sur l’utilisation des nouvelles technologies par le biais des services e-barreau développés par le CNB.


Les moyens budgétaires doivent être consacrés par l’état à ces investissements nécessaires à l’adaptation aux évolutions textuelles procédurales et aux attentes d’un monde judiciaire moderne.

 

7. Autoriser les avocats à engager des actions de groupe sans l’intervention des associations


Au moins deux personnes victimes d’un préjudice relevant de la procédure de l’action de groupe, doivent pouvoir agir directement en justice sans l’intervention des associations, ou à la place des associations, dans l’un des cas suivants :

Il n’existe pas d’association compétente ou ayant intérêt à agir ;

L’association reste inactive et n’agit pas en justice même quinze jours après mise en demeure par les usagers susvisés ;

L’association est dans l’impossibilité d’agir ou de continuer son action en justice ;

L’association est dans une situation de conflit d’intérêts ou de risque d’un tel conflit.


 

8. Favoriser le champ d’intervention de l’avocat dans les différents dispositifs de justice négociée

Les parties doivent pouvoir rechercher, assistées par un professionnel du droit, un accord négocié dans un cadre sécurisé à tout moment de la discussion, y compris après introduction de l’instance.


La convention de procédure participative doit être développée devant les juridictions administratives.


9. Conférer la force exécutoire à l’acte d’avocat


La conservation des actes sous seing privé contresignés par avocat doit pouvoir être faite sous format numérique. Cette copie numérique doit avoir la même force probante que l’acte original.


La formalité de l’enregistrement électronique de l’acte sous seing privé contresigné par avocat lui confère date certaine. Le CNB demande que cette date certaine soit également conférée à l’acte natif.


Afin de renforcer l’efficacité de ce nouveau type d’acte et d’en développer l’utilisation dans de nombreux domaines, la profession d’avocat demande que soit conférée à cet acte la force exécutoire.


On rappellera qu’à compter du 1er avril 2018, l’article L. 582-2 du Code de la sécurité sociale ouvre au directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales, la CAF, la possibilité de donner force exécutoire à l’accord par lequel les parents, mettant fin à leur vie en concubinage ou ayant dissous leur PACS, fixent le montant de la contribution à l’entretien et à l’éducation en faveur de l’enfant mise à la charge du débiteur. Or, un directeur de CAF n’est ni un officier public, ni un officier ministériel.


10. Renforcer la protection du secret professionnel de l’avocat


Le CNB sollicite depuis plusieurs années un renforcement de la protection du secret professionnel de l’avocat, au bénéfice des clients de ce dernier, par :


L’application systématique des dispositions de l’article 56-1 du Code de procédure pénale pour toutes les visites domiciliaires et les saisies visant les locaux professionnels ou le domicile de l’avocat, que celles-ci aient été ordonnées par l’administration fiscale, les organismes relevant de la sécurité sociale, le Défenseur des droits ou les différentes autorités administratives visées au Code de commerce et au Code monétaire et financier ;


L’application systématique des dispositions de l’article 60-1 du Code de procédure pénale pour tous les cas de l’exercice du droit de communication visant un avocat quelle que soit la nature du détenteur de ce droit.


Retrouvez plus d’articles dans le Journal Spécial des Sociétés N° 51 du 28 juin 2017

S’abonner au journal

Partager l'article


0 Commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Abonnez-vous à la Newsletter !

Recevez gratuitement un concentré d’actualité chaque semaine.