La cour d’appel de Paris, victime de l’engorgement de la chaîne pénale


mercredi 15 janvier3 min
Écouter l'article

Du fait d’un manque d’effectifs et d’un accroissement des affaires nouvelles augmentant les stocks, la cour se retrouve, selon le Premier président, dans une situation « préoccupante ». Les cours criminelles départementales ne seraient d’ailleurs pas étrangères à l’embolie en matière criminelle.

Quelques jours après l’audience de présentation des nouveaux magistrats et directeurs de greffes de la cour d’appel de Paris, celle-ci a organisé, dans sa première chambre civile, sa traditionnelle audience solennelle de rentrée, le 13 janvier dernier.

Parmi les invités, la Défenseure des Droits Claire Hédon, la présidente du Conseil national des barreaux Julie Couturier, ainsi que le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, que le Premier président de la cour d’appel Jacques Boulard n’a pas manqué d’interpeler sur les moyens financiers qui seront alloués à la cour.

En effet, le démontage de la salle des grands procès, construite pour le jugement des attentats du 13 novembre 2015, « obèrera inévitablement les capacités de jugement de la cour d’assises de Paris », a souligné Jacques Boulard. Cette salle a notamment accueilli le procès de l’assassinat de Samuel Paty qui faisait partie des 17 dossiers terroristes jugés par la cour d’assises spéciale de Paris en 2024.

La procureure générale peu favorable au PNACO

De criminalité organisée, thème brûlant en ce moment - et d’autant plus depuis les annonces des ministres de la Justice et de l’Intérieur, respectivement le 2 janvier à Marseille et 10 janvier dernier à Nantes -, il a notamment été question. La procureure générale près la cour d’appel, Marie-Suzanne Le Quéau, a ainsi abordé un sujet « loin de faire l’unanimité dans le corps judiciaire » : la création d’un parquet national de lutte contre la criminalité organisée, ou PNACO.

Si Gérald Darmanin et Bruno Retailleau s’y sont montrés favorables, dans les traces de l’ancien garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, lequel avait formulé cette volonté en avril dernier, proposition qui n’avait alors pas paru rebuter le président de l'Union syndicale des magistrats Ludovic Friat, à l’inverse, la procureure générale s’est dite peu convaincue. En particulier car l’architecture judiciaire dispose déjà de la juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée, JUNALCO, « de création récente », a-t-elle précisé.

La procureure générale n’écarte pas pour autant l’idée d’une coordination renforcée avec la mise en place de deux cellules, « l’une opérationnelle rattachée au parquet de Paris, et l’autre stratégique sous le pilotage de la direction des affaires criminelles et de grâces. » Néanmoins, pour que le dispositif fonctionne, a justifié Marie-Suzanne Le Quéau, une interaction renforcée de ses acteurs devra être de rigueur, et les délais de jugement, pour gagner la guerre contre le narcotrafic, devront impérativement être réduits.

Le Premier président a par ailleurs souligné la « souplesse » de la cour qui a su s’adapter pour « renforc[er] l’efficacité des dispositifs de saisies et confiscations » en se dotant d’une chambre spécialisée en la matière (chambre 1-13), a-t-il assuré.

Des variations d’effectifs qui fragilisent les parquets

Vieux serpent de mer, le manque d’effectifs a de nouveau été mis sur le tapis lors de l’audience de rentrée. Sujet de satisfaction l’an passé, il est devenu « pour le ministère public de cette cour une source d’inquiétude » a argué la procureure générale.

Si en prévision des Jeux de Paris 2024, les magistrats du parquet ont vu leurs effectifs renforcés de janvier 2023 à août 2024, « force est de constater que, depuis les derniers mouvements [qui a consisté à donner puis reprendre les effectifs], le taux de vacances est supérieur à la moyenne nationale ». Une opération qui a conduit à une « gestion périlleuse du parquet général et des parquets du ressort », et remet en cause « la performance du ministère public de cette cour pour les huit prochains mois » a alerté la procureure générale.

Partager l'article


0 Commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Abonnez-vous à la Newsletter !

Recevez gratuitement un concentré d’actualité chaque semaine.