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La
professeure américaine s’est vu décerner la prestigieuse récompense pour son travail
les différences entre les sexes en matière de revenus et de taux d'emploi au
fil du temps, et sur les principales sources de l’écart qui subsiste aujourd’hui.
Après Elinor Ostrom en 2009
et Esther Duflo en 2019, Claudia Goldin devient la troisième femme à recevoir
le prix de la Banque de Suède, qui lui a été décerné le 9 octobre à Stockholm. Le
jury estime que le travail d’enquête de cette économiste émérite « a
fait progresser [la] compréhension de la situation des femmes sur le marché du
travail », comme on peut le lire sur le communiqué de presse de L'Académie royale des sciences de Suède.
Cette Américaine de 77 ans,
professeure à l’Université d’Harvard, œuvre depuis de nombreuses années pour comprendre
l’origine des inégalités qui perdurent entre hommes et femmes sur le marché du
travail. Spécialiste de l’histoire économique et première femme nommée à la
tête du département économique de Harvard, Claudia Goldin a minutieusement
recueilli plus de 200 années de données américaines permettant de démontrer
comment et pourquoi les différences entre les sexes en matière de revenus et de
taux d'emploi ont changé au fil du temps.
Précisons que depuis 1901,
cinq lauréats sont récompensés chaque année au titre de la chimie, de la
physique, de la médecine, de la littérature et de la paix. C’est parce que les
économistes n’entrent pas dans le champ de cette distinction prestigieuse qu’en
1968, la Banque de Suède avait décidé de commémorer le 300ème
anniversaire de la mort d’Alfred Nobel en créant le « prix de la Banque
de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel », plus
communément appelé « prix Nobel d’économie ».
Une durée de travail plus
courte, principale cause des disparités de salaires
Claudia Goldin a montré que
la participation des femmes au marché du travail n’a pas suivi une tendance à
la hausse mais a plutôt formé une « courbe en forme de U »,
explique l'Académie royale des sciences de Suède, puisque la participation des
femmes mariées a diminué avec la transition d’une société agraire à une société
industrielle au début du XIXe siècle, mais a ensuite commencé à augmenter avec
la croissance du secteur des services au début du XXe siècle, où les niveaux
d'éducation des femmes n'ont cessé d'augmenter. « Claudia Goldin a
démontré que l’accès à la pilule contraceptive a joué un rôle important dans
l’accélération de ce changement en offrant de nouvelles opportunités de
planification de carrière ».
L’économiste américaine a
également mis en exergue qu’en dépit de la croissance économique et de la
proportion croissante de femmes employées au XXe siècle, pendant longtemps,
l'écart de revenus entre les femmes et les hommes n'a pratiquement pas été
comblé. Selon elle, cela s’explique en partie « par le fait que les
décisions en matière d’éducation, qui ont un impact sur toute une vie de
possibilités de carrière, sont prises à un âge relativement jeune », relate
l'Académie royale des sciences de Suède.
Si historiquement, une grande
partie de l’écart de rémunération entre hommes et femmes pourrait s’expliquer
par des différences en matière d’éducation et de choix professionnels, Claudia Goldin
a en outre montré que l'essentiel de cette différence de revenus « se
situe désormais entre les hommes et les femmes exerçant la même profession et
qu'elle apparaît en grande partie avec la naissance du premier enfant ».
En France, à poste et profil
équivalent, les hommes perçoivent un salaire supérieur de 7 %
Dans les années 70, au cœur du
mouvement de libération des femmes, le blocage de leur progression dans le
monde du travail est baptisé le « plafond de verre », ou « glass
ceiling ». Une expression encore loin d’être désuète, notamment en France,
puisque le média Pour l’Éco souligne que, dix ans après la loi Copé-Zimmermann
votée le 27 janvier 2011, seulement deux femmes sont présidentes au conseil
d’entreprises du CAC 40, et une seule directrice générale en 2021.
Toujours en France, d’après l’enquête
« Baromètre 2020 de la rémunération des cadres » de l’Apec (Association
pour l’emploi des cadres), réalisée auprès de 16 000 salariés cadres du secteur
privé, et une autre réalisée auprès de 1 000 salariés, les écarts de salaires
entre hommes et femmes restent significatifs. A postes et profils équivalents, les
hommes perçoivent ainsi un salaire supérieur de 7 %. Il en résulte également
que l’accès aux postes de management et de direction sont plus difficiles
d’accès pour les femmes cadres que pour les hommes.
Les chiffres de l’Insee révèlent quant à eux
qu’en 2021, le salaire moyen d’une femme, avec une présence moindre en
entreprise, est inférieur de 24 % à celui d’un homme dans le secteur privé. Ce
chiffre est ramené à 15 % pour une durée de travail identique.
Laure
Declercq
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