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La magistrate Charlotte Caubel, future procureure de Créteil ?


mardi 8 avril5 min
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08/04/2025 18:02:13 1 5 6270 23 0 La candidate favorite au poste de procureure avait été vice-procureure près le TGI de Paris* 2875 5564 5761 « Avec la justice restaurative, j’ai l’impression qu’on prend le temps d’aller au fond des choses »

Le festival du film judiciaire des CDAD dans les Yvelines a soufflé sa deuxième bougie autour du thème de la justice restaurative. L’occasion de parler réinsertion, droits de la défense et posture de l’avocat, mais aussi justice restaurative à l’école, alors que le département s’apprête à signer une convention avec l’Éducation nationale pour mettre en place ce dispositif dans les établissements scolaires.

Générique de fin et applaudissements fournis se font entendre dans la salle du cinéma-théâtre de La Celle-Saint-Cloud. Les quelque 140 élèves du lycée Jean-Vilar de Plaisir (78) semblent avoir apprécié le film de Jeanne Herry Je verrai toujours vos visages (2023), diffusé dans le cadre du festival du film judiciaire des Yvelines, revenu du 31 mars au 3 avril pour sa deuxième édition.

À travers cette fiction d’1h58 très documentée, les jeunes spectateurs ont découvert – comme le grand public avant eux – la justice restaurative (JR) : la rencontre préparée, encadrée et sécurisée entre des victimes et des auteurs d’infractions condamnés, qui cherchent à se reconstruire ou à (se) réparer.

Dans la salle, à l’issue de la séance, une avocate du barreau de Versailles et deux chargés de mission JR auprès de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) des Yvelines vont à la rencontre des élèves pour la suite du programme : une série de questions-réponses sur le film, sa thématique et le monde judiciaire en général.

« Je ne connaissais pas du tout la justice restaurative »

« Peut-on avoir une remise de peine quand on participe à la justice restaurative ? » demande par exemple un lycéen. « Non, la JR se pratique sur la base du volontariat, en parallèle de la procédure et sans lien avec elle. Nous ne traitons pas avec le juge », rappelle Ahmed El Borj. Le chargé de mission en profite pour souligner les principes de « gratuité » et de « confidentialité stricte » de cette pratique parajudiciaire, consacrée depuis 2014 dans la loi française.

« Elle peut être mise en place dès le dépôt de plainte, avant ou après le procès, parfois même pendant, même si c’est plus rare », intervient Violaine Faucon-Tillier, avocate au procès des attentats du 13 novembre, où certaines formes de justice restaurative ont été mises en œuvre. « Le dialogue instauré peut-il permettre la réinsertion ? » interroge encore une élève. « Nous n’avons, à ce stade, pas de chiffres précis », reconnaît Zoé Stearns, également chargée de mission JR. 

« Mais cette pratique cherche à revaloriser les victimes et les auteurs, avec une responsabilisation importante de ces derniers. Ça aide à la réinsertion, oui. Certains détenus s’engagent dans des formations après leur parcours », témoigne-t-elle.

« Au fil des entretiens, les gens changent, c’est visible ! » ajoute Ahmed El Borj. « Mais la rencontre n’est pas une fin en soi. La préparation en amont joue un rôle prépondérant dans le travail sur soi. » Il en profite pour rappeler que la JR peut être refusée si les personnes concernées « ne sont pas prêtes », « n’ont pas les bons objectifs » ou « sont mal intentionnées ».

« Je ne connaissais pas du tout ce dispositif. J’ai trouvé le film captivant et très éclairant sur ce qu’est la justice restaurative », témoigne Manël, 16 ans, à l’issue du film. Quant à Maëlle, elle estime que le film lui a donné une autre vision de la justice : « J’avais des a priori sur le monde judiciaire. Une justice… bâclée… qui ne va pas au fond des dossiers. Avec la justice restaurative, j’ai l’impression qu’on prend le temps d’aller au bout des choses et qu’il y a plus de suivi. »

« Comment défendre l’indéfendable ? » Le rôle de l’avocat en question

La justice en général, il en est aussi question ce jour-là. Les lycéens se saisissent de l’opportunité pour s’interroger principalement sur les droits de la défense et sur la posture de l’avocat. « Savez-vous que votre client est coupable au moment où vous le défendez, et si oui, qu’est-ce qui vous pousse à le défendre ? », « Comment défendre l’indéfendable ? » demandent, à quelques minutes d’intervalle, deux lycéens.


Après la diffusion, les intervenants Violaine Faucon-Tillier, Ahmed El Borj et Zoé Stearns répondent aux lycéens yvelinois.

« Quand je défends un client, je porte la parole et la situation d’un homme. Je distingue l’acte de la personne. Un avocat peut d’ailleurs amener son client à reconnaître l’acte pour lequel il est poursuivi. Dans l’exemple du procès V13, les actes sont terribles et indéfendables. Mais derrière chaque procès, il y a une personne, avec sa construction, son histoire. Mon travail consiste à faire comprendre qui est cette personne et ce qui l’a amenée là. Le rôle de l’avocat est de faire ressortir cette humanité », raconte Violaine Faucon-Tillier.

Les lycéens s’interrogent aussi sur les relations avocats-clients, leur lien de proximité avéré ou relatif. « Il faut savoir mettre une distance », soutient l’avocate, qui intervient en droit de la famille et en droit pénal auprès des enfants. « Je tutoie facilement un jeune pour me mettre à son niveau, ne pas le regarder de haut. Mais il m’arrive de rappeler qui je suis et quelle est la situation, si la qualité du dialogue se dégrade », livre l’avocate, qui se place entre figure de confiance et figure d’autorité.

La justice restaurative bientôt élargie à l’Education nationale

Malgré l’actualité brûlante de sa remise en cause et l’adoption, le 26 mars dernier, d’une réforme dure par le Sénat, la justice des mineurs n’est pas abordée. De réponse pénale contre le harcèlement scolaire et de justice restaurative à l’école non plus, bien que ce fléau toucherait près de 700 000 élèves en France. Faute de temps, bien sûr, et de moyens : les lycéens n’ont pas tous eu l’occasion de préparer la séance avec leurs professeurs, le calendrier scolaire étant déjà bien chargé.

« La justice restaurative est un droit ; dans les faits, tout le monde devrait pouvoir en bénéficier. Mais dans la réalité, c’est plus compliqué. Même si elle existe depuis dix ans, cette pratique bouscule beaucoup de croyances et de convictions chez les magistrats, les avocats ou encore les associations », témoigne Ahmed El Borj à la fin du débat.

Cependant, les lignes bougent. Le pôle justice restaurative de la PJJ 78 est en passe de signer, fin avril, une convention avec l’Éducation nationale pour un dispositif de justice restaurative généralisée aux écoles. Auparavant, ce pôle, créé en 2021 et financé par la justice de proximité, ne prenait en charge que des mineurs suivis par la PJJ. Avec cette convention, les élèves du département qui le souhaitent pourraient faire appel au pôle de justice restaurative, dès le dépôt de plainte.

Delphine Schiltz

 

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