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Mi-mai, la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) du Val-de-Marne a enjoint la SAS Primark France de se mettre en conformité avec la réglementation. Implantée dans le 94, l’enseigne y dispose de deux boutiques : l’une se trouve à Thiais, tandis que la seconde est située à Créteil.
Après avoir réalisé une enquête, la DDPP du Val-de-Marne « a mis en évidence que la SAS Primark France mettait en vente des vêtements et des chaussures, sans mettre à disposition des consommateurs les informations obligatoires relatives aux qualités et caractéristiques environnementales des produits ».
Pour rappel, les DDPP comptent 96 directions départementales qui représentent, sur le territoire français, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Elles assurent des missions de surveillance sanitaire, de protection animale, mais également de sécurité sanitaire des aliments, de concurrence, de consommation, de répression des fraudes ainsi que de prévention des risques environnementaux.
Relevant les manquements de Primark à l’égard de ses clients, la DDPP en a conclu que l’enseigne les a privés d’une information précise et complète sur les caractéristiques environnementales des articles. Le non-respect de la législation en vigueur a, par ailleurs, provoqué un manque d’information des consommateurs sur la traçabilité des différentes étapes de fabrication des articles mis en vente par l’enseigne irlandaise, toujours d’après la DDPP. En effet, selon l’article L. 541-9-1 du Code de l’environnement, et en cohérence avec le droit de l’Union européenne, tout producteur ou metteur sur le marché doit tenir informé le consommateur sur les caractéristiques environnementales des produits vendus. Ces caractéristiques se déclinent sous différentes formes : la recyclabilité, la teneur en matières recyclées, la présence de substances dangereuses, la traçabilité du tissage, de la teinture, de l’impression, de la confection, du piquage, du montage et des finitions (en ce qui concerne la vente de chaussures).
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L’article, qui s’inscrit dans la loi n°2020-105 du 10 février 2020, spécifie que les informations prévues qui doivent être partagées aux clients doivent également « être visibles ou accessibles au moment de l'acte d'achat ». En cas de non-respect de la loi en vigueur, un producteur ou un metteur sur le marché risque une amende administrative pouvant atteindre 15 000 euros. Ce manquement peut de plus tomber sous le coup de la pratique commerciale trompeuse, conformément au Code de la consommation. Dans ce cas précis, ce dernier prévoit une amende pouvant atteindre jusqu’à 10% du chiffre d’affaires moyen annuel sur les trois dernières années de la société concernée ou 80% des dépenses engagées pour la pratique fautive.
Contactée par la rédaction, la direction de Primark France a expliqué avoir « réalisé des progrès significatifs en matière de conformité avec la loi AGEC [ndlr : la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire], en veillant à ce que les caractéristiques environnementales de ses produits soient accessibles en ligne depuis le 18 mai dernier ». « Primark reste en contact avec la DGCCRF et continuera à œuvrer pour que les consommateurs disposent de toutes les informations nécessaires à des choix d’achat éclairés », a-t-elle notamment poursuivi. Si les clients de l’enseigne souhaitent accéder aux informations environnementales des produits, celles-ci sont disponibles « via les supports en magasin, les étiquettes produits et les contenus disponibles sur le site Primark Cares », a finalement précisé la direction de Primark France.
L’injonction à Primark de se mettre en conformité est hautement symbolique. Celle-ci entre dans un débat plus large sur la place accordable à l’industrie du textile au regard de son impact sur l’environnement. Primark, multinationale spécialisée dans la vente de vêtements neufs à petits prix, fait partie des enseignes au modèle économique contesté. Celles-ci sont accusées d’alimenter la fast-fashion (lorsque les marques produisent vite et à moindre coût des vêtements « jetables »). En effet, chaque année, plus de 100 milliards de vêtements neufs sont vendus dans le monde, selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). En France, le nombre de vêtements proposés à la vente a augmenté chaque année, pour atteindre désormais 3,3 milliards de produits neufs proposés à la vente, selon Refashion, un éco-organisme de la Filière Textile d'habillement, Linge de maison et Chaussure.
Et ces impressionnants volumes de vêtements neufs vendus ou mis en vente chaque année ont un réel impact sur l’environnement. De fait, l’industrie du textile est responsable d'environ 20% de la pollution mondiale d’eau potable, selon une enquête du Parlement européen publiée en 2020. En cause : l’usage des teintures et des innombrables produits de finition ainsi que la libération de fibres microplastiques. Selon la même enquête, cette industrie provoquerait également une surconsommation des ressources naturelles, et plus spécifiquement de l’eau. La fabrication d’un t-shirt en coton nécessiterait ainsi l’utilisation de 2 700 litres d’eau douce, c’est-à-dire l’équivalent de ce que boit une personne en deux ans et demi.
S’agissant des émissions de gaz à effet de serre, l’industrie du textile possède aussi sa part de responsabilité. Selon l’Agence européenne pour l’environnement, les achats de textiles au sein de l’Union européenne ont généré des émissions de CO2 équivalentes à 270 kg par personne, en 2020. Au total, ce sont 121 millions de tonnes de gaz à effet de serre qui ont été générés cette année-là, uniquement pour la consommation de textile, dans l’Union européenne. Enfin, 1% des vêtements usagés est recyclé dans le monde, « car les technologies qui permettraient de recycler les vêtements en fibres vierges commencent seulement à émerger », développe l’enquête du Parlement européen. Pour tenter de limiter l’impact de l’industrie du textile sur l’environnement, l’Assemblée nationale adoptait à l’unanimité une proposition de loi, le 14 mars dernier. Le texte sera examiné par le Sénat dès le 2 juin prochain.
Inès Guiza
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