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Après
une visite tendue ce samedi 24 février lors de l'inauguration du Salon de l’Agriculture,
aujourd’hui, au Parc des Expositions, le souvenir du passage du Président de la
République est âpre pour certains, inexistant pour d’autres.
«
On espérait de grandes annonces, une vision claire pour l'avenir, mais ça
n'a pas été le cas ». Au lendemain de
l’inauguration mouvementée du Salon de l’Agriculture par le président de la
République, la visite de ce dernier a un goût d’amertume.
Le
chef de l’Etat avait pourtant un objectif clair : en prenant ce risque, il
espérait apaiser les tensions et calmer la grogne des agriculteurs. Toutefois,
lors de notre passage au Salon, peu de langues se délient, et les rares
agriculteurs enclins à répondre à nos sollicitations font part de leur « déception »,
à l’instar de Romain Loiseau, agriculteur et président du syndicat Jeunes
Agriculteurs de l'Eure (JA 27), en Normandie.
« Le Président n’a rien compris »
L’homme
le martèle : il se demande si le gouvernement n'a pas souhaité « attiser
la colère ». « Initialement, il n'y avait pas une telle animosité
envers le gouvernement ». Le président de JA 27 affirme que la
situation a « dégénéré » le 22 février, lorsqu’avait été
dévoilée la liste des invités au grand débat souhaité par Emmanuel Macron et
rassemblant « l’ensemble des acteurs du monde agricole » ;
liste qui incluait le mouvement écologiste des Soulèvements de la terre. Cette annonce
avait conduit le syndicat agricole FNSEA à se retirer quasi-immédiatement des
discussions, dénonçant une « provocation inacceptable » de la
part de leur ennemi juré, avant que l’Elysée ne rétropédale et ne « désinvite »
le collectif.
Si ce dernier a assuré qu’il s’agissait d'une erreur faite lors de l'entretien avec la presse, de son côté, Romain Loiseau persiste et signe : « Cela nous a fait réaliser [que le Président] n'avait tout simplement rien compris. L’inauguration aurait pu apaiser les tensions. Mais au lieu de cela, l’attente que nous a infligée Emmanuel Macron, sa façon de se cacher puis finalement de se montrer devant les caméras de BFM ont exacerbé la colère. » Le chef de l’Etat avait fait face samedi à un comité d’accueil relativement hostile, un cortège de manifestants ayant forcé l’entrée principale du Parc des expositions pour pénétrer dans le Hall 1 où il était attendu. Emmanuel Macron s’était finalement réfugié à l’étage du Salon en compagnie de quelques représentants syndicaux, avant de se lancer dans un dialogue musclé de deux heures avec seule une poignée d’agriculteurs. Au total, l’inauguration avait été reportée de plusieurs heures en raison des heurts.
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l'Ordre des experts-comptables fait 13 propositions au gouvernement pour aider
les agriculteurs
L’agriculteur témoigne que la colère est palpable dans les campagnes, le « mouvement vient du bas », dit-il. « Ce n’est que lorsqu’il y aura de la satisfaction auprès des agriculteurs sur le terrain que ça se calmera ». Toutefois, il confie garder « l'espoir d'un changement ». « Le Premier ministre a fait certaines déclarations qui montrent une compréhension de notre situation », affirme-t-il, en écho aux mesures présentées par Gabriel Attal au monde agricole le 21 février, au titre desquelles le renforcement de la loi Egalim, la protection des agriculteurs face à la concurrence déloyale ou encore l’abandon de l’indicateur national d’utilisation des phytosanitaires NODU « C'est une première victoire, mais il est regrettable de devoir recourir à des blocages pour être entendus. Nous progressons doucement, bien que nous n'ayons toujours pas de direction claire pour l'avenir ».
« On n’a rien vu, rien entendu »
« On
n’a pas été mis au courant de sa venue ». De leur côté, plusieurs agriculteurs
et commerçants présents au Salon pendant l’inauguration affirment ne pas avoir
vu le président, ni même avoir été avertis de son passage.
« On a ouvert à 9h, il n’y avait personne,
à 10h non plus. Ensuite, on a entendu dire que les portes étaient fermées et
qu'elles ne rouvriraient pas avant 11h30-12h, mais nous n'avons rien vu, rien
entendu, à part ce que les clients nous ont dit. Ce que nous savons
vient surtout des médias, car le Président n'est pas venu dans ce hall »,
témoigne Victor Bernard, responsable de projet commercial d’Alsace
Traditions. « J’ai été très prise par le Salon et je n’ai vraiment pas eu le
temps de me tenir informée des propos tenus par le Président », admet pour
sa part une employée de la charcuterie Pierrat (Vosges).
Samedi
dernier, malgré 13 heures de présence sur place, au terme d’une journée d’inauguration
aux airs apocalyptiques, Emmanuel Macron aura ainsi surtout marqué ceux ayant
pu s’entretenir avec lui. À quelques exceptions près. Sur le stand de l’abattoir
Alazard & Roux (PACA), Charles Navarro perçoit positivement la visite du président : « Il
a eu le courage de venir, maintenant il faut lui laisser du temps car on ne
peut pas tout changer du jour au lendemain, même s’il est impératif
de fournir des aides financières, particulièrement en ce qui concerne le
commerce européen. On a en tout cas espoir que la situation s'améliore ».
Romain Tardino
Bérengère Margaritelli
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