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Eloquence en prison : « C’est assez impressionnant de voir les progrès immenses qui sont faits »


jeudi 24 juillet4 min
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24/07/2025 10:09:00 1 8 6647 66 0 10969 5876 6074 Droits de douane américains : un « risque mortel » pour l’industrie française, alerte le ministre Marc Ferracci

Face à la menace brandie par Donald Trump d’instaurer des droits de douane à hauteur de 30 % sur les produits européens, le ministre de l'Industrie a réuni, mardi 22 juillet à Bercy, un Conseil national de l’industrie qualifié d’« exceptionnel ». À l’issue de cette réunion, Marc Ferracci a évoqué la possibilité d’une « riposte ».

« Certaines filières nous ont fait part d’un risque mortel si l’aventure des droits de douane à 30 % devait être appliquée. Face à tout cela, la position de l’Europe doit être une position de négociation, mais également une position de fermeté. » Lucide sur l’épée de Damoclès que représente la taxation envisagée par le président des États-Unis, mais déterminé à défendre les intérêts français, Marc Ferracci s’est exprimé ce mardi 22 juillet à Bercy. Le ministre chargé de l’Industrie et de l’Économie venait alors de réunir les acteurs industriels à l’occasion d’un Conseil national de l’industrie (CNI) qualifié d’« exceptionnel ».

Ce jour-là, l’ancien député n’a pas caché sa frustration : « Ce qui s’est passé depuis trois mois, ce sont des négociations qui n’ont pas abouti au résultat escompté, c’est-à-dire un changement de position de l’administration américaine, qui a même durci sa position. Aujourd’hui, les Etats-Unis témoignent de la volonté d’obtenir un accord asymétrique. »

Les conséquences d’une telle mesure seraient, selon lui, « extrêmement lourdes pour nos territoires, pour l’emploi industriel, pour notre économie dans son ensemble et pour notre nation. » Le ministre a rappelé les précédents, citant l’exemple de 2019 : « Lorsqu’on a augmenté de 25 % les droits de douane sur le vin, les exportations ont chuté de 50 %. Donc, on voit bien que des droits de douane d’un niveau comme celui annoncé par l’administration américaine, c’est-à-dire de 30 %, auraient des conséquences absolument dramatiques sur l’ensemble des chaînes de valeur. »

Toutefois, s’il espère toujours un accord « équilibré » et une évolution de la posture de négociation, Marc Ferracci ne se fait pas d’illusions : « Nous devons désormais changer de méthode. C’est ça le message principal qui a été passé lors de ce CNI. »

« 90 milliards d'euros de produits américains » au cœur de la riposte européenne

Bien conscient qu’un échec des négociations restait une hypothèse plausible, Marc Ferracci a averti qu’« un certain nombre de ripostes » pourraient être mises en œuvre si aucun accord n’était trouvé d’ici le 1er août. À ce stade, un premier plan de contre-mesures a déjà été validé, ciblant plus de 90 milliards d’euros de produits américains susceptibles d’être taxés par la Commission européenne.

Ce dispositif inclurait notamment des hausses de droits de douane sur 21 milliards d’euros de marchandises, parmi lesquelles figurent le soja ou encore la volaille. Un second plan, plus large encore, a été préparé en parallèle. Celui-ci porterait sur 72 milliards d’euros de biens supplémentaires, avec un accent mis sur le secteur aéronautique, en particulier les avions de Boeing.

Marc Ferracci a aussi évoqué la possibilité d’activer l’« instrument anti-coercition » instauré en 2023, permettant par exemple de restreindre la publicité en ligne sur certaines plateformes numériques ou de durcir les contrôles à l’export. Des leviers, selon lui, indispensables pour « se mettre dans une posture de négociation qui soit plus ferme, et qui soit plus crédible ».

Le ministre a insisté : « Nous avons besoin, au fond, de retrouver du sérieux dans la relation commerciale transatlantique. » Dernier message porté à l’issue de ce Conseil national de l’industrie, celui de l’unité. « L’industrie française est unie », a affirmé l’ancien conseiller de Jean Castex, appelant à préserver un « esprit collectif ».

Une surenchère des États-Unis ?

Enfin, si les mesures de rétorsion devaient entraîner une riposte américaine, et une possible surenchère tarifaire - à l’image de ce qui s’est produit par le passé avec le Canada ou la Chine - Marc Ferracci a estimé qu’il ne fallait pas reculer, tout en reconnaissant l’existence d’un risque. « Nous souhaitons depuis le début éviter une escalade, mais la lucidité oblige à constater que, d'abord, des tarifs s’appliquent en ce moment de la part des États-Unis. »

Des droits de douane de 10 % frappent actuellement environ 70 % des produits, avec des hausses pouvant aller jusqu’à 50 % sur certaines productions, comme l’acier. Des chiffres que le ministre a jugés sans appel : « C’est déjà une perte pour l’économie européenne, c’est déjà une perte pour nos entreprises. C’est déjà un risque de voir diminuer leur part de marché. Et c’est potentiellement un risque pour l’emploi dans nos territoires en ce moment même. Cette situation n’est pas acceptable, et je ne parle même pas de celle qui se concrétiserait si l’administration américaine devait porter à 30 % les droits de douane. »

Et de conclure : « Il faut poser les risques. Nous posons tout sur la table pour être dans une posture d’échange, de dialogue. Mais à un moment ou un autre, il faut aussi envisager des options concrètes pour permettre à la négociation d’aboutir. Et de ce point de vue, des mouvements sont nécessaires. »

Romain Tardino

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