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Le mandat de Stéphane Campana, bâtonnier du barreau de Seine-Saint-Denis depuis le 1er janvier 2015, prendra fin au 31 décembre 2016. Avant de laisser le « bâton » à Valérie Grimaud, il livre au Journal Spécial des Sociétés son attachement pour ce département dynamique, et revient sur ces deux années particulièrement rythmées où « le poids des responsabilités demande un engagement presque total ».
Comment décririez-vous le barreau de Seine-Saint-Denis ?
Les avocats du barreau de la Seine-Saint-Denis sont à l‘image de la population du département à la fois jeunes et d’origine très diverses.
Ils ont un réel désir de réussite professionnelle et de réussite sociale mais sans oublier l’aide aux démunis qui est un marqueur particulièrement fort du barreau de la Seine-Saint-Denis, car il est impossible dans le contexte sociologique de s’en exonérer ; l’aide juridictionnelle est un poids et un devoir plus qu’ailleurs.
En contrepartie, le dynamisme économique très fort offre de grandes opportunités qui n’ont pas échappé à certains jeunes avocats venus s’installer ici après une étude d’opportunités et un business plan ; un?avenir est en construction ici.
C’est cette dualité permanente et le sentiment d’une responsabilité particulière pour les avocats qui exercent leur profession dans ce territoire unique qui rend ce barreau attachant.
Pourquoi avoir choisi d’inviter Gisèle Halimi pour cette rentrée ?
Maître Gisèle Halimi est une grande avocate à la carrière et aux engagements exceptionnels, qui s’est battue pour les droits des femmes auprès de figures emblématiqes du féminisme comme Simone de Beauvoir.
Dans le monde entier, les droits des femmes demeurent une préoccupation majeure.
à l’heure où en France même des acquis de 40?ans semblent pouvoir être remis en question comme la Loi sur le droit à l’interruption de grossesse avec sa prise en charge par la sécurité sociale, au moment où des groupes de pression ou des milieux familiaux ou sociologiques cherchent par des pressions psychologiques à entraver ce droit, il m’a semblé pertinent de rappeler le combat du « procès de Marie-Claire », qui s’est passé justement à Bobigny et qui en définitive a abouti à la Loi Simone Veil.
Êtes-vous satisfait des actions qui ont été menées dans votre barreau concernant les violences faites aux femmes? Que reste-t-il encore à réaliser ?
à cet égard le barreau a mis en place un dispositif efficace avec la juridiction qui doit être amélioré mais qui reste un exemple ; j’en veux pour preuve que nous faisons école ailleurs et que notre expertise nous est demandée pour mettre en place ce dispositif dans d’autres barreaux : nous sommes assez fiers de cela.
Quelles conclusions tirez-vous de l’exercice concret de la fonction de bâtonnier après ces deux ans ? Quelles difficultés avez-vous rencontrées ? Vous attendiez-vous à cela ?
C’est une très grande aventure professionnelle et humaine où l’on apprend autant sur soi que sur les autres. Je ne me rendais pas compte à quel point ce serait passionnant. Dans un grand barreau comme le mien, rattaché au premier tribunal de grande instance de France après Paris, le poids des responsabilités demande un engagement presque total au détriment de sa vie personnelle et de son cabinet. C’est épuisant, mais je sors heureux et meilleur de cette expérience et de ce mandat.
Quelle est votre plus grande source de satisfaction dans tout ce que vous avez entrepris pendant ces deux ans ? Avez-vous des déceptions ?
J’ai été satisfait de pouvoir tenir mes engagements en restant proche et disponible pour mes confrères qui ont toujours pu à tout moment me trouver, car devant tant de travail, le réflexe naturel pourrait être de se protéger.
La campagne de mobilisation médiatisée que j’ai menée pour le sauvetage et le redimensionnement de ma juridiction a abouti à une victoire inespérée. C’est une grande satisfaction d’avoir obtenu ainsi l’amélioration immédiatement perceptible du fonctionnement de la justice du département pour les justiciables et mes confrères.
Quel événement vous a particulièrement marqué ? Pourquoi ?
La mobilisation et la grève pour l’amélioration de I’aide juridictionnelle a été un moment fort de mon bâtonnat, au même titre que la campagne que je vous ai déjà citée.
L’augmentation de l’UV pour l’aide juridictionnelle prévue pour 2017?est-elle suffisante selon vous ?
Vous savez bien la réponse... c’est mieux que rien mais c’est juste perdre un peu moins... il faudrait une UV à 64?euros, soit le double, pour ne plus perdre d’argent en travaillant. Ce n’est que le chiffre du rapport KPMG. L’État a toujours choisi de faire supporter la charge financière de l’accès au droit sur notre profession au lieu de la collectivité. C’est tellement plus facile, mais c’est profondément inique.
Avez-vous un message pour Madame la bâtonnière élue Grimaud qui va vous succéder à partir de janvier 2017 ?
Je lui souhaite la réussite dans la mise en place des projets d’actualités qui ne manquent pas notamment entre le développement des MARD et la réforme du divorce par consentement mutuel pour lesquels elle a déjà une particulière implication. Je lui souhaite aussi de s’épanouir dans cette magnifique fonction.
Quels sont vos projets professionnels pour la suite ? Pour votre cabinet par exemple.
Le retour brutal à la routine relative de son cabinet reste toujours un moment difficile à gérer pour les bâtonniers sortant, un peu comme un sportif de haut niveau renvoyé en troisième division.
Je souhaite réorganiser de manière radicale mon cabinet en usant de toutes les possibilités offertes par les nouvelles technologies ; la mutation très rapide des modes d’exercice et des attentes nouvelles des clients ne peuvent être ignorées dans un confort fictif de travail à l’ancienne. Il ne faut pas subir mais être acteur de ce changement ; c’est un challenge passionnant.
Cependant, ayant été réélu au Conseil de l’ordre pour y siéger à l’issue de mon mandat, je resterai toujours utile à mon barreau.
Propos recueillis par Victor Bretonnier
Retrouvez notre entretien avec Entretien avec Valérie Grimaud, bâtonnier élu, dans le Journal Spécial des Sociétés n° 94 du 17 décembre 2016
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