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Au terme de leur mission
d’information parlementaire, les députés Jean-Paul Mattei et Nicolas Sansu ont
exposé leurs observations lors de la commission des finances du 26 septembre. Parmi
les propositions, un prélèvement sur le patrimoine des contribuables les plus
riches afin de financer la transition écologique.
À
l’aube de la loi finance 2024, la commission des finances s’est tenue le mardi
26 septembre 2023 afin d’examiner les recommandations des députés Jean-Paul
Mattei (Mouvement démocrate) et Nicolas Sansu (Parti communiste français) sur
la fiscalité du patrimoine, à la suite de la mission d’information
parlementaire qui leur a été confiée.
Afin de dresser un tableau le
plus complet possible, les deux rapporteurs ont organisé des auditions pendant
plusieurs mois avec des économistes, des praticiens du monde juridique,
financier, immobilier, des associations ou encore des syndicats.
Des inégalités patrimoniales
notables
Lors de la séance, Jean-Paul
Mattei revient notamment sur les inégalités patrimoniales en France. Selon lui,
« la politique monétaire non conventionnelle, certes, a permis de
conserver au cours de la dernière décennie l’économie et des emplois, mais elle
a aussi conduit à une inflation importante de la valeur des actifs financiers
et de l’immobilier au bénéfice des plus aisés ».
Le député note également que
« le vieillissement de la population conduit à une concentration du
patrimoine dans les catégories les plus âgées, à rebours peut-être des besoins
de notre société ».
Par ailleurs, pour le
parlementaire, la mondialisation et l’émergence de l’économie numérique
participent également à creuser ces inégalités. Ce phénomène étant voué à
s’accentuer, Jean-Paul Mattei souhaite interroger le cadre actuel de la
fiscalité du patrimoine. En effet, selon le rapport, « 92 % de la
masse de patrimoine brut est détenue par la moitié la mieux dotée des ménages »
et « l'héritage moyen des 0,1 % plus gros héritiers »
représente « environ 180 fois l'héritage médian ».
27 recommandations pour
repenser la fiscalité du patrimoine
Afin de repenser la fiscalité
du patrimoine actuelle, le rapport liste 27 recommandations. Lors de la
commission parlementaire du 26 septembre, Jean-Paul Mattei précise qu’elles
peuvent être réparties en trois thèmes : la fiscalité et la détention des
revenus du capital financier, la fiscalité des donations et des successions et
la fiscalité immobilière.
L’une des recommandations
consiste en une retenue à la source pour les plus-values immobilières.
Actuellement, il faut compter une année de décalage en cas de cession. Le
rapporteur estime que ce prélèvement à la source serait « un bon moyen
d’assurer les recettes et de faire une rentrée de trésorerie plus rapide ».
Par ailleurs, conscient que
certains membres présents risquent de grincer des dents à l’évocation de cette
proposition lors de la commission du 26 septembre, Jean-Paul Mattei aborde tout
de même la question de l’augmentation du PFU (prélèvement forfaitaire unique)
qu’il qualifie de « raisonnable ».
En outre, afin de financer
les investissements nécessaires à la transition écologique, le député propose
d’envisager au niveau européen des prélèvements « exceptionnels et
explicitement temporaires » sur le patrimoine des contribuables les
plus riches.
À lire aussi : Dérèglement climatique
et armées, quel rapport ?
Jean-Paul Mattei suggère
aussi de lancer une réflexion sur un potentiel impôt mondial sur le patrimoine
détenu par les ménages les plus riches dans le but de financer des aides aux
pays pauvres.
En ce qui concerne la
thématique des donations et de la succession, le rapport préconise de repenser
les abattements et mutations à titre gratuit, ainsi que les transmissions aux
enfants dans le cadre de familles recomposés. Selon Jean-Paul Mattei, le lien
affectif des enfants ayant grandi auprès de beaux-parents devrait être pris en
compte dans le cadre d’une succession. Le député propose aussi de revoir les
bornes d’âge, notamment dans le cadre d’une donation puisque les mesures
actuelles ne semblent aujourd’hui plus tellement pertinentes.
En matière cette fois d’assurance-vie,
le député souligne une tranche marginale de 45 % en matière de donation et
de transmission en ligne directe, alors qu’en matière d’assurance la tranche
marginale est de 31,25 %. S’agissant du pacte Dutreil, il estime qu’il
serait préférable de mieux définir ce qui est considéré comme une
« activité » pour revenir à la base de ce projet : favoriser la
transmission d’une entreprise familiale. Toujours dans le cadre du pacte Dutreil,
la question de la plus-value est aussi abordée.
IFI : limiter
l’abattement à 600 000 euros ?
Quant aux recommandations du
rapport concernant les questions liées à la fiscalité immobilière, le
rapporteur commence par aborder le sujet de l’IFI (impôt sur la fortune immobilière).
Selon lui, il serait possible de limiter l’abattement à 600 000 euros, ce
qui concernerait au final les résidences à partir de 1,8 million d’euros.
Côté foncier, le rapport
indique qu’il est important de mettre en concordance le foncier pour les
locations meublées et le foncier longue durée. Jean-Paul Mattei propose aussi
une mesure qu’il qualifie de « plus novatrice ou plus systémique »
qui consisterait à réfléchir sur l’abattement en durée de détention en matière
de plus-value immobilière (en excluant la résidence principale). Il questionne
donc l’exonération de plus-value en cas de vente au bout d’un certain nombre
d’années.
Enfin, pour faciliter le
parcours de l’accès à l’immobilier, notamment pour les primo-accédants, le
rapporteur propose de réfléchir à une forme de crédit qui serait lié aux
premiers droits de mutation payés lors de la première acquisition et ensuite ne
payer des droits d’enregistrement que sur la différence dans le cadre d’une
nouvelle acquisition. Ceci dans le but de réduire le coût fiscal.
Jean-Paul Mattei conclut en
rappelant qu’il s’agit ici de pistes de réflexion pour guider le débat
parlementaire. Nicolas Sansu, qui a co-dirigé le projet, précise également que
l’objet de ce rapport a été d’objectiver la réalité du patrimoine et sa
constitution. Il rappelle une accumulation de ce dernier vers le « haut
de l’échelle » et que la part de l’héritage devient prépondérante.
Selon le député, si cette distorsion n’est pas propre à la France, elle peut
entraver le pacte social et fiscal.
Les pistes de réflexion ont
ainsi un double objectif : favoriser le
consentement à l’impôt en retrouvant « plus de justice fiscale »
et garantir un niveau de recette compatible avec les choix collectifs au
niveau national et local.
Lucie
Barguisseau
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