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Depuis la création des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) par la loi du 5 août 1960, le législateur n’a eu de cesse d’étendre leurs prérogatives et il semble particulièrement déterminé ces dernières années à élargir le droit de préemption qu’elles tiennent de l’article L. 143-1 du Code rural et de la pêche maritime.
La loi numéro 2014-1170 du 13 octobre 2014, dite loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, avait ainsi étendu le champ d’application du droit de préemption des SAFER en l’appliquant aux aliénations à titre onéreux de terrains nus à vocation agricole, définis comme les terrains situés en zone agricole ou naturelle et forestière d’un document d’urbanisme, ou situés dans une zone de protection des espaces agricoles naturels et périurbains, ou dans une zone agricole protégée.
Depuis cette loi, les SAFER peuvent également exercer leur droit de préemption à l’occasion d’aliénations à titre onéreux de bâtiments ayant perdu leur vocation agricole, pour leur rendre un usage agricole, dès lors que le changement de destination a eu lieu moins de cinq ans avant l’aliénation.
La loi du 13 octobre 2014 a surtout innové en permettant aux SAFER de préempter en cas de vente de la nue-propriété ou de l’usufruit de biens immobiliers agricoles, ainsi qu’en cas de cession à titre onéreux de la totalité des parts ou actions d’une société ayant pour objet principal l’exploitation ou la propriété agricole.
Il s’agissait, selon les SAFER, de mettre fin aux pratiques destinées à contourner leur droit de préemption.
La même loi a enfin donné aux SAFER la possibilité de ne préempter qu’une partie des biens objets d’une aliénation à titre onéreux.
à l’occasion de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite loi Macron, les SAFER, faisant valoir que certaines donations étaient conclues en fraude de leur droit de préemption, ont obtenu du législateur qu’il soumette à leur droit de préemption les donations conclues entre personnes autres qu’ascendants et descendants, collatéraux jusqu’au sixième degré, époux ou partenaires de pacte civil de solidarité, une personne et les descendants de son conjoint ou de son partenaire de pacte civil de solidarité, ou entre ces descendants (article L. 143-16 du Code rural et de la pêche maritime).
Plus récemment, dans le cadre du projet de loi dite Loi Sapin II (loi numéro 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique), le législateur a voté de nouvelles dispositions tendant à élargir encore le droit de préemption des SAFER.
Soumises à la censure du conseil constitutionnel, ces dispositions ont été annulées au motif qu’elles n’avaient pas été adoptées conformément à la procédure constitutionnelle, dans la mesure où elles ne présentaient pas de lien, même indirect, avec celles qui figuraient dans le projet de loi déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale (décision numéro 2016-741 DC du 8 décembre 2016) et s’analysaient ainsi en un « cavalier législatif ».
Dès le 21 décembre 2016 une nouvelle proposition de loi était déposée, relative à la lutte contre l’accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle, reprenant purement et simplement, s’agissant du volet « lutte contre l’accaparement des terres agricoles », les dispositions invalidées par le Conseil constitutionnel.
L’objectif avoué de cette proposition de loi, dans le contexte du rachat par un groupe chinois de terres agricoles dans l’Indre, était de « répondre à un besoin de transparence du marché foncier agricole française et de réponse aux contournements, par des montages sociétaires, de l’action des SAFER ».
Cette loi adoptée sous le numéro 2017-348, en date du 20 mars 2017, prévoit désormais que tout achat par une personne morale de droit privé autre que GFA, GFR, SAFER, GAEC, EARL, de terres agricoles dont la superficie totale dépassera un seuil fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles, devra se faire dans le cadre d’un apport au profit d’une société ayant pour objet principal la propriété agricole. Cette obligation ne s’appliquera pas aux acquisitions, par des sociétés, de terres sur lesquelles elles sont titulaires d’un bail rural conclu avant le 1er janvier 2016.
La loi prévoit en outre que lorsqu’une personne apporte des terres en société, sous condition de non-préemption de la SAFER en application de l’article L. 143-5 du Code rural et de la pêche maritime, elle doit s’engager à conserver la totalité des parts sociales reçues en contrepartie de cet apport pendant au moins cinq ans à compter de l’apport. En cas de méconnaissance de cet engagement, la SAFER pourra solliciter judiciairement l’annulation de l’apport.
La loi supprime également l’interdiction faite aux SAFER de détenir plus de 30 % du capital d’un groupement foncier agricole ou d’y exercer des fonctions d’administration, de gestion ou de direction, ainsi que l’interdiction faite aux SAFER de détenir dans le capital social d’un groupement foncier rural plus de 30 % de la valeur des biens à usage agricole détenus par ce groupement. (…)
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