La religion, un rempart contre la violence ?


dimanche 9 mars4 min
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La France, fille aînée de l’Église, a une longue tradition chrétienne dont les prémices remontent au IIe siècle. Mais en 2025, les catholiques semblent de moins en moins nombreux et l’image du clergé est entachée d’affaires sordides. Dans ce contexte âpre, les hommes de Dieu ont encore beaucoup de choses à apporter à notre société. C’est du moins la conviction du cardinal François Bustillo Ripodas.

Le cercle vient de fêter ses quinze ans au cours d’un 110e dîner. Son président, Jean Castelain a chaleureusement remercié à cette occasion les fidèles qui portent l’association. François Bustillo Ripodas, cardinal-prêtre de Santa Maria Immacolata di Lourdes a Boccea était l’invité d’honneur de cette soirée. Il a détaillé quelques observations sur la société actuelle avant d’exposer ce que la religion peut y apporter.

29 % de nos concitoyens se déclarent catholiques. Notre pays compte plus de 42 000 églises, pour la plupart mises à la disposition de la nation par décret du 2 novembre 1789. Ce maillage nationalisé par la révolution témoigne de la proximité historique des curés avec la population française.

Aujourd’hui, les médias diffusent le sentiment que notre démocratie est fragile, qu’elle a besoin de personnes engagées dans l’économie, la politique, ou la religion pour subsister. Les scandales s’y répandent comme une trainée de poudre, sous le coup d'émotions, sans réflexion. Pour le prélat, « souvent, notre réaction première, face à une pensée, est plus commandée par l’émotion que guidée par la réflexion. S’accorder du temps, prendre du recul et débattre dans des rencontres comme celle de ce soir contribue à former les consciences et les intelligences ». François Bustillo Ripodas souhaite partager deux analyses : son regard vers la société, et son regard vers l'Église.

La société ordonnée a besoin de valeurs humaines

« Notre civilisation a reçu un héritage étonnant. Au début du 20e siècle (1917), le sociologue Max Weber nous parle d’un monde désenchanté. Il dit qu’avec la science et la technique, sans spiritualité, le monde risque d'être froid. Puis, nous avons vécu 2 guerres mondiales. Et à la fin du siècle, nous avons connu, ce que les théologiens ont appelé une société sécularisée. » Effectivement, la société occidentale et française est sécularisée. Le défi quotidien pour un prêtre consiste à proposer des réponses simples, claires, modernes, sans vouloir imposer ou endoctriner, un peu comme un cuisinier qui énoncerait ses recettes. Par ailleurs, quand il parle, s’immisce souvent dans l’auditoire l'appréhension qu’il soit là pour manipuler ou dominer les consciences.

À propos de manipulation, le cardinal développe : « Nous avons vécu une période, après mai 1968, où on a beaucoup parlé de liberté, mais une forme de liberté. Cette liberté était un peu adolescente. Nous avons adopté la devise anarchiste : ni Dieu, ni maître. Dieu a été évacué. On a eu des maîtres – je m’adresse à des avocats – dans beaucoup de domaines. Ces personnes ont proposé un idéal qui s’est quelquefois transformé en idéologie. » François Bustillo Ripodas précise qu’il est important d’orienter notre tendance naturelle à développer nos idées. Car, une idée peut faire tendre vers l'idéal, et tant mieux. Néanmoins, attention à ne pas sombrer dans « l'idéologie qui n’a pas de cœur ».

51 % des Français se disent sans religion. Sans Dieu, l’espace vacant est rempli par l'avoir, le pouvoir, le savoir ou le faire. Tout cela compte, mais néglige la dimension de l'être humain, l'être tout simplement. Qui soigne l’être aujourd'hui ? Qui l’accompagne ?

Pour le prélat, « les valeurs sont devenues floues. On a perdu une forme de colonne vertébrale, un référentiel des valeurs. Pour avancer, la société a besoin de retrouver cette structure solide qui lui donne sa stabilité et permet sa mobilité. L’humain qui perd sa solidité intérieure, qu’il soit croyant, peu croyant, pas croyant, croyant autrement, perd sa stabilité ».

Le cardinal prend pour exemple « le paraitre ». Il observe que nous vivons dans une société où « la peur de disparaitre nous pousse à nous afficher face aux autres. Nous avons très peur de l’abandon. Ne pas être considéré ou invité blesse. Il faut de la force intellectuelle et spirituelle pour affronter ces moments ». Paraitre implique de se montrer, et de parler.

Cette caractéristique constitue peut-être un catalyseur à la multitude des polémiques qui fracturent la société. D’une pensée, d'une idée, d'une vision peut très vite surgir la controverse. « Il est normal d'avoir des visions divergentes, mais pourquoi tomber si facilement et parfois d'une manière violente dans des affrontements ? », demande le prêtre.

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