Le droit applicable aux influenceurs : entre absence de régime spécifique et multitude de règles applicables


lundi 12 septembre 20223 min
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Quel que soit le secteur d’activité dans lequel l’influenceur opère – artistique, politique ou commercial –, il incarne le « gourou » suivi par des followers formant une communauté fondée sur le culte de la personnalité. Ainsi, la particularité ou l’essence de cette activité induit de multiples zones d’ombres, car de l’influence à la contrainte, il n’y a qu’un pas. Les influenceurs sont les acteurs incontournables de l’écosystème des réseaux sociaux, et ne peuvent échapper à la responsabilité du contenu quils diffusent sur les différents réseaux sociaux1. La mise en exergue du corpus de règles applicables à cette activité est l’objet de cette étude.

En effet, cette activité ne connaît pas de réglementation spécifique, à l’exception du secteur de la santé, comme l’illustre le Code de la santé publique à l’article L. 1453-1, 7°, mais aussi de la loi n° 2020-1266 du 19 octobre 20202 portant sur l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de 16 ans sur les plateformes en ligne, ce qui permet de déployer une protection de l’enfance dans le domaine de l’influence via le Code du travail.

Soutenir qu’il n’existe pas de règles spécifiques aux influenceurs est une affirmation à nuancer, même si elle résulte certainement de l’absence de statut juridique et de définition juridique de l’influenceur3. Il convient tout de même de préciser que l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) donne une définition de l’influenceur comme étant « un individu exprimant un point de vue ou donnant des conseils, dans un domaine spécifique et selon un style ou un traitement qui lui sont propres et que son audience identifie4 ». Son activité est donc soumise aux exigences des bonnes pratiques établies par l’ARPP, en particulier celles de la recommandation « communication publicitaire digitale v45 ». Cette soumission au droit souple qui se concrétise par l’application des recommandations de l’ARPP, en général, n’exclut pas l’application de certains textes de droit classique. Ceci dit, la question de droit dédié ou non est rhétorique, car même en l’absence de statut juridique, l’influenceur est responsable du contenu qu’il poste.

Cette responsabilité se cristallise au travers des textes qui s’appliquent au statut de l’influence, mais aussi dans ceux qui visent son activité commerciale.

 

 


L’encadrement juridique de l’expression de l’influenceur

L’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme consacre et protège la liberté d’expression sans distinction entre internautes « professionnels », ou simples utilisateurs des réseaux sociaux, offrant, de facto, la protection de la sacro-sainte liberté d’expression aux influenceurs.

Au demeurant, cette liberté d’expression n’est pas absolue, l’influenceur peut être tenu responsable s’il dépasse les limites admissibles à la liberté d’expression comme définie par les juges6. La loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 lui est aussi applicable dans le cas d’injures ou de diffamation. Enfin, l’influenceur peut voir sa responsabilité pénale engagée en cas de propos racistes ou de cyber harcèlement.  

Quant à la responsabilité en tant qu’éditeur de contenu, l’influenceur est responsable du contenu qu’il diffuse au public, peu importe la taille de l’influence qu’il possède ou s’il est rémunéré ou non pour les posts publiés. Ainsi, dès lors que l’influenceur est le titulaire de comptes sur les réseaux sociaux, il se voit appliquer le statut « d’utilisateur d’un service de partage de contenu en ligne ». Il est donc considéré comme un directeur de publication au sens de la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, et comme éditeur de contenu au sens de la loi sur la confiance dans l’économie numérique du 24 juin 2004.

 




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