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Selon Amnesty international, le déclin des droits humains dans le monde "se poursuit"


lundi 10 avril 20234 min
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10/04/2023 15:41:12 1 8 3538 65 0 13230 3265 3380 La France épinglée par le Conseil de l'Europe en raison de la rémunération jugée "indécente" des travailleurs en détention

Estimant que le temps de travail effectif des détenus n’est pas correctement rémunéré, le Comité européen des droits sociaux, qui a rendu ses conclusions courant mars 2023 suite aux observations fournies par l’Observation international des prisons (IOP), a conclu à la non-conformité de la France aux paragraphes 1 et 2 de l’article 4 de la Charte sociale européenne.

Alors que le ministre de la Justice vient de lancer le « Tour de France du travail pénitentiaire » le 3 avril dernier afin de promouvoir le travail en détention auprès des entreprises à l'échelle nationale, le Comité européen des droit sociaux a attiré l’attention sur la France en ce qui concerne la rémunération des travailleurs détenus, qu'il a jugée « indécente ».

En effet, le Conseil de l’Europe, chargé de la mise en œuvre de la Charte sociale européenne par les États membres, a rendu en mars dernier les conclusions de son examen relatif au respect des droits liés au travail par la France, dont les observations ont été fournies par l’Observatoire international des prisons (OIP). Le Comité européen des droits sociaux en a conclu « que la situation de la France n'est pas conforme à l'article 4§1 de la Charte [qui reconnaît le droit des travailleurs à une rémunération suffisante pour leur assurer un niveau de vie décent] au motif qu’il n’est pas établi que le salaire minimum soit équitable ».

Si pour sa défense, la France a avancé que cette charte qui garantit le droit des travailleurs à des conditions de travail et à une rémunération équitable et aux droits collectifs ne doit pas s’appliquer à la situation du travail en prison, en raison des « contraintes inhérentes à la détention et notamment […] celles tenant au bon ordre et à la sécurité », a rapporté l'OIP ; de son côté, le comité argue que ladite charte couvre bien les travailleurs détenus.

Une rémunération à la pièce, cause d’un salaire « indécent »

Au regard des informations apportées par l’Observatoire international des prisons, le comité a donc constaté la non-conformité de la situation française avec le droit à une rémunération décente pour les personnes détenues, retenant que les minimaux légaux de salaire, déjà extrêmement faibles (45 % du SMIC, est-il rappelé dans un communiqué du ministère de la Justice), ne sont pas respectés. Ce, « principalement en raison de la rémunération à la pièce. Selon cette pratique, les heures de travail sont comptabilisées sur la base du nombre de pièces produites alors qu’en réalité, le temps de travail effectif du détenu peut être beaucoup plus long et n’est donc pas entièrement rémunéré », est-il détaillé dans ses conclusions.

Il a énoncé par ailleurs que, selon les rapports annuels de la Direction des affaires juridiques du ministère de la Justice, la majorité des plaintes des détenus portent sur les rémunérations abusives dont ils font l’objet. Pourtant, la rémunération à la pièce persiste alors même que la loi française l’interdit depuis 2009. Le comité a rappelé à ce titre à l’État français « sa responsabilité dans le contrôle du respect du salaire horaire légal minimum établi pour les prisons » et a sommé « les autorités de rendre des comptes sur les mesures qui garantiraient une durée raisonnable du travail ».

L’indemnisation forfaitaire des heures supplémentaires effectuées par les membres du corps d’encadrement jugée non-conforme

Dans une moindre mesure, le Conseil de l’Europe affirme que les membres du corps d’encadrement et d’application de la police nationale se voient également amputés sur leur salaire, et plus particulièrement sur les heures supplémentaires qu’ils effectuent.

Le comité a retenu que « l’indemnisation forfaitaire des heures supplémentaires effectuées par les membres du corps d’encadrement et d’application de la police nationale ne garantissait pas un taux majoré de rémunération, que l’évolution de la prime de commandement versée aux officiers supérieurs ne pouvait compenser qu’un très petit nombre d’heures supplémentaires ».

Il réitère donc cette année que la situation de la France, déjà en situation de non-conformité lors de ses précédentes conclusions, n’est toujours pas conforme au deuxième paragraphe de l’article 4 de la Charte sociale européenne, le rapport de la France pour 2023 n’ayant « fourni aucune information en réponse à la précédente conclusion de non-conformité » est-il précisé dans les conclusions du Comité qui reste dans l’attente de résultats.

Le comité a toutefois de nouveau conclu cette année que la situation de la France est conforme au troisième paragraphe de l’article, qui appelle à une non-discrimination entre femmes et hommes en matière de rémunération.

 

Allison Vaslin

 

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