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L’Association française des juristes d’entreprise (AFJE) a été créée en 1969 et regroupe aujourd’hui 5000 juristes et directeurs juridiques. Les juristes d’entreprise jouent un rôle de plus en plus important dans la société et l’économie. L’association présente des propositions pour participer aux renforcements de l’attractivité du droit français et donc attirer les investisseurs.
Compétitivité du droit français : protéger la confidentialité des avis juridiques internes dans les entreprises françaises
C’est une mesure importante et facile à mettre en œuvre immédiatement pour renforcer la compétitivité des entreprises françaises et l’attractivité de notre droit dans la mondialisation. Rendre confidentiels les avis des juristes d’entreprise, proposition que le récent et très novateur rapport de Maître Kami Haeri sur l’avenir de la profession d’avocat recommande également, aura pour conséquence de placer les entreprises françaises sur un pied d’égalité avec leurs concurrentes. En effet, la très grande majorité des juristes d’entreprise dans le monde bénéficient de cette garantie pour leurs avis juridiques, comme celle qui existe pour les avis donnés par les avocats externes, mais qui en France ne s’étend pas aux avis internes, ce qui peut pénaliser gravement l’activité et les échanges souvent sensibles au sein des acteurs économiques français, dans un monde où le droit a une place de plus en plus sensible, notamment dans la concurrence de l’économie globalisée.
C’est aussi un moyen nécessaire pour que la mise en œuvre des programmes de conformité prévus par la loi Sapin II, programmes de lutte contre la corruption et les pratiques contraires à l’éthique et aux droits fondamentaux, puisse être pleinement efficace. Une telle décision, facile à prendre, sans coûts pour les finances publiques, protégera l’emploi et la compétitivité du droit français en évitant que des entreprises françaises ajoutent cet élément pour installer leur siège ou direction juridique ou générale ailleurs qu’en France, et que les entreprises françaises ne cherchent dans l’implantation de leur direction juridique et générale à l’étranger une protection légitime que le droit français leur refuse. Ces délocalisations des fonctions juridiques favorisent ensuite l’appel aux cabinets étrangers des pays où se trouvent ces directions, et donc l’utilisation du droit étranger, le recours aux juridictions étrangères, et à l’emploi de juristes internes de formation étrangère, le tout au détriment de notre droit. Enfin, ce sera la première pierre vers la grande profession du droit désirée par tous ceux tournés vers l’avenir des jeunes juristes et avocats, pour que les professionnels du droit pensent davantage à former un front uni – comme le font les professionnels anglais – pour défendre leur place plutôt que de se perdre dans de vaines et mortifères querelles corporatistes.
Attractivité de la France : moderniser la fabrique du droit français pour plus de sécurité juridique
Le problème de l’insécurité juridique et fiscale, maintes fois dénoncé et depuis longtemps, n’est toujours pas réglé. Les armoires sont pleines de rapports savants qui le fustigent. Dès lors qu’un consensus existe, il faut le traduire en droit. Dans une société qui exige protection et innovation, il faut une réforme institutionnelle qui favorise le mouvement de simplification et de dynamisation du droit garantissant les principes de sécurité juridique et de confiance légitime. C’est un enjeu crucial pour l’attractivité de notre droit et de notre économie.
La rétroactivité des lois fiscales doit être encadrée plus strictement, empêchant toute disposition fiscale défavorable au contribuable – personne physique ou personne morale – sauf à clarifier une situation juridique trouble ou confuse, à annuler des situations juridiques caduques ou à satisfaire des motifs impérieux d’intérêt général, sous réserve d’un contrôle de proportionnalité.
Par ailleurs, aucune loi ne pourra porter deux fois sur un même sujet au cours d’une même législature sans qu’une étude d’impact – incluant l’impact économique, social et l’éventuelle malfaçon constitutionnelle – ait été soumise à un vote préalable impératif des commissions permanentes compétentes au fond, au sein des assemblées parlementaires.
La suppression du Conseil économique, social et environnemental (CESE) est envisageable, mais devra se traduire par un renforcement des pouvoirs de contrôle du Sénat sur l’exécution des lois. Pour substituer le CESE, il serait novateur de faire entrer les citoyens dans la fabrique de la loi via, par exemple, une désignation par tirage au sort, sur les listes électorales, de 50 citoyens appelés ainsi à siéger au Sénat aux côtés des sénateurs élus pour une période de trois ans non renouvelable.
Ensuite, le droit à l’expérimentation permis par l’article 37-1 de la Constitution doit être davantage utilisé de manière à établir les régulations nécessaires tout en favorisant l’innovation. Ce peut être particulièrement utile dans les secteurs liés à la transformation numérique, à la transition écologique, ou bien encore pour moderniser le droit de l’emploi.
Enfin, le développement de la soft law doit être un moyen de faire participer plus largement toutes les parties prenantes, dont les juristes, à la création de la norme.
Organisation de la Justice
L’image et l’efficacité de l’institution judiciaire sont clés dans un État de droit, et favorisent l’attractivité d’une place juridique.
L’indépendance de la Justice doit être définitivement garantie par le vote de la loi constitutionnelle alignant les conditions de nomination des membres du parquet sur celles des juges du siège (au moins avis conforme du CSM).
Une part importante de la justice économique se traite dans le cadre de la justice commerciale consulaire. Il est urgent de la doter des moyens adaptés à ses missions pour qu’elle soit plus performante et attractive au bénéfice de l’écosystème des entrepreneurs. À l’instar de mécanismes similaires, tels ceux existants pour les élus, devrait être instauré un crédit d’heures annuel pour que les juristes d’entreprise puissent se former et exercer le mandat de juge consulaire. À cet égard, il importe de renforcer l’expérience de terrain de ces juges par un effort de formation continue.
Le développement de la numérisation de la Justice grâce aux potentialités du cloud computing, doit être une priorité pour faciliter l’accès au droit pour tous les justiciables dont les PME, rétablissant ainsi une égalité entre les territoires, et pour réduire les délais de traitement des affaires tout en réduisant les coûts pour le budget de l’État : dématérialisation des procédures, règlement des petits litiges en ligne, création d’un portail unique pour l’ensemble des juridictions…
En parallèle, il convient de développer les modes alternatifs de règlement des conflits, dont la médiation. Déjà présent dans notre droit, il s’agit d’en faire un moyen renouvelé de gestion de la vie économique. Le recours à des procédures de médiation en ligne pour les petits litiges commerciaux doit être envisagé : le développement d’une plateforme dédiée doit être imaginé avec les barreaux locaux, les représentants des juristes et les universités. (…)
Retrouvez la suite ce cet article dans le Journal Spécial des Sociétés n° 29 du 12 avril 2017
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