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« Ubi societa, ibi jus » là où il y a
(une) société, il y a (un) droit. Cette locution latine illustre bien le cas du
palais de justice : souvent placé au cœur de la ville, il est nécessaire à
toute société.
« La société vaut ce que vaut la justice sur laquelle elle repose » disait Emile de Girardin dans ses « Pensées et maximes » publiées en 1867. Cela implique que, pour avoir une société respectable et respectée, la justice que l’on y rend doit être irréprochable. Ce à quoi aspire profondément toute civilisation.
Alors que le Tribunal de commerce de l’Île de la cité fête ses 150 ans cette année, l’occasion nous semble opportune pour songer à l’architecture des palais de justice.
Dans son essai « Bien juger », Antoine Garapon affirme que « le procès est d’abord un rituel ». Et à toute exécution de rituel, une scène dédiée s’impose.
La force symbolique de ces
lieux impressionne l’esprit avec l’appui d’une architecture efficacement dessinée.
Hier larges et épais comme pour exprimer force et pouvoir, les murs des
tribunaux d’aujourd’hui tendent à évoquer ouverture et transparence.
Saint-Louis
rendait la justice sous un arbre
Louis IX, autrement connu sous
le nom de Saint-Louis, premier souverain à considérer que la justice est un
devoir primordial, pose les bases d’une justice ‘à la française’. Elle se place au-dessus des puissants. L’histoire
veut qu’à l’époque, le roi rende la justice sous un chêne. Au Moyen-âge on
décide de dédier un lieu à cette action : le tribunal. La volonté de
symboliser la justice apparait alors dans les projets architecturaux à partir
du XVIIè siècle : on se base sur un modèle classique, inspiré des temples
de l’antiquité. Alors, les colonnes des palais font non seulement référence au
style antique, mais symbolisent également le prolongement du tronc de l’arbre
sous lequel la justice était antérieurement rendue.
De
la puissance à la transparence
Initialement, le palais de justice se dresse comme un symbole de puissance. Et son architecture faite de colonnes et de frontons imposants en renvoie parfaitement l’image. Le bâtiment marque l’inébranlable pouvoir de la justice. On y accède en gravissant ses hautes marches, dans toute la solennité que l’on doit à cette matière.
Aujourd’hui, il change de
visage, à l’image du Nouveau Palais de Justice de Paris, entièrement vitré et
facile d’accès. Désormais, la transparence, l’ouverture et l’accessibilité sont
favorisés, traduisant une justice plus proche des citoyens. Un design moderne
et moins solennelle gomme peu à peu le style « trop classique » des anciens palais de justice. Renzo Piano,
architecte du Nouveau Palais de Justice de Paris explique que celui-ci constituera
« l’antithèse du palais intimidant,
hermétique et sombre du passé ».
De plus, sa situation
géographique, proche du périphérique reflète une volonté de démocratiser la
justice. En l’édifiant au carrefour de Paris et de sa banlieue, l’architecte a affirmé
sa place ‘dans la ville’.
L’anecdote :
la « salle des pas perdus »
On a tendance à penser que
cette expression fait référence aux va-et-vient incessants des personnes dans
l’attente, qui « perdent »
leurs pas dans cette salle immense. Il n’en est rien.
La « salle des pas perdus » se définit comme « un large vestibule s’ouvrant sur divers
bureaux et autres salles d’un bâtiment ouvert au public » (Littré). Toute
salle d’attente, comme celle d’une gare ou d’une mairie répond à cette
définition. Mais on l’assimile communément aux palais de justice. Dans cet
espace de « transition »
entre le monde extérieur et la justice, les avocats et leurs clients
s’entretiennent une dernière fois avant d’entrer dans la salle d’audience, on y
patiente aussi en attendant le délibéré des jurés. En réalité, l’expression
date du début du XIXè siècle. Après la défaite de Napoléon Ier, le peuple était
invité à voter pour réélire ou non les députés de la Chambre. Dans l’attente
des résultats, ces derniers faisaient les cents pas. Lorsque les députés échouaient,
on les considérait alors comme « perdus ».
Marie-Stéphanie
Servos
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