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Lors d’un webinaire, Svenia Busson, fondatrice de LearnSpace, un accélérateur de jeunes pousses dans le secteur des innovations pédagogiques, prodiguait ses conseils pour apprendre efficacement aujourd’hui.
Quelles sont les problématiques liées à l’apprentissage ? Comment apprend-t-on aujourd’hui ? Comment fonctionne notre cerveau ? Comment stocke-t-il des connaissances ? Et quelles sont les compétences essentielles à maîtriser aujourd’hui ? Pour répondre à ces vastes questions, les écoles et les centres de formation du réseau Compétences et Développement en partenariat avec le Club de l’Audace proposaient, jeudi 18 juin, un webinaire sur « Apprendre au 21e siècle » avec Svenia Busson.
Autrice du livre Exploring the future of education sur les innovations éducatives en Europe, Svenia Busson a réalisé un tour du monde pour explorer ce qu’il se faisait de mieux en matière d’innovations pédagogiques. À son retour, elle fonde LearnSpace, un accélérateur de start-up dédié au secteur de l’éducation pour partager son expertise dans le domaine.
Des méthodes inégales
C’est peu dire que l’éducation est une composante fondamentale de nos vies. Elle doit nous permettre d’acquérir des compétences concrètes essentielles telles que lire, écrire, compter, mais doit aussi nous faire développer des compétences sociales comme collaborer, prendre la parole en public, aiguiser notre esprit critique ou notre créativité. Bien apprendre est essentiel, mais force est de constater qu’apprendre s’apprend, et que toutes les méthodes pour y parvenir ne sont pas égales.
Svenia Busson présente une pyramide simplifiée de l’apprentissage avec le taux de rétention des informations associé à chaque méthode.
• cours magistraux : 5 % de taux de rétention
• lecture : 10 %
• audio/visuel (mook, ELearning) : 20 %
• démonstration : 30 %
• discussion en groupe : 50 %
• learning by doing (apprentissage par le faire) : 75 %
• les pairs (apprentissage social, collaboratif) : 90 %
Elle décrypte ces chiffres : « Dans le haut de la pyramide, on est dans une situation de passivité en tant qu’apprenant. Par exemple, dans un cours magistral, on est passif, assis sur sa chaise et on écoute le professeur. Le taux de rétention des informations est assez faible par rapport à des méthodes où l’on va être beaucoup plus acteurs de notre apprentissage. » C’est à partir de ces observations que s’est construite par exemple la jeune pousse We Are Peers (WAP) qui propose de « révéler, partager, co-construire les savoirs dans les formations, événements et communautés » soit un apprentissage collaboratif basé uniquement sur les pairs et les échanges. L’experte insiste cependant sur la nécessaire mixité des méthodes qui sont complémentaires.
Le bien-être, un facteur essentiel
Pour apprendre, il faut la bonne méthode mais aussi bon état d’esprit. « Le bien-être a un rôle clef dans l’apprentissage », martèle Svenia Busson. Ce lien entre état d’esprit et apprentissage se fait au cœur du cerveau, et plus précisément par l’amygdale. « L’amygdale a le pouvoir d’anéantir toute la capacité du néocortex à créer des connexions neuronales et donc à stopper l’apprentissage. Quand l’amygdale ressent des émotions négatives, tout le cerveau peut être complétement brouillé. On ne peut plus apprendre correctement », détaille l’experte. Elle encourage donc les initiatives d’enseignants qui proposent de la méditation avant les cours ou les méthodes de « météo intérieure » où les enfants formulent leur état d’esprit chaque matin. « Exprimer comment on se sent peut aider à aller mieux », rappelle-t-elle.
Elle donne également l’exemple de la Finlande, pays précurseur de l’enseignement de l’empathie. Là-bas, on apprend aux enfants à se faire des retours positifs et détaillés, à remarquer et souligner les qualités de leurs camarades. Une dynamique positive pour tous. « On construit sur nos forces beaucoup plus que sur nos faiblesses », explique Svenia Busson. Et cela permet de ne pas uniquement valoriser les compétences scolaires mais aussi les comportements dans les relations interpersonnelles et donc de valoriser les points forts de chaque enfant. En effet, « souligner ce que la personne fait de bien, ses efforts, comment elle s’est améliorée dans le temps, les donner à voir » est essentiel pour motiver les enfants, pour encourager leur esprit d’apprentissage.
Apprendre mais quoi ?
Si bien apprendre est important, on peut aussi se demander quelles sont les compétences essentielles à acquérir aujourd’hui et notamment pour faire progresser notre employabilité. Le top 3 des compétences désirables se présente ainsi :
1. résolution de problèmes complexes,
2. esprit critique,
3. créativité.
Svenia Busson remarque également l’entrée de l’intelligence émotionnelle dans le top 10 des compétences fondamentales aujourd’hui, ce qui n’était pas le cas en 2015. « Dans le top 10, il n’y a presque que des compétences dites “molles” ou des soft skills parce qu’effectivement, aujourd’hui il faut beaucoup de relationnel, il faut savoir être flexible, négocier, avoir de l’intelligence émotionnelle », souligne-t-elle. Les compétences interpersonnelles et relationnelles sont donc essentielles et devraient, selon elle, pouvoir être enseignées à l’école et à l’université.
La leçon Covid-19
L’épidémie de Covid-19 a totalement chamboulé l’Éducation nationale et les méthodes pédagogiques traditionnelles. « La période du confinement a accéléré plein de sujets mais […] c’est arrivé tellement rapidement, beaucoup d’établissements n’étaient pas prêts à passer en tout digital donc beaucoup de choses se sont faites avec la débrouillardise. Beaucoup de choses ont émergé, c’est sûr […] mais je n’ai rien vu qui m’aie marquée par sa qualité pédagogique. Le confinement était la période de la débrouillardise », analyse-t-elle. Malgré une grande improvisation, l’experte estime que les enseignants et chefs d’établissement ont su relever un défi qui n’était pas gagné d’avance.
Elle salue également l’action de beaucoup de jeunes pousses de l’éducation digitale (EdTech) qui ont donné des accès gratuits aux professeurs, élèves et parents pour utiliser leurs outils pédagogiques. « Cela a montré que ces outils marchent, qu’il y a plein d’outils ultra innovants qui ne sont pas utilisés aujourd’hui dans les écoles parce que, souvent, il n’y a pas les budgets, parce que ce n’est pas l’état d’esprit du ministère d’investir là-dedans. » Une nouvelle leçon pour l’avenir.
Maïder Gérard
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