De la collection à l’affaire Schlumpf


mardi 19 mai 20203 min
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L’automobile de collection est un marché de passionnés : ces voitures au design et aux courbes élégantes sont avant tout des objets d’art. L’engouement pour les véhicules de collection fait l’objet depuis des décennies d’un véritable intérêt, synonyme d’inflation des prix. Les Jaguar Type D, les Mercedes 300 SL coupé « papillon » ou encore les Ferrari 250 GTO se vendent aujourd’hui à des prix semblables aux œuvres des plus grands maîtres impressionnistes.

Si la passion de collectionner les véhicules les plus prestigieux relève aujourd’hui de l’évidence, ce n’était pas encore le cas dans les années 1950 à 1970. Les frères Schlumpf ont, à cet égard, été des précurseurs. On leur doit, malgré les controverses qui ont émaillé sa constitution, la collection la plus grande et la plus fastueuse au monde de véhicules de collection.

En retraçant leur histoire, nous évoquerons ces liens croisés entre automobile de collection et sphère judiciaire, qui ont achevé de faire de ce musée une aventure humaine et un mythe pour tous les amoureux de la voiture de collection.

Une fabuleuse collection

Plus grande collection au monde de Bugatti avec pas moins de 130 de ses modèles, la Cité de l’automobile-Collection Schlumpf de Mulhouse a été le fruit d’une incroyable épopée.

Le 7 mars 1977, Patrick Poivre d’Arvor ouvre son journal télévisé sur l’occupation par les ouvriers de l’usine Schlumpf, qui ne sont plus payés depuis des semaines, faute de liquidités.

La France, stupéfaite, découvre que deux frères, Hans et Fritz , ont accumulé 560 voitures de collection soigneusement rangées et éclairées par des centaines de réverbères semblables à ceux du Pont Alexandre III, dans un fantastique musée.

Retour sur la constitution d’une fabuleuse collection de voitures de collection.

Fils d’un négociant de textile suisse et d’une mère alsacienne, les deux frères Fritz et Hans Schlumpf sont élevés, au décès de leur père, par leur mère, à Mulhouse.

Financiers et spéculateurs hors pair, les deux frères de nationalité suisse sont épargnés par la crise de 1929. Ils font fortune, construite au prix d’un travail acharné, et Fritz peut ainsi rêver les yeux ouverts, en côtoyant au plus près le monde de la course automobile. Fasciné par la légendaire marque Bugatti, aux 10 000 victoires internationales en course automobile, il s’offre dans les années 1930 la première pièce de leur immense collection : la Type 35, voiture mythique pour ses victoires en Sicile à Targa Florio.

Avec quels moyens financiers cette collection est-elle constituée ?

L’année 1935 marquera, jusqu’ au dépôt de bilan en 1976, le début de l’aventure des deux frères dans le monde du textile. Sans doute faut-il y voir une influence du parcours de leur père.

L’achat de la filature à Malmerspach fait très vite place à de multiples rachats qui forgent progressivement l’empire industriel Schlumpf et son emprise sur l’Alsace. Le succès commercial que les deux frères rencontrent leur donne les moyens de continuer et d’étoffer leur dispendieuse collection automobile.

Rapidement, elle s’enorgueillit d’une quarantaine de véhicules d’exception (Rolls-Royce, Hispano-Suiza, Tatra) et notamment de deux nouvelles Bugatti de type 57.

À la mort d’Ettore Bugatti, les frères Schlumpf réussissent à racheter l’ensemble de la collection personnelle de celui-ci, et notamment la mythique Type 41 – Coupé Napoléon.

Au total, les frères Schlumpf ont réussi à rassembler une collection unique au monde de 560 véhicules de 96 marques différentes. La crise du textile de 1976 sonne le glas de cette fièvre acheteuse. La collection découverte, elle est ainsi perçue par les ouvriers et l’opinion publique comme la cause de tous les maux. La France entière bruisse alors du « on-dit » que cette passion dévorante pour les automobiles de collection aurait causé le dépôt de bilan et la disgrâce des frères Schlumpf, lesquels passent effectivement d’une collection de voitures à une saga judiciaire.

 

Une incroyable saga judiciaire

C’est le début de l’affaire Schlumpf. Les ouvriers des usines Schlumpf n’étant plus payés, ils décident d’occuper les lieux. L’occupation durera du 7 mars 1977 jusqu’au 22 mars 1979. Patrons paternalistes, ils seront dépossédés de leurs biens par la justice française, orphelins de leurs précieuses voitures. Ils seront condamnés à de la prison ferme pour abus de biens sociaux et interdits de territoire français.

Cette affaire judiciaire va durer deux ans et tenir en haleine l’opinion publique française.

Les frère

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