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Les
opérations de contrôle Urssaf devraient repartir à la hausse cette année après
deux années de baisse relatives à la crise liée au Covid-19. L’occasion de
faire le point avec Gwénaël Froger, juriste (département social), chez Oratio
Avocats, sur la manière dont se déroulent les contrôles ainsi que les
procédures à suivre pour les entreprises en cas de contestation.
Qu’est-ce qui peut déclencher un
contrôle Urssaf ?
L’Urssaf (Union de recouvrement des cotisations de
Sécurité sociale et d’allocations familiales) décide des actions à mener selon
ses propres critères, les entreprises pouvant être contrôlées tous les trois
ans, compte tenu des règles de prescription. Aussi, les déclaratifs produits
par l’entreprise peuvent amener l’Urssaf à opérer un contrôle, en raison
d’incohérences, de régularisations suspectes ou d’exonérations de cotisations
spécifiques.
Il peut également faire suite à un contrôle fiscal ou être
la résultante d’une dénonciation d’un client, d’un concurrent, d’un salarié ou
ex-salarié.
Comment l’entreprise peut-elle s’y
préparer au mieux ?
Elle doit tout d’abord, en amont de l’intervention de
l’inspecteur, préparer les documents qui pourront être consultés.
Elle doit aussi anticiper les réponses et pièces à
apporter concernant les sujets à risques.
Ensuite, l’entreprise a tout intérêt à mettre à
disposition de l’inspecteur un interlocuteur averti. Ce dernier devra être
disponible et à son écoute tout au long du contrôle afin de produire toutes
pièces utiles.
« Le montant des régularisations
atteint près de 1,2 milliard d’euros. »
Ceci est d’importance, car il a été jugé que « les
pièces versées à hauteur d’appel par la société doivent être écartées dès lors
que le contrôle est clos après la période contradictoire telle que définie à
l’article R. 243-59 du Code de la Sécurité sociale (CSS) et que la société n’a
pas, pendant cette période, apporté des éléments contraires aux constatations
de l’inspecteur. »
L’entreprise peut aussi utilement se faire assister, dès
la phase de contrôle, d’un conseil de son choix.
Comment se déroule le
contrôle ?
Sauf en cas de lutte contre le travail dissimulé, il est
obligatoirement précédé de l’envoi par l’Urssaf compétente d’un avis de
contrôle au moins 30 jours avant la date de la première visite du contrôleur.
Cet avis constitue une formalité substantielle dont l’omission entraîne la
nullité des opérations de contrôle.
Le contrôle se fait dans les locaux de l’entreprise, sauf
contrôle sur pièce pour les entreprises de moins de 11 salariés. Il repose sur
des échanges entre l’inspecteur et l’entreprise afin de prendre en compte
l’ensemble des informations nécessaires à la vérification.
Que peut demander l’Urssaf dans ce cadre, et que ne peut-elle pas demander ?
Pendant le contrôle, les inspecteurs
peuvent exiger la présentation de tout document qu’ils jugent nécessaire et
accéder à tout support d’information, notamment informatique, y compris après
avoir quitté l’entreprise, et ce, jusqu’à l’envoi de la lettre d’observations.
Sauf autorisation de l’employeur, seules des copies des
documents remis peuvent être emportées et exploitées en dehors des locaux.
Sur le lieu de travail, ils peuvent interroger toute
personne rémunérée par l’entreprise, notamment pour recueillir leurs noms,
adresse, nature des activités exercées, horaires de travail, rémunération et
avantage en nature versés.
En revanche, les inspecteurs ne peuvent réclamer,
communication de documents qui manifestement ne sont d’aucune utilité pour le
contrôle.
En outre, sous peine de nullité du contrôle, ils ne
peuvent pas rechercher eux-mêmes de documents en l’absence de l’employeur ou
les demander à un tiers sans les avoir préalablement demandés à l’entreprise.
Quelle est la part de redressements
sur le total des contrôles ? Dernièrement, quels étaient les chefs de
redressement majoritaires ?
Selon l’Urssaf, sur l’année 2020, ses services ont réalisé
70 000 contrôles et actions de prévention dont 29 000 contrôles comptables
d’assiette et 24 000 contrôles partiels d’assiette sur pièces.
Sachez que 7 contrôles comptables sur 10 ont donné lieu à
régularisation de cotisations (redressement ou restitution). En chiffres, cela
représente 571 millions d’euros régularisés dont 70 millions d’euros restitués
aux entreprises. En tenant compte de l’activité de lutte contre le travail
dissimulé, le montant des régularisations atteint près de 1,2 milliard d’euros.
Les chefs de redressement les plus
importants portent sur les rémunérations non soumises à cotisations (29,5 % du
total des régularisations), les exonérations de cotisations sociales (28,6 %),
les frais professionnels (12,3 %) et les cotisations, contributions et
versements annexes (10,6 %).
Dans
quels cas la procédure de contrôle peut-elle être reconnue comme irrégulière et
quels sont les recours possibles ?
La procédure de contrôle doit être
contradictoire et garantir les droits de la défense.
L’entreprise s’attache bien souvent,
et ce, à tort, aux seuls motifs de redressement. Or, elle a tout intérêt à
vérifier que la procédure n’est pas émaillée d’irrégularités. Encore faut-il
savoir les détecter, ce qui nécessite le plus souvent de recourir à un conseil
avisé à ce type de procédure.
Par exemple, la Cour de cassation a
rappelé que la lettre d’observations doit préciser, année par année, le montant
des sommes dues, ou qu’elle doit mentionner de manière exhaustive les documents
contrôlés par les agents, à peine de nullité. Même sanction en cas d’absence de
mention des informations obtenues auprès de tiers.
Le contenu de la mise en demeure peut
également être non conforme.
L’irrégularité peut porter sur l’avis
de contrôle (mention manquante, erreur sur son destinataire) mais également sur
les investigations des inspecteurs pendant le contrôle ou encore sur la durée
du contrôle (maximum trois mois dans les entreprises de moins de 11 salariés).
En cas d’irrégularités de procédure,
l’entreprise pourra contester la mise en demeure de l’Urssaf en saisissant la
commission de recours amiable (CRA). Puis en cas de rejet de la contestation
par la CRA, le pôle social du tribunal judiciaire pourra être saisi.
Quels
sont vos conseils pour éviter les redressements ? Sur quoi faut-il
être particulièrement vigilant ?
Pour éviter les redressements,
l’entreprise doit être irréprochable sur le fond en faisant une application
conforme de la législation et faire preuve d’une grande rigueur administrative.
Elle doit porter une attention
particulière sur la forme exigée par la législation en conservant soigneusement
les actes juridiques imposés et les justificatifs de la bonne pratique.
J’invite les entreprises à être
vigilantes sur ces points, car dans de nombreux dossiers, les redressements
résultent d’une telle irrégularité.
Enfin, l’entreprise doit être
proactive en s’interrogeant sur la marche à suivre et en mettant en place des
process de sécurisation de ses pratiques. Je ne peux que lui conseiller de
prendre conseil en amont afin d’adapter sa conduite à l’aune de la législation.
Propos recueillis par
Bérengère Margaritelli
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