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Alors
que plus de la moitié des justiciables affirment ne plus avoir confiance en
l’institution judiciaire, les acteurs de la justice dénoncent un système à bout
de souffle et en viennent à se questionner sur le sens de leur mission. En
pleine campagne présidentielle, le sujet est donc naturellement sur la table.
Retour sur les mesures avancées par chaque candidat pour redorer le blason de
la justice, et rétablir son lien avec les citoyens.
La
situation de la Justice française n’est pas au beau fixe.
De
leur côté, les acteurs de la justice voient rouge. Les magistrats et
personnels de greffe, soutenus par les avocats, ont fait part de leurs
inquiétudes, le 16 décembre dernier, lors d’une mobilisation générale sans
précédent. En pleine remise en question sur le sens de leurs missions, ils se sont réunis
pour réclamer plus de moyens – financiers et humains – pour la justice.
L’expression d’un malaise de longue date qui a ressurgi après le suicide, en
août 2021, de Charlotte, jeune magistrate de 29 ans.
Il
faut dire que malgré les augmentations budgétaires allouées (sous le
quinquennat d’Emmanuel Macron, le budget de la Justice a été augmenté de 18 %
depuis 2017, et de 8 % les deux dernières années), le compte n’y est pas. La Justice française est encore à la traine comparée à la moyenne
européenne. Selon une enquête de la Commission européenne pour l’efficacité de
la Justice (CEPJ) de 2018, la France accorde un budget de 69 € par
habitant pour la Justice, contre 92 € en l’Espagne et 131 € en
l’Allemagne. Un retard qui s’expliquerait par « 20 ans d’abandon humain
et budgétaire de la justice », a notamment commenté le garde des Sceaux au micro de France
Inter, en fin d'année.
Autre
sujet : les effectifs. Et là aussi, la France est loin du compte. Pour
rappel, notre pays compte 3 procureurs, 11 juges et 34,1 « personnels
non-juges » pour 100 000 habitants, là où la moyenne européenne se
situe à 11 procureurs, 18 juges et 60,9 « personnels non-juges ».
Pointant la justice « dégradée »,
la Conférence nationale des Premiers présidents, la Conférence nationale des
procureurs généraux, la Conférence nationale des présidents de tribunaux
judiciaires et la Conférence nationale des procureurs de la République, dans un
communiqué commun, font part de leur inquiétude concernant l’épuisement des
professionnels, allant jusqu’à évoquer une « insécurité juridique » ; une situation qui nourrit à leur sens
« un sentiment de défaillance à
l’égard de l’autorité judiciaire insuffisamment défendue par la parole publique ».
Dans ce cadre détérioré, Les
Français ont-ils encore confiance en leur Justice ? Vaste question. Si on
en croit le sondage Ifop « Les
Français, la Justice et l’avocat à l’aube de l’élection présidentielle » réalisé
pour le barreau de Paris en début d’année, le résultat n’est pas fameux.
Questionnés sur la confiance dans les institutions, les répondants placent la
justice au 5e rang sur un total de sept institutions proposées. Elle est ainsi devancé par les hôpitaux (86 %), l’armée (85 %), la police et l’école
(chacune avec 79 %), seulement 54 % des personnes interrogées
estiment avoir confiance en elle, devant les élus et les
médias. En
outre, 65 % des sondés considèrent que la Justice fonctionne mal. 70 % l’expliquent par un manque de moyens. Pour y remédier, 3 Français sur 5 se disent favorables à ce que l’État lui consacre
davantage de moyens, notamment pour recruter plus de magistrats et de
greffiers.
Mêmes
résultats concernant le sondage visant à évaluer « Le rapport des Français à la justice » (CSA – Sénat –
septembre 2021), où la majorité des Français (53 %) affirme ne pas avoir
confiance en l’institution judiciaire. En revanche, ils sont paradoxalement nombreux à faire confiance aux professionnels de la justice, même si les rédacteurs de l'étude jugent
« fragile » la confiance envers les magistrats.
La méconnaissance de l’institution ressurgit également de ce
sondage : alors que près d’un Français sur cinq dit avoir été en contact
avec la justice au cours des cinq dernières années, ils sont 51 % à avouer
mal connaître le fonctionnement du système judiciaire français.
Dans
la course à l’Élysée, les douze candidats à l’élection présidentielle se sont
donc, tour à tour, emparés du sujet pour apporter réponses et solutions pour rebâtir
et rénover la Justice française. Notons qu’il ne sera pas question ici ni des
solutions envisagées pour faire face au terrorisme, ni de propositions
inscrites dans la lutte contre les violences faites aux femmes.
Candidat à sa réélection, Emmanuel Macron a
dévoilé son programme, le 17 mars, lors d’une conférence de presse.
En termes de justice, le président sortant l’affirme :
« Nous continuerons d’investir pour
garantir le droit à la vie tranquille, avec davantage de policiers et de
gendarmes sur la voie publique et davantage de magistrats pour accélérer la
justice, dans nos quartiers comme dans nos campagnes ». À ce titre, le
fondateur de La République en marche ! prévoit de recruter 8 500
magistrats et personnels de justice supplémentaires d’ici 2027.
Emmanuel Macron promet également « des sanctions efficaces et
rapides » : pour « les
délits qui empoisonnent le quotidien », le chef de l’État entend
imposer « des amendes forfaitaires
(comme c’est désormais le cas pour l’usage de cannabis ou l'occupation des
halls d’immeuble), plutôt que des procédures longues. Elles pourront être
prélevées directement sur les revenus », précise-t-il.
Pour les mineurs délinquants, Emmanuel Marcon
évoque la possibilité d’un encadrement par des militaires.
Autre proposition : la possibilité de
déposer plainte en ligne pour de nombreux délits (piratages de carte bancaire,
vols...), sans avoir besoin d’aller au commissariat.
Enfin, le candidat invoque la privation de
droits civiques à l'encontre de ceux qui s’en prennent aux dépositaires de l’autorité
publique.
Pour la candidate du Rassemblement national, la sécurité compte parmi les priorités du quinquennat. En ce qui concerne spécifiquement la justice, Marine Le Pen, si elle est élue présidente, promet de porter une loi de programmation pour la sécurité et la justice, et de lui allouer 1,5 milliard d’euros par an, un budget qui permettrait notamment la création de 7 000 postes de policiers et gendarmes, et 3 000 de personnels administratifs, mais aussi de multiplier par deux le nombre de magistrats, les portant à 20 000 pour « être ainsi dans la moyenne européenne du nombre de magistrats par habitant ». « Pour procéder à un recrutement rapide, une part importante de ces nouveaux magistrats sera recrutée au tour extérieur. Des postes de greffiers et de personnels administratifs ou techniques seront dans le même temps créés à due proportion (…) » ajoute-t-elle dans son programme.
« L’un des problèmes les
plus aigus auxquels sont confrontés les tribunaux est le manque de places de
prison », considère la candidate d’extrême droite pour qui « l’écart entre la peine prononcée et la
durée passée en prison est souvent considérable, ce qui nuit à la crédibilité
de la justice et mine la confiance des citoyens ». L’actuelle députée de la 11e
circonscription du Pas-de-Calais ambitionne
ainsi de « rétablir les peines planchers pour que tout criminel et
délinquant aient une sanction », de lutter contre l’insécurité des peines non exécutées et de répondre
au « sentiment d’impunité (…)
chez les hors-la-loi » en atteignant 85 000 places de prison disponibles à l’horizon de 2028.
« Dans le cadre de ce programme immobilier, des établissements pour les détenus présentant des troubles psychiatriques seront construits et des établissements provisoires seront aménagés afin d’être disponibles dans des délais plus courts que des prisons classiques » ajoute Marine Le Pen.
La candidate entend également supprimer
toute possibilité de réduction et d’aménagement de peine, en particulier pour
les violences contre les personnes. Elle souhaite également instituer une
présomption de légitime défense pour les forces de l’ordre, inscrire au fichier
des délinquants sexuels les harceleurs de rue et établir une perpétuité réelle.
Selon la candidate des Républicains, « La
justice est noyée » : « II y a deux fois moins de juges et de
procureurs en France qu’en Allemagne, et 2 millions de Français sont
actuellement en attente de jugement » rappelle-t-elle dans son
programme. En réaction à ces chiffres, Valérie Pécresse, avec « Le courage de faire » pour slogan,
promet de faire voter dès l’été 2022 une loi de modernisation de la sécurité et
de la justice. Elle entend ainsi lancer un grand plan Orsec « pour juger vite et bien », via
l’investissement d’un budget de 9 milliards dans les tribunaux (soit une hausse
de 50 % sur cinq ans des moyens des tribunaux) pour recruter 16 000
nouveaux agents, dont 3 000 juges, 3 000 greffiers et 2 000
procureurs.
L’actuelle présidente de la Région IDF aspire
également à la construction de 20 000 places de prison et, à court terme,
à la transformation des bâtiments désaffectés en centres de détention pour
exécuter les peines les plus courtes. Elle s’engage également à doubler le
nombre de centres éducatifs fermés pour mineurs.
La candidate de droite propose aussi de diviser
par deux le délai des procédures pénales via la numérisation et la
simplification, de réduire le délai de jugement des délits du quotidien
à moins de six mois, d’imposer une comparution immédiate systématique pour les
flagrants délits, et de mettre fin à l’automaticité´ des aménagements de peine « qui ne seront accordés qu’à ceux qui
présenteront un comportement irréprochable », précise-t-elle.
Dans son programme, l’ancienne ministre de
l’Enseignement supérieur et de la Recherche explique également vouloir
instaurer des circonstances aggravantes pour les auteurs de crimes commis dans
l’un des 62 quartiers dits de « reconquête républicaine », comme
c’est déjà le cas dans les écoles ou les transports en commun, « pour renforcer les sanctions et en finir
avec l’impunité et l’impuissance publique », et vouloir abaisser la
majorité pénale de 18 à 16 ans. Engagée contre le harcèlement en ligne et la
pornographie, Valérie Pécresse souhaite protéger les jeunes en créant un
cyber-parquet chargé de combattre la criminalité sur Internet.
Prônant le « tu casses, tu répares immédiatement », l’ancienne ministre du
Budget, des Comptes publics et de la Réforme de l’État entend également
développer dans tous les organismes publics les travaux d’intérêt général,
« frapper les délinquants au
portefeuille par des retenues sur salaires ou sur les allocations sociales »,
et mettre en place une participation financière des détenus à leur
incarcération, à l'instar de la Suisse e du Danemark.
Autres propositions de la candidate des
Républicains : exclure du logement social les fauteurs de trouble ou les
personnes condamnées pour trafics ou violences ; sanctionner pénalement les
squatteurs de logement ; exclure du logement social les dealers et les
familles qui vivent des trafics ; et rétablir des peines planchers
automatiques pour les multirécidivistes violents et pour les trafiquants de
stupéfiants.
Le candidat d’extrême gauche à l’élection
présidentielle estime que « la
justice n’a plus les moyens de ses missions ». En réponse, Jean-Luc
Mélenchon veut donner plus de moyens humains et financiers à la Justice, pour
qu’elle « soit bien assurée, et dans
des délais raisonnables ».
Dans son programme porté par son slogan
« Un autre monde est possible », le candidat de la France insoumise entend recruter davantage de fonctionnaires (magistrats, greffiers,
agents de la protection judiciaire de la jeunesse), sans communiquer de
chiffres précis.
Visant à rendre « la justice au nom du peuple », ce dernier entend mettre
fin à la disparition progressive des jurés, supprimer les cours criminelles
sans jurés et expérimenter les jurés dans les tribunaux correctionnels.
Pour assurer un meilleur accès à la justice,
Jean-Luc Mélenchon propose également d’augmenter l’aide juridictionnelle et se
positionne pour le retour des tribunaux de proximité.
En outre, dans cette 3e course à
l’Elysée, le candidat ambitionne de renforcer les droits de la défense en
l’inscrivant dans la Constitution, de renforcer la place de l’avocat et de
limiter le recours à la visioconférence qui, à son sens, « déshumanise la justice ». Il
propose enfin de garantir la gratuité des procédures les plus courantes, comme
le divorce par exemple.
Considérant qu’une « réelle réforme de la justice ne pourra se faire que dans un grand
rendez-vous entre le peuple et ses institutions avec la convocation d’une
Assemblée constituante », l’actuel député des Bouches-du-Rhône entend
« en attendant » renforcer l’indépendance de la justice
vis-à-vis de l’exécutif en interdisant les instructions individuelles et les
remontées d’information individuelles, sauf lorsqu’elles appellent à une
intervention directe de l’exécutif en matière d’ordre public (le terrorisme,
par exemple).
Il entend également poursuivre et punir tous
les complices de violation du secret de l’instruction, et lutter contre la
délinquance financière en doublant les effectifs des services qui luttent
contre les infractions financières, donner plus de moyens humains aux brigades
en charge de la délinquance financière, augmenter le nombre de juges
d’instruction et supprimer la convention judiciaire d’intérêt public.
Concernant les prisons, Jean-Luc Mélenchon
affirme vouloir « en finir avec la
surpopulation carcérale et assurer aux personnes détenues les moyens de se
réinsérer dans notre société ». Il explique enfin être engagé dans la
lutte contre l’impunité des agresseurs sexuels et la correctionnalisation des
viols.
« Impossible n’est pas français », affiche Eric Zemmour pour
slogan de campagne. Le candidat explique dans son programme vouloir « restaurer une justice ferme » en instituant
des peines planchers pour chaque crime et délit, et entend rétablir la peine de
perpétuité réelle pour les criminels les plus dangereux. Le candidat du parti
Reconquête souhaite également réduire « drastiquement » les remises de peine « pour que la peine prononcée soit réellement
exécutée ». Il se prononce également pour la déchéance de
nationalité des criminels et des délinquants multirécidivistes binationaux,
puis pour leur exclusion.
Pour régler le problème de la surpopulation
carcérale, le candidat d’extrême droite projette de construire 10 000
places de prisons supplémentaires et d’ « expulser immédiatement plus de 1 000 délinquants étrangers
emprisonnés ».
Le candidat Zemmour entend enfin recruter
3 000 magistrats et 3 000 greffiers, abaisser l’âge de la majorité
pénale de 18 à 16 ans, et suspendre les aides sociales pour les parents de
mineurs délinquants et criminels.
Pour Yannick Jadot, priorités à la justice des mineurs et à une politique d’accompagnement social et psychologique
« Il
n'y a pas de démocratie sans justice » martèle Yannick
Jadot. Considérant la Justice comme un « pilier
de notre République », le candidat écologiste estime qu’aujourd’hui,
« rendre justice est devenu une
épreuve impossible en France. Notre démocratie souffre des conditions indignes
dans lesquelles travaillent les magistrat.e.s greffier.e.s et les avocat.e.s. »,
commente-t-il. Il l’affirme sans détour : « nous ne dépensons pas assez dans la Justice ». Pour répondre à
ce manque de moyens, le candidat promet une augmentation d’un milliard d’euros
du budget de la Justice sur cinq ans. Cela permettrait, selon lui, de recruter
3 000 magistrats et 8 000 agents des tribunaux.
Yannick Jadot entend également mettre fin à toute
ingérence politique dans les affaires judiciaires en garantissant
l’indépendance des parquets, et s’engage à supprimer la Cour de justice de la
République au profit d’une juridiction de droit commun. Dans sa course à
l’Élysée, le candidat révèle vouloir réformer l’École Nationale de la
Magistrature en modifiant les conditions de présentation aux concours et en
supprimant le classement de sortie. « Nous
installerons l’échevinage dans les tribunaux de commerce, au lieu de formations
uniquement composées de juges consulaires », ajoute le candidat des
Verts.
Celui qui porte le projet de « remettre l’État au service de la Nation »
redessinerait également, s’il est élu, la carte judiciaire et créerait un
service public gratuit de la médiation et de la conciliation. « Nous renforcerons l’aide aux victimes
en augmentant la présence d’intervenant.e.s sociaux dans les commissariats et
gendarmeries et en augmentant le soutien financier aux associations d’aide aux
victimes agréées » soutient-il. S'il aspire à « Changer la France pour vivre mieux », comme l’assure son
slogan de campagne, Yannick Jadot entend aussi généraliser l’action de groupe.
L’actuel député européen érige la justice des
mineurs comme une priorité : « Nous déploierons une justice des
mineurs centrée sur l’éducation, le soin, et une réelle protection de l’enfance.
Nous élaborerons un Code de l’enfance dans lequel enfance délinquante et
enfance en danger ne seront pas dissociées. Les mesures alternatives –
notamment les mesures éducatives en milieu ouvert –, seront privilégiées à
l’enfermement et les centres éducatifs fermés seront supprimés. Plus de moyens
seront accordés à la Justice des mineurs, aux Juges des Enfants et aux services
sociaux, et 20 000 postes d’éducateurs spécialisés, d’assistants sociaux
et de psychologues seront créés dans le cadre d’un plan d’urgence pour
l’éducation et la prévention ».
Coté écologie, l’ancien directeur des
campagnes de Greenpeace France porte la création d’une police de
l’environnement et d’un pôle environnement au sein des parquets de tous les
tribunaux judiciaires, composés d’au moins trois magistrats formés.
Concernant le milieu carcéral enfin, Yannick
Jadot vise à favoriser la réinsertion et à réduire la criminalité et la
récidive. « Nous procéderons à une
révision générale des peines, en réexaminant notamment les peines de prison de
courte durée au regard des dispositifs de travaux d’intérêt général et des
peines alternatives. Nous donnerons aux juridictions d’application des peines
et aux services pénitentiaires d’insertion et de probation les moyens pour une
politique d’accompagnement social et psychologique », déclare-t-il.
Élu à la tête de l’État, le candidat du Parti
communiste français (PCF) prévoit de lancer un « grand plan de
sauvetage de la Justice », avec la mise en place d’une « profonde réforme » menée dans le
cadre d’États généraux, qui inclura notamment la simplification des procédures
pénales et civiles.
Pour garantir l’indépendance des magistrats,
l’actuel Conseil supérieur de la magistrature sera également remplacé par un
Conseil supérieur de la justice ; le « “verrou de Bercy” sera en outre supprimé, afin que la justice puisse
poursuivre les fraudeurs fiscaux, sans avoir à obtenir l’autorisation préalable
du ministère des Finances », précise le candidat dans son programme.
Concernant l’effort de recrutements, Fabien
Roussel note dans son programme vouloir doter la justice et l’accompagnement
des mineurs de 25 000 magistrats, éducatrices et éducateurs.
L’institution carcérale fera également l’objet
« d’un effort particulier, afin d’en
renforcer les moyens et de la rendre plus humaine ». Le candidat du
Parti communiste français compte également lancer un « plan de
recrutement et de renforcement de la formation des personnels de
surveillance » et déployer des conseillers d’insertion et de
probation. Dans le même temps, les droits des personnes détenues seraient renforcés, afin que l’exécution des peines favorise les réinsertions.
À la construction de nouvelles prisons, Fabien
Roussel préfère les alternatives à l’incarcération. Un plan de rénovation
des lieux de privation de liberté sera malgré tout mis en œuvre. Défendant le
droit des étrangers « soumis
aux mêmes règles de droit que tout justiciable », Fabien Roussel
s’engage à fermer les centres de rétention administrative (CRA) comme les zones
d’attentes dans les ports et les aéroports « qui
retiennent des personnes étrangères aux frontières ». La détention
préventive sera en outre limitée, notamment pour les délits et infractions
relevant des tribunaux correctionnels. L’enfermement des jeunes de 13 à 16 ans
sera supprimé et celui des 16 à 18 ans sera limité, précise-t-il.
Le candidat du PCF se positionne enfin comme
le candidat des droits des victimes, précisant que les crimes sexistes et
sexuels relèveront d’une cour d’assises, et non d’un tribunal correctionnel. Le
candidat ajoute qu’une peine d’inéligibilité sera requise par les parquets
contre les élus convaincus de violences sexistes et/ou sexuelles
Dans son programme, la candidate socialiste défend « une
justice indépendante, respectée et qui répond aux besoins des Français » :
« Nous ne voulons plus de cette
justice qui chronomètre tout en allongeant ses délais comme l’ont dénoncé
eux-mêmes avec courage les magistrats, greffiers et auxiliaires de justice.
Notre pays n’est à la hauteur ni des enjeux ni des attentes de nos concitoyens
ou des personnels de justice », fustige l’actuelle maire de Paris. En
réponse, Anne Hidalgo propose l’adoption, dès les premiers mois du mandat,
d’une loi de programmation quinquennale, « afin de lancer un plan de
recrutement de magistrats, de greffiers et de travailleurs sociaux (éducateurs
de la protection judiciaire de la jeunesse, conseillers pénitentiaires
d’insertion et de probation, psychologues…). Une attention particulière sera
portée à leur environnement de travail : équipements, ressources numériques,
bâtiments », promet-elle. La candidate propose dans un premier lieu d’allouer
plus de moyens pour améliorer la justice du quotidien. Concernant
l’indépendance de la justice, Anne Hidalgo ambitionne de donner au Conseil
supérieur de la magistrature la compétence par un pouvoir d’avis conforme sur
toutes les nominations des magistrats du parquet, comme il le fait déjà pour
les magistrats du siège.
L’actuelle maire de Paris est également pour une « sanction qui éduque » :
« Le tout-carcéral est un échec »,
assure celle qui souhaite « incarcérer
mieux en diversifiant les modalités en fonction des profils pénaux ». La candidate socialiste souhaite ainsi procéder à une évaluation
et un accompagnement de toutes les personnes incarcérées, grâce à un
renforcement substantiel des services d’insertion et de probation en même temps
que le comblement des vacances d’emplois dans la pénitentiaire. « Nous recourrons davantage aux alternatives à
l’incarcération qui seront de vraies sanctions, efficaces et mises en œuvre
avec célérité : liberté surveillée, placement sous surveillance électronique,
travail d’intérêt général, amendes, etc. Cette nouvelle politique contribuera à
garantir la dignité des conditions de détention et le respect de
l’encellulement individuel qui bénéficiera également d’un plan de construction
afin de renouveler le parc pénitentiaire. »
Au programme
également : la formation des policiers, des gendarmes et des magistrats,
la présence d’assistantes sociales dans les commissariats et les gendarmeries,
des sanctions pénales aggravées.
Plaçant
« la Justice avant le droit », Jean Lassalle se positionne pour
le renforcement de la médiation dans le domaine de la justice. Il soutient à ce
titre les modes alternatifs de règlements des différends (MARD) pour développer
la négociation, la conciliation et la médiation, « existant en trop
petit nombre » selon lui. « Le médiateur, tout en désengorgeant la
justice, apporte une réponse non violente et non juridique à bien des conflits
en restaurant le lien humain et en réparant le tissu social », assure le
fondateur du mouvement Résistons ! Le candidat entend également augmenter
le nombre de magistrats effectifs dans les tribunaux, en organisant autrement
leur recrutement et leurs détachements, à hauteur d’un tiers des promotions par
concours et deux tiers par passerelle (sur concours 3? voie et/ou dossier),
réservée à des praticiens des professions judiciaires ayant au moins quinze ans
de pratique.
Élu à la tête de l’État, l’ancien maire de
Lourdios-Ichère lancerait un plan de construction de prisons, afin de garantir l’application des peines et
le respect des conditions d’hygiène/sécurité. « Elles devront être à
taille humaine. Les TGI pourraient y contribuer, permettant de préparer une
éventuelle reconversion », précise-t-il dans son programme.
Pour mieux former les détenus et préparer leur reconversion, Jean Lassalle estime
que la « formation en prison doit faire l’objet de partenariats plus
importants avec le monde professionnel ».
Dans sa course à l’Élysée, le député des
Pyrénées-Atlantiques souhaite également améliorer le dispositif de l’aide
juridictionnelle, sans donner plus de détails.
Jean Lassalle se positionne enfin pour la
suppression de la Cour de Justice de la République, et placerait ainsi les
ministres sous le coup de la justice ordinaire.
Candidat pour la troisième fois à la
présidentielle, Nicolas Dupont-Aignan affirme dans son programme vouloir
allouer à la Sécurité et à la Justice 5 milliards d’euros par an sur la période
2022-2027, « soit une hausse du
budget de 17 % par an », précise-t-il.
À la tête de la France, le candidat de Debout
la France se prononce pour la restauration des peines planchers, et aspire
à sanctionner plus fortement la récidive en étendant la définition de la
récidive afin s'elle inclue toutes les infractions, et en supprimant notamment,
dans ce contexte, les aménagements de peines.
Pour les victimes, l’ancien maire d'Yerres prévoit
d’instaurer un véritable « statut des victimes », afin de garantir
leurs droits (accueil, dépôt et suivi de plainte, soutien psychologique,
modalités d’obtention des réparations, etc.) et de créer un statut de
« victime en danger », en guise de complément de l’ordonnance de
protection.
Comme bon nombre des candidats à l’élection
présidentielle, l’actuel député de l’Essonne promet également d’augmenter le
nombre de magistrats et de greffiers, sans communiquer de chiffres précis.
Côté magistrature, Nicolas
Dupont-Aignan souhaite enrichir la formation menée à l’École Nationale de la
Magistrature d’un stage obligatoire dans une association d’aide aux victimes, renforcer
la formation dans les domaines de l’éthique, la déontologie, l’environnement
socio-économique, mais aussi instaurer un véritable contrôle professionnel des
magistrats en établissant une carte judiciaire de la France avec plusieurs
indicateurs (délais de traitement des affaires, nombre de dossiers en attente,
etc.), et en mettant en place des bilans pour chaque tribunal. Toutes ces
informations devraient pouvoir être consultées par les citoyens, explicite-t-il. Pour
« assurer la neutralité politique
des magistrats », le candidat propose de supprimer les syndicats et de
les remplacer par des associations professionnelles.
Nicolas Dupont-Aignan s’empare également de la
problématique des délais de jugement et s’engage, « à la fin du quinquennat, [à ce que] les affaires civiles,
commerciales, prud’homales et administratives soient définitivement jugées en
moins d’un an ». Comment ? Objectif : simplifier le Code pénal
et le Code de procédure pénale « afin
de les rendre compréhensibles par les citoyens, plus maniables pour les forces
de l’ordre et de rendre plus rapides les décisions de justice », mais
aussi faire revenir la majorité des magistrats actuellement en
administration centrale dans les cours et tribunaux, ou encore simplifier le travail des avocats (en « débarrassant » la profession des
aspects bureaucratiques, et en supprimant la TVA des honoraires pour les
dossiers non professionnels).
Concernant le milieu carcéral enfin, NDA projette
la construction de prisons et la création de 40 000 places, pour favoriser
la dignité et la sécurité des conditions de détention. Il aspire à en faire un
lieu « systématique et efficace de
réhabilitation », et entend à ce titre développer le travail et
l’instruction en prison pour faciliter la réinsertion des détenus.
Autres propositions : rendre accessible
l’information des publications des condamnations sur un site officiel du
ministère de la Justice consultable « pour
ceux ayant à les connaître », créer un secrétariat d’État en charge de
l’application des peines, renégocier la Convention européenne des droits de
l’homme et la Charte des droits fondamentaux de l’UE et ne pas appliquer de
façon obligatoire la jurisprudence de la CJUE et de la CEDH, faire primer la
loi sur toute convention, directive, règlement ou jurisprudence antérieurs, développer
les travaux d’intérêt général pour des faits mineurs, ou encore renforcer les
moyens de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse.
Pour cette troisième campagne présidentielle,
la candidate de Lutte ouvrière, Nathalie Arthaud, n’a formulé aucune
proposition concrète concernant l’institution judiciaire, tout comme LE candidat
du Nouveau parti anticapitaliste, Philippe Poutou.
Constance Périn
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