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Le cahier n° 34 d’octobre 2017 de l’Académie des sciences techniques comptables et financières est consacré aux préjudices économiques. Divisé en trois parties (anticipation ; identification, évaluation et gestion du conflit), l’ouvrage a pour objectif « de rappeler les fondements juridiques du processus et permettre à l’entrepreneur d’orienter son action selon la progression du litige rencontré et l’éventuel préjudice constaté ». William Nahum, président fondateur de l’Académie et président du cabinet WNAP, explique la démarche qui les a guidés, lui et les membres du groupe de travail.
Au cours de mes expériences professionnelles j’ai constaté, que d’une façon générale, les entreprises, y compris les grandes, n’étaient pas préparées à faire face aux demandes en vue d’être indemnisées ou encore à évaluer convenablement le préjudice subi. Souvent, c’est l’avocat qui fait la démarche de solliciter l’intervention d’un expert-évaluateur. J’ai souhaité que l’Académie contribue à pallier le manque de préparation des entreprises à cette évaluation bien spécifique.
Où se situe le rôle de l’expert-comptable dans ce domaine des préjudices économiques ?
L’expert-comptable, lorsqu’il intervient comme évaluateur, se place auprès de l’équipe constituée de représentants de l’entreprise (juriste, technicien, comptable…), d’avocat(s) et éventuellement d’experts techniques. L’expert-comptable a la charge de constituer un dossier complet et probant pour venir en appui des réclamations. Ce travail est crucial, car ce dossier contribuera à convaincre le juge.
L’évaluation du préjudice économique est laissée à l’appréciation des juges du fonds. Quelles en sont les conséquences ?
Comme en toutes matières, le juge reste seul juge ! Et cela est normal. En revanche, les parties en présence et l’évaluateur en particulier, doivent présenter un dossier avec une évaluation raisonnable, convaincante, complète et appuyée d’éléments probants issus de la comptabilité ou d’autres sources économiques sérieuses vérifiables.
Pourquoi cette évaluation est peu traitée en droit français ?
Souvent les entreprises trouvent un arrangement à l’amiable, mais je constate après plus de 20 ans de pratique que les entreprises recourent, me semble-t-il, plus souvent à la justice y compris pour des enjeux que l’on pourrait juger de modestes tel par exemple un médecin dont le téléphone était en panne pendant une semaine et qui m’a demandé d’évaluer son préjudice de fait des rendez-vous manqués. C’est ce que j’ai fait !
Pensez-vous qu’il faut encadrer l’évaluation du préjudice économique ? Avec un barème et un plafond par exemple ?
Non, le préjudice doit être séparé intégralement et chaque cas est différent. C’est du sur-mesure qu’il faut, d’où la nécessité de recourir à des experts spécialisés.
Comment anticipe-t-on un conflit ?
Le contrat est important. Plus il est précis et prévoit toutes les difficultés qui pourraient survenir et leurs solutions, plus l’entreprise est préparée. En outre, l’entreprise à la suite d’un contrat, d’une transaction quelconque devrait définir les possibilités d’incidents préjudiciables et les moyens d’y faire face, pas uniquement techniquement, mais aussi économiquement. C’est de la gestion des risques.
Comment déterminer le préjudice lorsque l’entreprise y est confrontée ? Quelle utilité ?
Déterminer le préjudice nécessite souvent l’intervention d’un technicien : architecte, ingénieur, médecin… Puis celle d’un évaluateur économique le plus souvent expert-comptable. L’utilité est bien sûr de définir le montant de la réclamation et de la réparation qu’on souhaite obtenir du juge.
Pourriez-vous à titre d’illustrations nous donner quelques exemples de préjudices que vous avez évalués ?
J’ai évoqué le cas du médecin privé de téléphone. Mais j’ai eu à connaître de nombreux « scénarios » qui se distinguent tous des uns des autres : un jeune sportif décédé promis à une belle carrière, une contrefaçon d’un produit de luxe, un terminal portuaire neuf, mais défectueux, les travaux d’une société de transport ayant causé des dégâts dans un commerce ou encore des pratiques anticoncurrentielles ou de dénigrement… La liste est longue tellement les cas sont nombreux et différents.
Propos
recueillis par Victor Bretonnier
Le cahier numéro 34 est librement téléchargeable sur le site de l’Académie www.lacademie.info/
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