Femmes sans-abri : « cachez ce mal que je ne saurais voir »


vendredi 18 octobre 20243 min
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Pendant dix mois, entre décembre 2023 et septembre 2024, la délégation aux droits des femmes du Sénat s’est penchée sur la situation de ces femmes invisibilisées. Elle a entendu plus d’une cinquantaine de personnes pour parvenir à un rapport d’information adopté le 8 octobre dernier. Ampleur du phénomène, violences systématiques,... Retour sur la réalité du sans-abrisme des femmes en 7 faits et chiffres marquants.  

  • De plus en plus de femmes et d’enfants à la rue  

Chaque soir, environ 3 000 femmes et près de 3 000 enfants sans abri passent la nuit dans la rue. Les femmes représenteraient actuellement 10 à 15 % des personnes dormant dans la rue, contre seulement 2 % il y a 10 ans. « On les voit peu, mais elles sont de plus en plus nombreuses. C'est inédit et historique », souligne la sénatrice Anne Evren, rapporteure du texte. « À l'époque de la création du Samusocial, on n'imaginait pas une seule seconde qu'une femme pouvait rester à la rue. Et a fortiori, aucun enfant n'y était laissé ». 

  • 120 000 femmes sans domicile fixe 

Si dans l'imaginaire collectif, les personnes sans domicile sont souvent perçues comme des hommes, plutôt âgés, souvent très désocialisés ; en réalité, 40 % des personnes sans domicile hébergées par l’Etat sont aujourd'hui des femmes, soit environ 120 000 personnes en France. Et parmi elles, une majorité de femmes migrantes. En 2012, plus de la moitié des femmes sans domicile déclaraient être nées à l’étranger.  

  • « 100 % des femmes ont subi un viol »

La quasi-totalité de ces femmes a subi des violences physiques et sexuelles dans la rue. « Au bout d’un an passé à la rue, 100 % des femmes ont subi un viol, quel que soit leur âge, quelle que soit leur apparence. Pour elles, c’est un trauma parmi d’autres », selon Aurélie Tinland, médecin-psychiatre à l’AP-HM, auditionnée dans le cadre du rapport.  

  • 15 % ont perdu leur logement à la suite de violences intrafamiliales 

Parmi les femmes sans domicile nées en France, plus d’un tiers ont été victimes de violences dans leur enfance et 1 femme sur 4 a connu un passage par l’Aide sociale à l’enfance (ASE). En outre, 15 % ont perdu leur logement à la suite de violences intrafamiliales. Ces différentes catégories pouvant bien sûr se recouper.  

  • Un hébergement amical qui ne l’est pas

D’amical, cet hébergement n’en a que le nom. Il désigne un logement octroyé en échanges de services sexuels et/ou domestiques que les femmes sans domicile, très exposées à la traite d’être humain et à la prostitution, se voient proposer.  

  • Jamais prioritaires pour un logement d’urgence

Si les femmes ont longtemps bénéficié d’une meilleure protection institutionnelle que les hommes, ce n’est plus le cas. En Île-de-France, pour être classée prioritaire dans l’attribution d’un hébergement d’urgence, il faut être soit une femme victime de violence, soit être enceinte de plus de six mois, soit avoir un bébé de moins de 3 mois. « Avec un bébé de plus de 3 mois, vous n’êtes pas prioritaire », s’indignent les rapporteures du texte. Le rapport estime à 10 000 le nombre de places d’hébergement nécessaire pour garantir une prise en charge immédiate de ces femmes et familles.  

  •  L'hôpital comme refuge 

Tout au long de l’année, entre 30 et 40 femmes enceintes ou avec un nouveau-né sont hospitalisées, faute de solution d’hébergement, dans des maternités franciliennes qui mobilisent des lits pour ne pas les remettre à la rue. À la maternité Delafontaine à Saint-Denis, « environ 25 femmes et une dizaine d’enfants sont mises à l’abri dans le hall de l’hôpital chaque soir, et encore davantage dans le cadre du plan Grand Froid ».  

Delphine Schiltz

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