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En dépit du succès des influenceurs,
l’activité n’est toujours pas encadrée par des dispositions dédiées. Pourtant,
ce n’est pas pour autant que le droit ne trouve pas à s’appliquer, et que des «
bonnes pratiques » n’existent pas en la matière, ont rappelé récemment les
spécialistes intervenus à l’occasion d’un colloque organisé par l’association
étudiante AMP CEIPI.
Léna Situations, Caroline Receveur, Norman… Les influenceurs ont envahi
les réseaux sociaux et s’imposent comme les alliés indispensables des marques,
lesquelles n’hésitent plus à les solliciter pour mieux atteindre leur cible. Du
micro-influenceur au « top tail » qui capte des millions de
followers, « prescripteurs » rémunérés pour faire usage de leur
potentiel de recommandation et parfois de leur popularité, ils essaiment dans
tous les domaines : lifestyle, beauté, luxe, tourisme, sport, mais aussi
fooding, business, science ou encore politique.
Si ces ambassadeurs d’un nouveau genre font parfois des envieux,
l’association étudiante AMP CEIPI s’est intéressée de près à un pan moins
« sexy » de ces activités : leur encadrement juridique. « Quand
le phénomène de l'influence marketing est apparu, les agences de communication
et les annonceurs ont rapidement été confrontés à toute une série de questions »,
souligne Gaëlle Loinger-Benamran, conseil en propriété industrielle et
co-fondatrice du cabinet Taoma partners (société pluri-professionnelle
d’exercice réunissant des avocats et des conseils en propriété industrielle),
lors du colloque qui s’est tenu à Paris en octobre. Des questions qui
continuent de se poser aujourd’hui encore, car malgré la professionnalisation
croissante des leaders d’opinion, l’activité n’est pas encadrée par la loi –
sauf, depuis peu, pour les enfants influenceurs.
Prestataire, mannequin, etc. : quel statut
pour quelle relation ?
Premier problème : l’influenceur ne dispose pas d’un statut
juridique propre. C’est donc dans les statuts existants que va être identifiée
sa relation avec la marque. En résumé, l’enjeu est de savoir s’il est lié par
un contrat de travail ou bien par un contrat de prestation de service, car de
cette distinction découleront des conséquences importantes en termes de
Sécurité sociale et d’imposition (nous y reviendrons), sans compter que, dans
le cas d’une prestation de service, l’influenceur devra s’immatriculer au
Registre du commerce et des sociétés et disposer d’un numéro SIRET, obligatoire
pour émettre des factures.
Déterminer
son statut va en réalité dépendre de la prestation envisagée, indique Barbara
Desforges, juriste au sein de l'agence de communication McCann. Mais la plupart
du temps, l’influenceur sera un prestataire de service : on va lui
demander de créer un contenu (vidéo, image ou article) qui met en scène le
produit de l’annonceur. Plus précisément, il s’agit là d’un contrat de louage,
prévu par l’article 1779 du Code civil, qui donne lieu à facturation.
Sachant que si l’image de l’influenceur est utilisée, alors le contrat doit
aussi prévoir une cession de droit à l’image, et si l’annonceur veut reprendre
le contenu sur ses propres réseaux sociaux, là encore une cession de droits
doit être envisagée. « Ce type de contrat a l’avantage de permettre une
certaine indépendance, sans lien de subordination avec l’annonceur »,
commente Barbara Desforges, contrairement à l’influenceur salarié, qui se
trouve dans le cadre d’un contrat de travail.
L’influenceur
peut aussi être artiste interprète, s’il joue un rôle, une petite scène, un
personnage. Ici, il y a présomption de contrat de travail ; pas de droits
à l’image, mais des « droits voisins », ceux accordés aux artistes
pour protéger leur prestation.
Enfin, il peut avoir le statut de mannequin, selon
la définition légale, c’est-à-dire que si la personne est amenée à être filmée,
elle est considérée comme mannequin, même si elle n’exerce pas cette
profession. Les critères sont en fait la présentation au public en utilisant la
reproduction de l’image à des fins publicitaires. Là encore, via la présomption
de contrat de travail, l’influenceur est salarié. Petite spécificité : en
France, les agences de mannequins ont un monopole de mise à disposition. Il
n’est donc pas possible d’embaucher un influenceur-mannequin directement, il
est nécessaire de passer par l’agence qui l’embauche. Et si l’influenceur n’est
pas déjà mannequin, il va donc falloir trouver une agence qui puisse
l’accueillir, via un mandat de représentation. Sur ce point, Barbara Desforges
recommande d’être « prudent sur le choix de l’intermédiaire ».
En effet, les leaders d’opinion sont aujourd’hui de plus en plus représentés
par des agences d’influenceurs, « très tentantes, car elles
sélectionnent et identifient spécifiquement les influenceurs », mais
qui ne sont pas encore encadrées juridiquement. D’ailleurs, la juriste estime
que les agences d’influenceurs pourraient constituer une forme de concurrence
déloyale pour les agences de mannequin. Cela dit, pour l’heure, ces dernières
ne semblent pas encore être montées au créneau.
Le cas des influenceurs à Dubaï : quelle
fiscalité ?
Comme évoqué
précédemment, identifier la nature juridique de la relation va s’avérer une
étape essentielle pour déterminer les modalités d’imposition des revenus de
l’influenceur. Car qui dit prestation et flux financiers – parfois importants –
dit aussi impôts. Pour Stéphanie Maury, avocate et co-fondatrice du cabinet
d’affaires LDEIS, il est donc « impératif, au démarrage de la relation,
d’anticiper cela et de déterminer où se trouve le domicile fiscal de
l’influenceur, pour connaître ses obligations ». Sur ce point, le
sujet des influenceurs qui partent s’installer à Dubaï, l’eldorado à la mode,
semble particulièrement d’actualité. « La question centrale ici est la
domiciliation fiscale : tel influenceur est-il fiscalement domicilié en
France ou non ? » synthétise l’avocate.
L’influenceur sera en effet fiscalement domicilié en France à partir du
moment où il remplit au moins un critère sur les trois prévus par le Code
général des impôts. Soit un critère d’ordre personnel (foyer ou lieu de séjour
principal en France : dès qu’il passe plus de 183 jours sur le territoire
français, il sera considéré comme fiscalement domicilié en France – ce qui ne
signifie pas forcément qu’il doit avoir une adresse fixe, puisqu’il peut
résider 183 jours à l’hôtel). Soit un critère d’ordre professionnel, lié à son
activité principale : à ce titre, « un influenceur qui réaliserait
de nombreuses prestations sur le territoire français, notamment qui y
enregistrerait ses posts, ou qui serait associé à de nombreuses marques
françaises, constituerait autant de critères de rattachement pour une
domiciliation fiscale en France ». Soit un critère d’ordre
économique : dès lors qu’un influenceur a le centre de ses intérêts
économiques en France, il sera considéré comme étant fiscalement domicilié en
France.
Conséquence, un influenceur qui peut avoir vocation à percevoir des
revenus provenant de multiples pays, en raison des contrats qu’il pourrait
conclure, verrait ses revenus imposés intégralement sur le territoire français
dès lors qu’il serait rattaché au domicile fiscal. Par ailleurs, si un
influenceur partage sa vie entre plusieurs pays, il est susceptible d’y avoir
également son domicile fiscal selon les législations en question, et donc
d’être doublement, voire triplement imposé. D’où l’utilité des conventions
fiscales internationales ayant pour objet de limiter ces doubles impositions.
Malgré tout, face à cette obligation fiscale lourde, à partir du moment où il
est résident fiscal français, un influenceur peut être tenté de transférer son
domicile fiscal en-dehors du territoire français. Cependant, « transférer
son domicile fiscal n’est pas sans conséquences », avertit Stéphanie
Maury, puisque les influenceurs peuvent être concernés par l’exit tax,
qui vise à dissuader les contribuables à s’exiler pour des raisons fiscales, et
entraîne la taxation des plus-values latentes. Toutefois, « cela ne
concerne pas l’influenceur qui vient de se lancer, mais ceux qui ont déjà une
activité très structurée et possèdent un certain patrimoine », nuance
l’avocate.
Quel que
soit le domicile fiscal, « c'est la nature du revenu qui pilote la
qualification fiscale », selon la prestation que réalise le leader
d’opinion, ses revenus vont pouvoir être identifiés comme des revenus perçus
par un artiste interprète, un mannequin, etc., et être potentiellement considérés
comme des salaires. Il peut aussi s’agir de revenus de droits voisins
d’artistes interprètes ou des revenus de droits d’auteurs. En tout cas, sont
des revenus de source française ceux pour lesquels l’État français considère
que, quand bien même le bénéficiaire des revenus n’est pas fiscalement
domicilié en France, il doit verser des impôts sur ces revenus. « Ce
faisant, le législateur a voulu imposer l’ensemble des produits des
contreparties financières à des opérations réalisées sur le territoire français »,
indique Stéphanie Maury.
Deuxième versant à ces revenus de source française : sont visés
les revenus selon qu’ils sont versés par un débiteur fiscalement domicilié ou
établi en France. Dès lors qu’existe ce rattachement au territoire français,
les contribuables qui les perçoivent vont avoir l’obligation de réaliser une
déclaration à l’impôt sur le territoire français. « Mais est-ce qu’on
peut raisonnablement penser que tous les contribuables fiscalement domiciliés à
l’étranger vont forcément penser à remplir une déclaration d’impôt sur le
revenu en France ? Rien n’est moins sûr ! » plaisante
l’avocate. C’est pour cette raison que le législateur fiscal a pensé à un
correctif, le fameux dispositif de retenue à la source : « Pour
être certain que les impôts soient bien versés, il déplace l’obligation sur les
épaules du débiteur des revenus. »
Il existe plusieurs dispositifs de retenue qui peuvent concerner nos
influenceurs à Dubaï. Par exemple, le législateur demande à tout débiteur de
droits d'auteurs de faire une retenue à la source à hauteur de 26,5 %.
« Ce qui n’est pas anodin, puisqu’il s’agit du taux d’impôt sur les
sociétés applicable sur le territoire français », précise Stéphanie
Maury. Ce taux peut d’ailleurs être porté à 75 % lorsque le bénéficiaire
des sommes est domicilié dans un pays dit « à fiscalité privilégiée »
qui apparaît sur une liste dressée par l’administration fiscale – toutefois, de
nouveau, un mécanisme est prévu dans certaines conventions fiscales
internationales pour éviter cette retenue à la source.
Un encadrement pour limiter les dérapages
Bien que des
règles trouvent donc à s’appliquer, face à ce que certains qualifient de
« vide juridique », le contrat peut régir la prestation et protéger
les parties. Or, si les grands groupes sont rodés à ce formalisme, le domaine
de la publicité fourmille de petites et moyennes agences sans service
juridique, qui ont recours à des modes de communication assez souples, et avec
lesquelles les opérations sont nouées rapidement, parfois par mail ou
simplement à l’oral. Dans le même temps, « de nombreux influenceurs
“amateurs” n’ont pas toujours les ressources pour étudier un contrat, se faire
conseiller, et sont réticents à ce qu’un contrat prenne place dans la relation »,
rapporte Alain Hazan, avocat et co-fondateur du cabinet Taoma partners, qui
considère cependant cette étape « indispensable » pour qu’il
n’y ait pas de mauvaise surprise.
Reste à
savoir ce que l’on met dans ce contrat. « Puisqu’il n’existe pas de
contrat tout prêt d'influenceur-type, il faut faire à chaque fois du
sur-mesure. On ne part pas de rien, mais d’un corpus de contrats assez
similaires. On peut par exemple puiser dans les contrats d’égérie, de red
carpet, d’endorsement, de sponsoring, etc. » détaille Alain Hazan,
puis encadrer le contenu via une clause listant les obligations à la charge de
l’influenceur : poster du contenu à une date précise, le laisser pendant
une durée particulière…
D’autres obligations peuvent venir s’ajouter, en particulier pour
limiter les risques réputationnels pour l’entreprise. En effet, un influenceur
qui représente une marque peut déraper, en tenant des propos ou en adoptant des
comportements inadaptés. À l’instar du youtubeur américain Logan Paul, alors
suivi par 15 millions de personnes qui, en 2018, avait posté sur YouTube une
vidéo dans laquelle il filmait le cadavre d’une personne qui venait de se
suicider. Cette séquence avait eu le temps d’être visionnée 10 millions de
fois avant d’être supprimée. Et bien que le youtubeur ait agi ici en-dehors du
cadre de son contrat, cela n’a pas manqué de porter un coup à la réputation des
marques pour lesquelles il travaillait – et pas des moindres ; Pepsi et
Disney en tête. La même année, l'instagrameuse koweïtienne Sondos al-Qattan,
célèbre pour ses tutoriels de maquillage, avait critiqué de nouveaux
amendements qui permettaient une amélioration des conditions de travail pour
les migrants philippins, en déclarant sur les réseaux sociaux qu’il était
normal qu’un employeur puisse conserver les passeports de son personnel de
maison. Face au tollé général, et par peur d’être arrosées, plusieurs marques,
comme Mac Cosmetics, ont rapidement mis fin à leur relation contractuelle. La
personnalité de l’influenceur est donc « quelque chose contre lequel il
faut se prémunir », insiste Alain Hazan, qui pointe que cela n’est
toutefois « pas quelque chose de nouveau », puisqu’au début
des années 2000, bien avant l’émergence des influenceurs, des photos du
mannequin Kate Moss en train de consommer de la cocaïne, parues dans un
tabloïd, lui avaient fait perdre plusieurs contrats publicitaires. « Quand
on associe sa marque à une personne, on s’embarque dans une association dans
laquelle l'image de la marque peut vite être entachée », alerte
l’avocat.
Les dérapages peuvent également être liés aux contenus publiés sur les réseaux sociaux, parce qu’ils sont illicites ; risquent de porter atteinte aux droits des tiers. Ce qui fait écho à la campagne #NoFreePhotos, lancée en 2017 par une quarantaine de photographes de mode contre des marques et des influenceurs qui utilisaient sans leur accord des photos prises lors de la fashion week, destinées à la presse. En 2019, la mannequin et personnalité publique Gigi Hadid était de son côté assignée en justice pour violation du droit d’auteur, par un paparazzi qui lui reprochait d’avoir publié sur Instagram une photo prise par ses soins, sans mentionner aucun crédit. Si la jeune femme avait supprimé la photo – qu’elle avait initialement trouvée sur Twitter – quelques jours plus tard, l’agence estimait qu’au vu de ses 43 millions d’abonnés et du million de commentaires générés par le cliché, elle en avait largement tiré profit. (La juge avait cependant jugé en l’occurrence que la violation du droit d’auteur n’était pas recevable). « Il faut toujours se méfier de la provenance des images ou des musiques contenues dans un post », rappelle donc Alain Hazan. De nouveau, « Là où les professionnels de la communication aguerris savent qu’il faut être vigilants à ne pas intégrer d’éléments protégés, on se trouve souvent face à des personnes qui n’ont pas été formées à cela et n’en ont pas toujours conscience. »
Également
avocate, fondatrice de son cabinet, Vanessa Bouchara évoque de son côté la
promotion de la contrefaçon par les influenceurs, et fait notamment allusion à
l’affaire des « fake books » (en début d’année, l’influenceuse
et candidate de télé-réalité Maddy Burciaga avait fait parler d’elle en opérant
la promotion de faux livres décoratifs Chanel sur son compte Instagram) et
celle des faux écouteurs, où l’influenceur Vlad Oltean avait été épinglé pour
avoir fait la promotion de faux AirPods d’Apple vendus trois fois moins cher.
Dans ces cas-là, « l’influenceur propose un code promo, un lien :
il intervient dans la contrefaçon et cause un préjudice direct à l’égard de la
marque », met en exergue Vanessa Bouchara, qui reconnaît néanmoins que
« la frontière entre dupe (produit similaire mais pas de la même
marque, ndlr) et contrefaçon (imitation, reproduction que l’on fait
passer pour authentique, ndlr) est parfois fine ».
Pour
anticiper ces risques, Alain Hazan recommande donc de poser, dans le contrat,
une interdiction de publicité pour les concurrents, ou de produits et services
qui ne correspondent pas à l’image de marque de l’annonceur ; ou au
contraire une interdiction de dénigrement des concurrents, avec, de nouveau,
une clause résolutoire accompagnée de dommages et intérêts si l’influenceur n’a
pas un comportement en adéquation avec l’image de la marque, ou s’il commet une
faute. Le contrat peut également prévoir une clause résolutoire avec octroi de
dommages et intérêts si l’influenceur ne respecte pas certains principes
fondamentaux, par exemple s’il se livre à des représentations dégradantes ou
humiliantes, ou s’il conçoit un contenu dévalorisant en raison de l’âge, du
sexe, de l’orientation, de la banalisation de la violence, et, plus largement,
s’il ne respecte pas les réglementations et recommandations en vigueur,
notamment celles issues de l’ARPP.
Vers une influence responsable : le rôle de
l’ARPP
En effet, les parties peuvent s’inspirer des bonnes pratiques de
transparence et de loyauté édictées par l’Autorité de Régulation
Professionnelle de la Publicité. « Être transparent, c’est mentionner
les partenariats, de façon explicite et instantanée », précise Mohamed
Mansouri, directeur délégué de l’ARPP. « Cela est bien sûr différent
quand des journalistes ou des blogueurs reçoivent une gamme de produits, et
sont libres d’en parler ou non, en bien ou en mal : il n’y a pas lieu
d’indiquer une relation commerciale car il n’existe pas d'engagement réciproque »,
tient-il à distinguer.
Quand un influenceur poste du contenu en échange d’une contrepartie
(cadeau, paiement, invitation à un événement…), l’association conseille donc
d’indiquer la relation commerciale à l’aide des formulations suivantes :
« en partenariat avec », « #collaboration »,
« #partenariat », « #sponsorisé par ». Elle contre-indique
en revanche l’utilisation de mots en anglais (ad, product review),
d’abréviations, ou de mentions telles que « merci à ». « Il
faut que cela apparaisse clairement au début de la vidéo, dans le titre, sur le
post », résume Mohamed Mansouri. Et les influenceurs n’ont pas
d’excuse, puisque les « stories » Instagram proposent une fonctionnalité
« partenariat rémunéré ». Le directeur délégué rappelle que le délit
de pratique commerciale trompeuse peut être puni jusqu’à deux ans
d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende.
L’ARPP, qui est composée de 800 entreprises
adhérentes, d’une dizaine de juristes spécialisés, et qui délivre environ
20 000 conseils par an, a souhaité mesurer le degré de conformité des
pratiques du marché au travers de l’Observatoire de l’influence responsable.
Pour ce faire, elle a analysé près de 30 000 contenus diffusés en 2020,
issus de 7 000 influenceurs. Des algorithmes d’intelligence artificielle
ont ainsi analysé tout un champ lexical, contenant par exemple les mots
« code promo », « j’ai été invité par », etc., et a fait
remonter des hypothèses de collaboration, pour voir si ces partenariats étaient
identifiés de façon claire et instantanée, et si d’autres règles éthiques
étaient respectées. Résultat : plus d’un partenariat sur quatre masque son
intention commerciale, et seuls 40 % sont totalement conformes. Sans surprise,
« La grosse part des manquements vient des petits influenceurs »,
souligne Mohamed Mansouri qui, à son tour, constate des lacunes sur ce terrain,
et un « enjeu de maîtrise des règles ». Sur la base de ce
constat, l’ARPP a décidé le lancement d’un Certificat de l’influence
responsable, en partenariat avec Media Institute, pour mieux accompagner les
influenceurs. Ce certificat permet de suivre une formation au cadre légal et
éthique, suivie d’un examen validé à plus de 75 % de bonnes réponses. « Les
profils certifiés sont ensuite valorisés auprès des marques et régulièrement
contrôlés », ajoute Mohamed Mansouri. À l’occasion de son
inauguration, l’association a lancé une campagne avec le média en ligne Brut,
qui a sollicité l’influenceuse Marion Caméléon afin que cette dernière dévoile
les « coulisses » de son activité et explique l’importance d’être
transparent.
Si en France, les recommandations pour une « influence
responsable » jouent donc un rôle important, Alexandra Di Maggio, conseil
en propriété industrielle au sein du cabinet Novagraaf, fait remarquer qu’en
dépit de quelques différences [par exemple, suivant les pays, les indications
varient sur l’indication du partenariat commercial : en Allemagne et en
Italie, le mot « ad » (publicité) est toléré], la plupart des pays
ont la même méthode de réponse à des questions identiques, via un ensemble de
règles souples. De nombreux codes de bonne conduite sont ainsi édictés par des
autorités administratives indépendantes « dont les pouvoirs et
l’autorité sont variables », tempère-t-elle. Ainsi, la Federal Trade
Commission, aux États-Unis, dispose d’un fort pouvoir de sanction : en
mars 2020, l’agence a infligé une amende de 15 millions d’euros à Teami,
une société commercialisant des thés aux vertus amincissantes, pour ne pas
s’être assurée que l’influenceur auquel elle avait eu recours indiquait de
façon directe le caractère commercial du message. Dans la même lignée, l’ASCI,
ou Advertisting Standards Council of India, s’avère très actif en matière de surveillance
des influenceurs : l’organisme a notamment mis en place un système de
surveillance automatique de publications avec la technologie Reech.
En tout cas,
synthétise Alexandra Di Maggio, un socle commun à tous les États existe par le
biais du Code de la chambre de commerce internationale, axé autour des
principes généraux de décence, de loyauté et de véracité. Un article sur les
communications commerciales indique ainsi que la communication doit être
identifiable, et que la finalité doit être apparente. Une règle qui n’est
« pas réservée à la problématique des influenceurs, puisqu’il s’agit de
règles de droit classique », précise-t-elle.
Bérengère Margaritelli
THÉMATIQUES ASSOCIÉES
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