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Depuis le 1er mai 2018, tous les accords d’entreprise devront être signés par un ou des syndicats représentant au moins 50 % des voix exprimées en faveur des syndicats représentatifs au premier tour des dernières élections professionnelles : il s’agit du principe de l’accord majoritaire. Initiée par la loi travail en août 2016, la règle majoritaire, qui autrefois ne servait de norme que dans certaines situations, a pour objectif de légitimer davantage la négociation collective d’entreprise. Concrètement, qu’est-ce que cela va changer ?
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L’histoire de la négociation collective en France est loin d’être linéaire. Depuis dix ans, de nombreux efforts ont été entrepris afin de donner une plus grande légitimité aux accords collectifs.
Tout a commencé le 20 août 2008 avec la loi portant rénovation de la démocratie sociale, qui a posé pour principe que tout accord collectif devait désormais recueillir, pour être valide, au moins 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections professionnelles, et ne pas faire l’objet de l’opposition de syndicats majoritaires. Avant cette loi, il suffisait qu’un seul syndicat qualifié de « représentatif », car appartenant à l’une des cinq grandes centrales historiques, signe l’accord pour que l’on considère ce dernier comme valide. Le texte de 2008 a instauré la règle des 30 % pour plus d’équité. Quant à l’accord majoritaire, il ne servait de norme que dans certaines situations : accords relatifs au plan de sauvegarde de l’emploi, accords créant une instance unique de représentation du personnel…
La loi du 8 août 2016 relative à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite loi El Khomri, a souhaité aller plus loin en faisant de la signature majoritaire la condition générale de validité des accords collectifs à venir. La mise en œuvre de ce nouveau principe devait se faire en deux temps :
• D’abord au 1er janvier 2017, l’utilisation de la règle des 50 % s’est appliquée aux accords relatifs à la durée de travail, au repos et aux congés ;
• Et à compter du 1er septembre 2019, cette règle devait être étendue à tous les autres accords (sauf exception) afin qu’à terme ce principe devienne la règle générale.
Quelques mois après son investiture, le président Emmanuel Macron a souhaité que les choses aillent encore plus vite. Le 22 septembre 2017, ce dernier a signé les cinq ordonnances réformant le Code du travail, et parmi elles, celle relative à la négociation collective (ordonnance 2017-1385 du 22 septembre 2017, JO du 23 septembre) qui a avancé la généralisation du recours à l’accord majoritaire au 1er mai 2018 au lieu du 1er septembre 2019).
Ainsi, désormais tout accord d’entreprise doit, pour être valable, obtenir plus de 50 % des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles. Et à défaut d’avoir atteint la majorité, les syndicats minoritaires qui recueillent plus de 30 % des suffrages (si les 30 % ne sont pas atteints, aucun accord ne pourra de toute façon être validé) peuvent demander à l’employeur, dans le mois suivant la signature de l’accord, d’organiser un référendum pour faire approuver le texte directement par les salariés de la société. Cet accord doit être accepté par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.
Il reste que certains accords « d’exception » ne pourront jamais faire l’objet d’un référendum au sein de l’entreprise, même en cas d’absence de signature majoritaire. C’est ainsi le cas pour les accords relatifs au plan de sauvegarde de l’emploi et pour ceux concernant le fonctionnement du comité social et économique (CSE).
L’ordonnance Macron du 22 septembre 2017 a également introduit la possibilité pour toute entreprise de conclure un nouveau type d’accord de compétitivité qui prend la forme d’un accord majoritaire simplifié. Ce dernier peut être utilisé sur les questions du temps de travail, de la rémunération et de la mobilité des salariés et a pour but de permettre aux entreprises françaises d’être plus compétitives à l’international.
En conclusion, compte tenu de la place accrue dévolue à la négociation collective d’entreprise de nos jours, et de la volonté du législateur d’augmenter la marge de manœuvre des entreprises, la signature majoritaire ne pouvait que s’imposer. Selon le ministère du Travail, une place centrale est désormais donnée à des négociations collectives « au plus près des salariés ».
Maria-Angélica Bailly
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