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Réunis mardi 7 octobre à Paris pour la première édition du concours en hommage à l’ancien ministre de la Justice, organisé par le Conseil national des barreaux (CNB), huit jeunes avocats ont défendu avec conviction leurs propositions de loi autour des libertés fondamentales. En présence d’Elisabeth Badinter.
« Le Conseil National des barreaux est heureux de vous accueillir pour cette soirée inédite et pour honorer la mémoire de l’un des plus légendaires représentants de la profession d’avocat ».
Mardi 7 octobre 2025, c’est dans le cadre majestueux de la Maison de l’Océan à Paris, fondée par le prince Albert Ier de Monaco, que s’est tenue la finale de la première édition du Prix Robert Badinter. Huit jeunes avocats ont tenté de convaincre un jury d’exception, composé notamment de Julie Couturier, présidente du Conseil national des barreaux (CNB), de Rémy Heitz, procureur général près la Cour de cassation, du député Sacha Houlié (PS) ou encore de l’académicien François Sureau et ses redoutables interventions. Tous ont défendu, avec conviction, leurs propositions de loi – fictives – en lien avec les libertés fondamentales.
Dans le public, plusieurs personnalités avaient également fait le déplacement, parmi lesquelles le tout nouveau président du tribunal judiciaire de Paris, Peimane Ghaleh-Marzban, mais surtout, prix Robert Badinter oblige : Élisabeth Badinter, épouse de l’ancien garde des Sceaux qui entre au Panthéon ce jeudi 9 octobre, venue pour l’occasion assister à la cérémonie depuis la première loge.
Une présence symbolique, qui ajoutait à la solennité de l’événement et à la pression pesant sur les huit finalistes, tous âgés de moins de 38 ans et justifiant de moins de cinq ans de pratique. Chacun s’est livré à une véritable bataille oratoire, rythmée, engagée et parfois émouvante. Au terme de ces plaidoiries d’une grande intensité, la victoire est revenue à Anina Ciuciu, avocate franco-roumaine inscrite au barreau de Seine-Saint-Denis.
Ce concours, a été lancé dès le mois de mars avec le dépôt de candidature d’une « trentaine d’avocats ». En ouverture, la présidente du CNB, Julie Couturier, a tenu à rappeler l’esprit du prix : rendre hommage à Robert Badinter et à ses combats, « au premier rang desquels se tient la lutte en faveur des droits humains, mais aussi honorer sa foi dans la profession d’avocat et dans la formidable diversité, l’incroyable ingéniosité, le talent de sa jeune garde. »
Et d’ajouter : « C’est pour ces raisons-là, pour que vive son élan envers la jeunesse, que nous avons imaginé ce prix, qui propose aux jeunes avocats de porter, en juristes, un combat politique. »
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Le ton était donné pour cette première édition à la mécanique simple mais exigeante : l’ordre de passage tiré au sort, chaque candidat disposait de six minutes pour défendre sa proposition de loi, avant un échange de trois à quatre minutes avec le jury.
Avant de laisser place aux plaidoiries, Julie Couturier a lancé les hostilités dans une salle comble : « Nos jeunes avocats ont du talent, n’en doutez pas. Il leur manquait cependant une tribune, un perchoir, un public. Le prix Robert Badinter leur offre cela, et je suis très honorée que vous soyez aussi nombreux à être venus les entendre. »
Proches, amis et familles avaient répondu présents pour encourager cette première génération du prix Robert Badinter.
Pour le premier prix, Anina Ciuciu, avocate au barreau de Seine-Saint-Denis, a porté une proposition de loi instaurant une trêve scolaire républicaine. Son objectif : suspendre l’exécution des expulsions forcées des lieux de vie précaires ou informels pour les enfants scolarisés et leurs familles, afin de garantir une continuité pédagogique tout au long de l’année scolaire. La Franco-roumaine a évoqué le cas de Maria, une petite fille vivant dans un bidonville qu’elle avait défendue « jusqu’au Conseil d’État », mais qui avait malgré tout subi une expulsion aux lourdes conséquences sur sa scolarité. Une proposition « pour que toutes les petites Maria puissent devenir avocate ou médecin comme moi », a-t-elle lancé, en écho à son propre parcours, marqué par la précarité et la clandestinité, depuis la Roumanie jusqu’à la France. Après sa victoire, l’avocate a d’ailleurs annoncé sur X que sa proposition de loi transpartisane serait « bientôt déposée à l’Assemblée nationale ».
Les deuxième et troisième prix ont été décernés respectivement à Anissa Doumi, pour sa proposition de loi visant à garantir les droits fondamentaux des personnes vulnérables confrontées à la justice pénale, et à Claire Liblanc-Neveu, dont le discours, aux accents de meeting politique, défendait la proposition DAPRÈS – pour la Dignité, l’Accessibilité aux droits en Prison et la Réduction de la Surpopulation carcérale.
Le prix Robert Badinter a récompensé les trois lauréates par une dotation de 3 000 euros pour le premier prix, 2 000 euros pour le deuxième, et 1 000 euros pour le troisième.
Mais la soirée a aussi mis en lumière les autres finalistes, dont les propositions témoignaient d’un réel engagement : Marie Coussi, avec un texte sur le renforcement de la démocratie environnementale ; Fouad Khayat, très théâtral, qui a même poussé la chansonnette en défendant la reconnaissance du sexe neutre à l’état civil ; Eva Kucharz, mobilisée pour l’encadrement des mesures provisoires de police administrative portant atteinte aux libertés ; Clément Lopez, qui plaidait pour une loi de restauration et de préservation de l’environnement informationnel ; et enfin Dimitri Riant-Marsac, idéaliste et convaincu, proposant la création d’un système universel de sécurité sociale juridique, afin que chacun puisse consulter un avocat et bénéficier d’un remboursement de frais.
Une première édition prometteuse donc, qui a su conjuguer rigueur juridique et passion civique.
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