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17 prisons dites modulaires, plus rapides à construire, doivent voir le jour un peu partout en France à l’horizon 2027. Un prototype de cellule a été présenté au Salon des maires de France, où se sont pressés de nombreux visiteurs.

« Mais il y a la télé en plus ! », s’exclame dès son entrée une visiteuse en goguette. Les clichés sur le milieu carcéral ont la vie dure, auprès des citoyens comme des élus. Ils et elles sont nombreux à attendre patiemment leur tour pour pénétrer dans cette cellule-témoin d’un nouveau genre, exposée par le ministère de la Justice au Salon des maires de France, ce mercredi 19 novembre.
Le bloc de béton, posé sur la moquette bleue d’un des pavillons de la porte de Versailles, préfigure le projet pénitentiaire de Gérald Darmanin. En avril dernier, le garde des Sceaux avait annoncé le lancement d’un programme immobilier pour le moins original pour « résorber la surpopulation carcérale » dans un contexte de disette budgétaire : les prisons modulaires. Il s’agit de prisons préfabriquées, pour ne pas dire « en kit », terme que le ministre de la Justice a encore réfuté lors d’une récente audition parlementaire.
« Il faut s’imaginer des Lego de béton qu’on pourra assembler », image Justine Gerbaud, porte-parole de la Direction de l’administration pénitentiaire, qui répond assidûment aux questions des visiteurs sur le salon. « Les cellules sont livrées aménagées. Avec le mobilier et le module sanitaire, ce qui correspond aux normes des constructions récentes. »
À l’intérieur de cette « brique de ciment », les curieux découvrent un espace ramassé de 9 m². Un frigo, un étroit sommier, un lavabo surmonté d’un petit néon et d’un miroir, un recoin toilette-douche sans porte, une très sobre étagère de béton. Au mur, ce jaune si caractéristique des administrations. À la fenêtre, deux couches de barreaux.
Pour beaucoup d’élus municipaux, cette visite est l’occasion de voir de l’intérieur un monde qu’ils connaissent peu. « Ça donne un visuel », commente Tanguy Desplanques, tombé par hasard sur cette cellule en arpentant les allées de l’événement. Le premier adjoint à la mairie de Rémy, village de l’Oise, 1 900 habitants au dernier recensement, n’a jamais eu l’occasion de mettre les pieds dans une prison auparavant. Promenant son regard à travers la pièce, il juge l’installation « plutôt confortable ».
« Ce n’est pas le Pérou non plus ! », ajoute-t-il. « Je suppose que c’est une bonne solution pour des détenus pas trop compliqués. Et une manière de résoudre des problèmes de surpopulation inadmissibles pour la dignité des personnes ».

Le maire de Réau (Seine-et-Marne), Alain Auzet, a lui aussi « jeté un œil ». « J’ai l’impression de voir une cellule de Réau, abonde-t-il. La structure est la même », détaille-t-il en connaissance de cause. Sa commune abrite depuis 2011 le centre pénitentiaire du Sud Francilien.
Le modèle d’exposition, cependant, ne fait apparaître qu’un lit sur les deux prévus. La porte-parole le confirme néanmoins : à la livraison, les cellules seront bien doublées.
17 prisons modulaires doivent voir le jour un peu partout en France d’ici 2027. Dans un premier temps, il sera question de bâtir des quartiers de semi-liberté de 1 500 places pour désengorger les maisons d’arrêt et les centres pénitentiaires. Suivra une deuxième vague de construction de 1 500 places supplémentaires.
Livrables en « 18 mois contre 4 à 5 ans » et « pour un coût divisé par 2 », peut-on lire sur les affiches de présentation collées à l’extérieur de la cellule, « ces quartiers moins sécurisés seront réalisés sur des domaines pénitentiaires existants et réservés aux détenus purgeant des courtes peines ou en fin de peine », précise encore Justine Gerbaud.

Sur la carte des 17 sites à potentiel identifiés par l’administration, le maire Saint-Quentin-Fallavier obtient confirmation que sa commune de l’Isère figure sur la « shortlist ». Mathieu Gaget est venu tout spécialement rencontrer le ministère de la Justice pour se faire un avis sur la prison modulaire.
Lui accueille « plutôt favorablement » la réalisation de ce projet d’extension bâtimentaire sur son territoire. Pas d’inquiétudes du côté de ses administrés, assure-t-il, « qui vivent avec la prison depuis plus de 30 ans déjà ». Mis en service en 1992, Saint-Quentin-Fallavier compte une maison d’arrêt, un centre de détention et un quartier de semi-liberté.
« Il faut que la justice et la République soient présentes physiquement sur les territoires et que la réponse pénale trouve des débouchés, qu’on ait plus de possibilités d’incarcération », justifie l’édile qui semble ainsi adhérer à la doctrine du gouvernement.
Interrogé au Sénat le 12 novembre dernier, le garde des Sceaux a redétaillé sa stratégie de lutte contre la surpopulation carcérale : « pour faire baisser le nombre de personnes en prison, il ne faut pas faire baisser le nombre de personnes qui y rentrent, mais le temps qu’elles y passent », a-t-il défendu devant les parlementaires.
Tout en confirmant l’avancement du projet de loi « SURE » qui proposera la fin de l’aménagement obligatoire des peines, afin d’inciter les magistrats à prononcer de courtes peines.
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