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Mercredi 19 novembre, la cour d’appel ouvrait ses portes aux avocats parisiens pour une série d’ateliers loin des audiences et des procédures. Un temps pour rassembler « la famille judiciaire », où chacun a pu bénéficier d’échanges informels autour de sa spécialité. Près de 700 avocats ont participé à l’événement.

Une fois n’est pas coutume, les couloirs de la cour d’appel sont, en ce mercredi matin, empreints d’une ambiance chaleureuse et les discussions vont bon train. Une douce odeur de café flotte dans la galerie Justitia, où avocats et magistrats partagent un petit-déjeuner. Les 35 ateliers s’apprêtent à commencer : 200 magistrats de toutes les spécialités accueillent, au sein des chambres, pas loin de 700 avocats, et toutes les spécialités sont concernées. Pôles et contentieux civil, pénal, urgences civiles, éco et commercial… Certains magistrats ont préparé des présentations, d’autres privilégient les simples discussions et les questions des participants.

S’arrêtant au pôle social, Jacques Boulard, premier président de la cour d’appel, s’adresse à la centaine d’auditeurs présents sur les bancs : « Il faut déconstruire l’idée que les avocats et les magistrats ne s’entendraient pas, et montrer que ce qui nous rapproche est plus important. » Le magistrat est applaudi par la salle. Cette « coupure » hors du quotidien semble appréciée. Au pôle VIF de Paris, « qui fonctionne très bien », on se veut « soudés entre professionnels. Au final, nous voulons tous la même chose, une justice efficace », sourit une magistrate.
Au pôle famille, les échanges semblent également avoir porté leurs fruits, surtout dans une spécialité qui souffre d’une charge de travail croissante, « car la société évolue : en 20 ans de pratique, je n’avais jamais vu une telle activité, explique une avocate spécialisée en droit de la famille. C’était donc très utile ».
L’opération « Gens de robe » est un peu l’héritière des assises avocats, magistrats, greffiers, qui avaient été lancées en 2019 par le barreau de Paris et Jean-Michel Hayat, prédécesseur de Jacques Boulard. Stéphane Noël avait lui aussi souhaité améliorer les relations entre « gens de justice » à la suite de plusieurs incidents, notamment dans le contexte de l’installation du tribunal de Paris aux Batignolles – et l’expulsion d’une avocate hors du cabinet d’un juge, par des policiers, à l’occasion d’une procédure de taxation d’honoraires.
S’il reconnaît que ces incidents arrivent, Jacques Boulard souligne ainsi l’importance de maintenir les liens d’une « même famille judiciaire », en ce jour dédié. « Dans la réalité, les relations sont plutôt paisibles, précise-t-il au JSS. A Paris, il y a six sessions assises en permanence. Rapportées aux nombres d’incidents, ces derniers sont donc limités. Les gens se connaissent, ont les mêmes valeurs. L’initiative est d’autant plus importante dans le contexte actuel, souhaite-t-il rappeler, « de remise en cause de l’Etat de droit, des droits fondamentaux et de la place du juge ».
Comprendre le quotidien de chacun pour améliorer concrètement les choses est aussi l’un des objectifs de ces ateliers, appelés à se renouveler. « Il s’agit de resserrer les liens pour gagner en efficacité. Par exemple, dans les procédures civiles, un avocat doit pouvoir comprendre qu’en envoyant mille pages de dossier en plein été, il ne peut pas s’attendre à des retours rapides et efficaces du juge qui les traitera. » Entretenir les bonnes relations entre avocats et magistrats passera aussi par le rapprochement physique du barreau de Paris. Les avocats pourront désormais avoir à nouveau accès à la cour d’appel via la rue de Harlay, où est située la Maison du barreau.

Le succès est au rendez-vous. « Madame la procureure générale, c’est un carton », se réjouit, auprès de Marie-Suzanne Le Quéau, le vice-bâtonnier de Paris Pierre Hoffmann. La procureure générale près la cour de Paris prend à son tour la parole, entre deux ateliers : « La relation magistrats-avocats est de grande qualité mais je n’ai pas pour habitude de passer sous silence les difficultés : parfois, les jeunes avocats se sentent maltraités dans le champ de l’audience (…). Nous devons d’abord rendre la justice aux justiciables, quels que soient nos métiers. Les institutions judiciaires doivent être une force dans un état démocratique. Au-delà de la buvette, il faut se parler et retrouver ce qui est important. On ne résoudra pas tous les problèmes, mais on aura fait notre part. »
Cette part, c’est aux jeunes générations qu’elle revient aujourd’hui. Avec comme futurs axes de travail le stress des victimes, ou encore la médiation, « nous serons ravis de reprendre le flambeau » et de « rassembler pour être plus efficaces », espère, à la fin de l’événement, Carine Denoit-Benteux, vice-bâtonnière élue. Il faut rendre cet espace de dialogue que l’on avait avant à nouveau possible. »
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