DOSSIER. Cartographier les VIF pour mieux les juger


mardi 16 juillet 20245 min
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Notre série "Les juridictions au diapason de la lutte contre les VIF"

Face à l'ampleur croissante des violences intrafamiliales, les juridictions françaises déploient des stratégies innovantes pour renforcer la réponse judiciaire. De la cour d'appel de Versailles, qui met en place des pôles spécialisés et des audiences dédiées, à la cartographie des zones à risque au tribunal judiciaire des Sables-d’Olonne, en passant par les audiences foraines à Saint-Denis, ces initiatives visent à améliorer la prise en charge des victimes, à adapter les peines et à renforcer la coordination entre les acteurs judiciaires. Cette série d'articles explore ces démarches et leurs impacts sur le traitement des VIF à l'échelle nationale.
  • DOSSIER. Cartographier les VIF pour mieux les juger
  • Le tribunal judiciaire des Sables-d’Olonne a mis au point un outil statistique qui permet de repérer les zones à risque et d’informer les magistrats sur le profil des auteurs de violences. Loin d’un programme prédictif dystopique à la Minority Report, ce dispositif vise avant tout à objectiver la manière dont sont jugées les VIF au sein du ressort.


    Les juridictions au diapason de la lutte contre les VIF

    -      La cour d’appel de Versailles se met en ordre de bataille contre les VIF

    -      Violences intrafamiliales : vers des ITT de 30 ans ?

    -      Cartographier les VIF pour mieux les juger

    -      Chronique d'une « audience foraine » consacrée aux violences intrafamiliales à Saint-Denis


    De juriste à cartographe, il n’y a qu’un pas pour les magistrats en charge des violences intrafamiliales (VIF) au tribunal judiciaire des Sables-d’Olonne. A l’occasion d’un séminaire organisé en mai par la cour d’appel de Poitiers, la présidente du TJ de la commune balnéaire, Emilie Rayneau, ainsi que la procureure Gwénaelle Coto, ont présenté un outil de visualisation spatiale mis en place en 2021 visant à mieux appréhender les VIF sur le ressort.

    « Nous n’avions pas assez d’éléments nous permettant de profiter d’une analyse assez fine de la façon dont les VIF étaient jugées. Nous manquions également d’informations sur le profil de leurs auteurs », explique Emilie Rayneau. Fruit d’une réflexion menée antérieurement avec Olivier Couvignon, ancien procureur, l’idée d’une cartographie nait avec la volonté d’apporter une meilleure réponse aux affaires traitées par le ressort.

    « Cette cartographie nous donne la possibilité de mieux adapter les peines et les sanctions prononcées »

    - Emilie Rayneau, présidente du tribunal judiciaire des Sables-d'Olonne

    Pensé comme un dispositif qui pourrait être déployé sur l’ensemble des juridictions de la cour d’appel de Poitiers, l’outil se prouve déjà très utile : « Cette cartographie nous donne la possibilité de mieux adapter les peines et les sanctions prononcées, notamment dans un but de prévention de la récidive. Nous l’utilisons également dans un dialogue avec nos partenaires, comme les forces de sécurité intérieures, mais également les associations d’aide aux victimes, le SPIP [service pénitentiaire d’insertion et de probation, ndlr], ou encore les élus locaux, pour essayer de lutter ensemble contre ces violences, sur le territoire », expose la présidente du TJ des Sables-d’Olonne.

    Battre en brèche les préjugés

    Pour établir la cartographie, plusieurs critères sont pris en compte, à commencer par des éléments géographiques. « Sur les 60 communes situées sur le ressort du tribunal correctionnel des Sables-d’Olonne, 68% d’entre elles sont concernées par des faits de VIF sur l’année 2023 » affiche Gwénaelle Coto. Grâce à l’identification de spots à haute délinquance, ces statistiques permettent, en accord avec les élus ou les acteurs concernés, de développer des structures appropriées à l’accueil des victimes.

    Outre cette fonctionnalité de géolocalisation des prévenus, le dispositif fournit une analyse de leurs profils. Parmi les 209 auteurs présentés devant le tribunal correctionnel en 2023, 188 étaient des hommes, et 14 auteurs étaient poursuivis dans le cadre de violences réciproques, soit 10% des profils. Le portrait démographique étonne aussi. « On pourrait croire que la tranche jeune est la plus concernée, mais c’est en fait celle des 40-59 ans qui est prédominante, à 43%, contre 39% des 25-39 ans et 7% des moins de 25 ans », révèle la procureure. De quoi battre en brèche certains préjugés.

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