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Peu de produits possèdent leur propre droit. Le vin fait historiquement exception. Aux plans national européen et mondial, les normes sont nombreuses et parfois divergentes.
I. Les origines
A. Encadrer les excédents de production
Les premières règles connues prohibent la plantation de la vigne pour éviter les périodes de surproduction et l’effondrement des prix.
En 92, l’Empereur Domitien interdit les plantations nouvelles et ordonne l’arrachage d’importantes superficies hors d’Italie.
Ultérieurement, en Bourgogne, le Gamay, cépage trop prolifique, est arraché, Philippe le Hardi lui préfère le Pinot, plus qualitatif.
Sous Louis XV, un arrêt du Conseil du Roi de 1725 fait défense de planter des vignes dans la généralité de Guyenne.
La Révolution française libéralise les plantations et à la fin du 19e siècle, la surproduction est endiguée par un nouveau fléau : le phylloxéra.
B. Garantir la loyauté
Les classements, notamment celui de 1855 à Bordeaux constituent des tentatives de réponse.
La pénurie de vin lié à la disparition de vignobles entiers atteints par la maladie, génère de multiples fraudes et l’apparition de vins artificiels.
La loi du 1er août 1905 sur les fraudes et falsifications en matière de produits ou de services met fin aux abus par la mise en place de contrôles et de sanctions.
La certitude de boire exclusivement du vin obtenu à partir de la transformation de raisin frais revient et se combine avec le besoin de garantir l’origine du produit.
Les appellations apparaissent d’abord simples puis contrôlées, issues de décisions judiciaires obtenues par des groupes de viticulteurs plaideurs et plus tard consacrés par des décrets à l’exigence croissante.
La graduation qualitative au sein des appellations est permise aux meilleurs terroirs dans une construction pyramidale avec pour certaines régions l’émergence des crus grands ou premiers.
II. L’harmonisation européenne
A. Le modèle français
Après la guerre le marché commun se construit.
En 1957, lors de la signature du principal Traité, la France dispose d’une législation très élaborée compilée dans un Code du vin allant de la gestion des droits de plantation par le biais d’un cadastre viticole jusqu’aux règles les plus précises en matière de pratiques œnologiques.
Les autres législations européennes n’atteignent pas ce degré d’achèvement.
Tout naturellement, pour les harmoniser, les organes communautaires vont s’en inspirer fortement et calquer à grand renfort de règlements et de directives la législation européenne naissante sur le modèle français.
B. L’organisation commune de marché
L’Europe est désormais dotée d’une organisation commune de marché spécifique au vin.
à partir de 1970, des règlements cadres fixent les grandes orientations en fonction de la conjoncture pour des périodes de l’ordre de 10 ans.
à compter de 2008, cette législation très précise est intégrée dans une organisation commune de marché concernant l’ensemble des produits agricoles.
Des règlements fleuves non plus horizontaux mais transversaux prennent le relais.
Tout s’y trouve défini : superficies, rendements, pratiques œnologiques, traçabilité, suivant un système interdisant tout ce qui n’est pas expressément permis, dans lequel chaque État membre est tenu de contrôler le respect des normes européennes.
Les règlements européens restreignent ou libéralisent les plantations de vignes s’efforçant de faire coïncider au mieux l’offre et la demande, et d’éviter les périodes de surproduction émaillées d’aides au stockage et d’envoi en distillation primée.
Dans ce marché ouvert, les querelles entre appellations et marques trouvent des solutions au sein d’accords bilatéraux ou multilatéraux par des concessions et la médiation des états.
III. Le marché mondial
Les vins européens vendus partout dans le monde, rencontrent la concurrence des pays dits « nouveaux producteurs » aux législations plus libérales.
Les débouchés traditionnels ne sont pas extensibles.
Michel Desilets
Avocat au Barreau
de Villefranche-sur-Saône
Ancien Bâtonnier
Vice-président de l’Association Internationale du Droit de la Vigne et du Vin, section européenne
Retrouvez la suite de cet article dans le Journal Spécial des Sociétés n° 75 du 5 octobre 2016
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