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Le Cercle Montesquieu, association des directeurs juridiques, a tenu le 5 avril 2016 son assemblée générale annuelle. A l’issue de celle-ci, le Conseil d’administration nouvellement nommé a élu en son sein le Bureau de l’association.
Nicolas Guérin, Directeur juridique groupe d’Orange, a été élu Président du Cercle Montesquieu pour un mandat de trois ans. Il prend la suite de Denis Musson, Directeur juridique groupe d’Imerys, dont le mandat était arrivé à son terme.
Nicolas Guérin, quarante-sept ans, diplômé de l’Institut de droit des affaires (IDA) et du DESS droit des affaires et fiscalité Université de Paris II Panthéon Assas, est Directeur juridique du groupeOrange depuis 2009, groupe dans lequel il avait auparavant exercé des fonctions de directeur juridique concurrence et réglementation (1998 – 2009). Il est par ailleurs Président de la Commission droit public économique et du Comité concurrence du Medef et Président du Comité d’évaluation et d’orientation de la Chaire Internationale de Droit de l’espace et des télécommunications del’Université de Paris XI.
Que retenez-vous de la présidence de Denis Musson ?
Je retiens tout d’abord des avancées significatives dans les quatre principales missions fixées par Denis Musson en début de mandat. En premier lieu, force est de constater que sous l’action du Cercle Montesquieu, l’image et la visibilité de la fonction de directeur juridique ont grandement progressé. A titre d’exemple, on peut se référer aux nombreuses publications mettant à l’honneur la profession, dans la presse spécialisée mais également dans la presse grand public (partenariat avec les Echos Business par exemple permettant la publication chaque semaine d’un article concernant un directeur ou une Directrice juridique). Des études et ouvrages sont également venus souligner l’évolution et l’encrage incontestable de nos métiers dans les entreprises. L’étude menée sous la direction d’Antoine Garapon, Secrétaire général de l’Institut des hautes études sur la Justice en collaboration entre Conventions et le Cercle Montesquieu sur « le rôle de l’entreprise et du directeur juridique dans la mondialisation du Droit » ou encore le livre d’Olivier Chaduteau intitulé « la direction juridique de demain, vers un nouveau paradigme du droit dans l’entreprise (LGDJ Editions) en sont deux excellents exemples. Sans oublier l’organisation de manifestations comme le Congrès des Directeurs administratifs et financiers et des Directeurs juridiques qui a permis incontestablement la promotion de la fonction de Directeur juridique au-delà même de la fonction juridique.
Denis Musson s’est ensuite attaché à ce que le Cercle se renforce comme lieu d’échange et de networking. Les Débats du Cercle qui viennent de se dérouler le 5 avril à Paris en sont sans doute le meilleurs exemple. Organisée avec Option Droit & Affaires, cette 5ème édition a réuni plus de 500 personnes, Directeurs juridiques et autres professionnels du Droit ou des affaires, permettant des échanges autour de thématiques comme la mondialisation et le Droit, transformer l’entreprise par le numérique, la cyber sécurité, stratégie de transformation de secteurs. Cette journée a également été l’occasion de la remise par Marc Guillaume, Secrétaire général du Gouvernement du Prix du Cercle à Jean-Philippe Robé, pour son ouvrage « Le temps du monde de l’entreprise : Globalisation et mutation du système juridique » (Dalloz) (voir Journal Spécial des Société n° 28 du 9 avril 2016). Elle a été également l’occasion de recevoir des personnalités du monde des affaires, comme Stéphane Richard, PDG d’Orange, intervenant quelques jours après l’échec du rapprochement entre Orange et Bouygues Télécom pour évoquer l’évolution du secteur des télécommunications, ou encore Xavier Caïtucoli, PDG de Direct Energie, revenant sur la création de sa société à la suite de la fin du monopole dans le secteur.
Denis Musson s’est par ailleurs assuré que le Cercle soit reconnu comme un interlocuteur de référence dans les débats sur le Droit de l’entreprise. Désormais, le Cercle est régulièrement sollicité et a pu exprimer ses positions concernant la réforme du Droit des contrats, le projet de loi numérique, la réforme du Droit du travail ou encore la révision du programme de clémence de l’Autorité de la concurrence. Fort de ses 11 commissions et s’appuyant sur le dynamisme de ses présidents et membres, le Cercle entend bien poursuivre cette action et contribuer activement à ces sujets de place.
Mais au-delà du bilan remarquable, ce que je retiens de cette présidence, ce sont les qualités personnelles de Denis Musson. Cette humanité bienveillante qu’il a mis pendant ces trois dernières années au service du Cercle Montesquieu conduisant, ainsi , toujours plus de nos collègues à le rejoindre et permettant aux membres de disposer d’un lieu convivial où l’on peut oublier ses soucis quotidiens et échanger en toute confidentialité entre pairs.
Quels sont vos principaux projets pour le cercle Montesquieu pour les trois prochaines années ?
Mon mandat s’inscrit très clairement dans le prolongement du mandat de Denis Musson que j’ai accompagné ces trois dernières années. Mon premier objectif sera clairement de consolider et assurer le succès des actions en cours. Cela passe, tout d’abord, par un fonctionnement encore plus collégial du Cercle. Pour cela, je veux m’appuyer sur une gouvernance renforcée, à savoir un bureau constitué de 5 membres, dont 3 vices-Présidentes (Anne-Sophie Le Lay, Directrice juridique de Renault, Béatrice Bihr, Directrice juridique de Teva Santé et Bénédicte Wautelet, Directrice juridique du Groupe Figaro) et d’un Secrétaire général et Trésorier (Martial Houlle, Directeur juridique de Direct-Energie), un conseil d’administration de 21 membres dont certains se verront confier un portefeuille d’activités leur permettant d’agir au nom et pour le compte du Cercle Montesquieu. Enfin, je souhaite m’appuyer sur un comité des Présidents qui pourront par leur expérience à la tête du Cercle m’apporter leur expertise.
Je sais également pouvoir compter sur le dynamisme de nos 11 commissions qui interviennent sur des thèmes très variés mais toujours au cœur des préoccupations de nos membres : Affaires Internationales, CAC40, DJ au féminin, Finance et Bourse, Gouvernance et Ethique, Industrie et Commerce, Management des DJ, Santé, Justice économique ou encore Employabilité. Un de nos objectifs sera de mieux coordonner les actions de ces commissions et de leur fournir plus de moyens pour agir. Un administrateur sera désigné, à cet effet, au sein du conseil d’administration afin de dresser une topologie des actions existantes et identifier les investissements nécessaires. Une politique de recrutement de nouveaux membres adaptée et la recherche de nouveaux modes de financement devraient l’aider dans cette mission.
Nous entendons également poursuivre les actions engagées pour faire du Cercle, un contributeur actif et reconnu concernant les sujets de place et identifier sur proposition des membres du Cercle des sujets prioritaires et consensuels qui vont permettre de réunir tous les professionnels du Droit sur des positions communes aux principaux usagers du Droit : avocats, think tank, autres associations professionnelles, et Directeurs juridiques. Chaque entreprise est amenée à défendre ses intérêts, ceux de son secteur, soit directement soit le plus souvent au sein d’associations telles que le MEDEF ou l’AFEP. Une autre voie, celle d’un consensus reposant sur l’expertise technique des professionnels du Droit, est possible. La position commune s’intéresse alors à la qualité du texte, à son utilité et à son caractère opérationnel. C’est là où les contributions du Cercle, associées à d’autres, ont une véritable valeur ajoutée, en complément de ce qui est déjà réalisé.
Une autre de nos priorités sera d’ouvrir le Cercle à l’international. Nous le faisons d’ores et déjà via des actions de la commission Affaires Internationales (cf. par exemple la conférence sur le Traité transatlantique) ou bien encore, à l’occasion d’événements ponctuels (action d’entraide au bénéfice de juristes syriens réfugiés politique en France). Nous souhaitons intensifier cette action et pourquoi pas en ouvrant des antennes dans d’autres pays européens dans lesquels nos membres ont des implantations (en cours en Espagne) ou bien en nous rapprochant d’autres associations de juristes qui interviennent au niveau international.
Une des missions du Cercle Montesquieu est de « contribuer à la formation des Directeurs juridiques de demain ». Quels sont justement les enjeux de demain pour la profession et quelles formations proposerez-vous pour y répondre ?
La formation des juristes en France est de très bonne qualité. L’Université et certaines écoles proposent des formations de très bon niveau permettant aux entreprises de disposer de juristes de grande valeur sur le plan technique
Mais le monde universitaire ne formait pas, jusqu’à présent, les juristes au métier de directeur juridique ou de manageur juridique. C’est pourquoi, après avoir développé ces dernières années une offre au travers de notre commission management, le Cercle Montesquieu a souhaité franchir une étape, et proposer, en partenariat avec Sciences Po, un master dont la vocation est de former des managers juridiques de haut niveau capables d’agir dans un environnement international et pluridisciplinaire. La première promotion de cette formation devrait voir le jour en 2017.
Nos juristes ne sont pas préparés pour devenir gestionnaires des entités dont ils ont la charge. Il suffit pour s’en rendre compte de constater les premières réactions des juristes lorsque vous mettez en place des outils comme des tableaux de bord mesurant la performance (pour ne pas dire la productivité) ou encore lorsque vous leur demandez d’évaluer les gains qu’ils procurent à leur entreprise. Là encore, je pense qu’il y a une marge de progression. Le Cercle par les échanges de bonnes pratiques qu’il permet peut aider ses membres à faire avancer leur organisation et à se doter de ces nouveaux outils dont toutes les autres entités de l’entreprise ou presque sont dotées.
Dernier exemple, nos juristes ne sont pas nécessairement conscients de la révolution numérique, et de la digitalisation explosive à laquelle nous sommes confrontées. Il me semble qu’il faut aider nos membres à faire face à ce formidable accélérateur de mouvements qu’est le numérique pour qu’il devienne aujourd’hui une formidable opportunité et non une crainte voire un frein pour les Directeurs juridiques. Gestion d’accès massifs à de l’information, fragilisation des sources, suppression des distances, problèmes de confidentialité, changement de la relation managers/managés, adaptabilité du temps de travail, changement des modes de formation, nouveaux outils de pilotage et de communications, etc., sont autant de défis à relever par les Directions juridiques.
Le Conseil National des Barreaux (CNB) a récemment organisé ses « États généraux du droit de l’entreprise ». Les avocats souhaitent être plus présents dans l’entreprise et ne plus se contenter, principalement, d’intervenir a posteriori, pour régler les conflits. Pascal Eydoux, le Président du CNB, veut aller plus loin « dans la collaboration avec les juristes d’entreprise ». Qu’en pensez-vous ? Si demain les Avocats sont plus présents dans l’entreprise, où se situera la frontière des deux professions selon vous ?
Je me suis déjà exprimé sur le sujet. Tout d’abord pour regretter que le CNB n’ait pas consulté les entreprises et leur Direction juridique avant de proposer ce statut d’avocat libéral en entreprise.
Je ne doute pas que le Président du CNB ait voulu faire avancer le débat en faisant une telle proposition, mais pensez-vous un instant qu’on puisse imposer, sans même parler des 16 000 juristes d’entreprise qu’on oublie trop souvent, aux entreprises une solution qu’elles ne souhaitent pas ?
Les positions des entreprises sont explicites (cf. l’appel signé en 2015 par plus de 150 chefs d’entreprises et par leurs organisations représentatives – AFEP, Medef notamment) ; en France comme dans tous les autres grands pays de Droit et économiquement puissants. Elles n’ont de cesse depuis des années de développer en leur sein des Directions juridiques, dont elles apprécient la qualité des prestations proposées et l’adéquation de ces prestations à leurs besoins au quotidien.
J’espère qu’un dialogue pourra s’instaurer permettant de revenir à une solution plus proche des réalités et besoins des entreprises pour qu’enfin nous puissions avoir une profession unifiée capable de faire face aux défis, aux dangers, et ils sont nombreux qui nous attendent dans ce grand mouvement de mondialisation de l’économie.
(…)
Propos receuillis par Victor Bretonnier
Retrouvez la suite de cet entretien dans le Journal Spécial des Socitétés n° 30 du 16 avril 2016
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