Le cadre juridique de l’hydrogène décarboné


lundi 3 octobre 20226 min
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L’hydrogène décarboné fait l’objet d’un cadre juridique en cours de déploiement depuis plusieurs années, tant en termes de planification que de règlementation.

L’hydrogène est aujourd’hui largement produit à partir d’énergies fossiles (charbon, gaz naturel, pétrole...) via des procédés fortement émetteurs de gaz à effet de serre. Mais il peut également être produit par électrolyse de l’eau, à partir d’électricité décarbonée ou renouvelable. L’hydrogène est alors dit « décarboné », car ni sa production ni son utilisation n’émettent de CO2.

L’objectif est d’inscrire l’hydrogène décarboné comme fondement d’un cercle économique et environnemental vertueux. L’hydrogène décarboné représente ainsi un enjeu à la fois scientifique, technologique, environnemental et économique.

L’hydrogène décarboné doit permettre de servir les objectifs que la France s’est fixés en matière de développement des énergies renouvelables et de réduction des émissions de gaz à effet de serre et des polluants, tout en étant compétitif. Il s’agit de créer et structurer un écosystème industriel de pointe qui soit compétitif à l’international.

 


 

Le plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique

Le plan hydrogène présenté dès 2018 par Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, a pour objectif d’accompagner l’innovation et les premiers déploiements industriels de l’hydrogène décarboné, pour être prêt à en faire un pilier de la transition énergétique à moyen terme. Il fixe ainsi des objectifs de développement de l'hydrogène dans la transition énergétique.

Le plan hydrogène part du constat que l’hydrogène est actuellement utilisé en raison de ses propriétés chimiques dans l’industrie pétrolière, et dans l’industrie chimique (consommation française de l’ordre de 900 000 tonnes par an qui engendre de l’ordre de 9 millions de tonnes de COpar an). Cette molécule présente cependant un intérêt énergétique majeur qui n’est pas exploité aujourd’hui. L’hydrogène peut être utilisé pour la production d’énergie sur le réseau, ou dans les transports, et c’est une solution pour le stockage de l’énergie, notamment de l’électricité, ce qui sera le défi des systèmes énergétiques du 21e siècle.

En outre, grâce aux progrès de la technologie de l’électrolyse, il peut être produit de façon décarbonée, économique, et contribuer aux objectifs que la France s’est fixés, en particulier pour la poursuite de la transition énergétique vers la neutralité carbone à l’horizon 2050.

Le plan repose sur les forces de la filière française, particulièrement présente dans la production d’hydrogène, et cherche avant tout à « verdir » les usages industriels existants de l’hydrogène, en commençant par les usages les plus proches de la rentabilité économique. En capitalisant sur ces développements, il sera alors possible de développer les nouveaux usages, liés à la mobilité, d’abord autour de flottes captives, puis de stockage de l’énergie renouvelable dans le réseau de gaz, lorsque le besoin apparaîtra.

Ce plan nourrira la stratégie du gouvernement en matière d’hydrogène qui aura vocation à se traduire en particulier dans la Programmation Pluriannuelle de l’énergie (PPE) pour la période 2019-2028, et dans les PPE qui seront réalisées pour chacune des zones non interconnectées au réseau métropolitain.

La feuille de route hydrogène se structure ainsi autour des trois axes suivants :

AXE 1 : Production d’hydrogène par électrolyse pour l’industrie, phase d’amorçage du plan français. Le plan français propose de démarrer la courbe d’apprentissage de la filière électrolyse sur la production de l’hydrogène à usage industriel en mettant en place des dispositifs de soutien public au déploiement, qui viendront en complément des soutiens déjà existants sur la R&D et l’innovation.

AXE 2 : Une valorisation par des usages de la mobilité en complémentarité des filières batterie.

AXE 3 : Un élément de stabilisation des réseaux énergétiques sur le moyen-long terme. À un horizon plus lointain (>2035), l’hydrogène sera un élément de stabilisation des réseaux énergétiques. Outre les expérimentations d’injection d’hydrogène dans les réseaux de gaz à accélérer, des premières expérimentations et premiers déploiements de services au réseau électrique pourront être lancés dans les zones non interconnectées (ZNI) dont le contexte différent rend cette technologie potentiellement plus intéressante plus rapidement.

Le soutien apporté par l’État à la filière, ces dernières années, a ainsi été important :

le programme d’investissements d’avenir (PIA) a mobilisé plus de 100 millions d'euros en soutenant la mise en œuvre de démonstrateurs et la prise de participation dans des entreprises à fort potentiel ;

l'agence nationale de la recherche (ANR) a soutenu la recherche publique en mobilisant plus de 110 millions d'euros sur les dix dernières années ;

Bpifrance a accompagné de nombreuses start-up ou des PME dans leurs projets d’innovation et de développement technologiques ;

l’Ademe a soutenu le déploiement de la mobilité hydrogène en apportant 80 millions d'euros ;

la Banque des Territoires a soutenu des projets de déploiements portés par les collectivités.

 

 


La stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné en France

Dans le cadre du plan de relance « France Relance », la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, et le ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire, ont présenté, en septembre 2020 la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné en France.

La stratégie pour le développement de l’hydrogène décarboné constitue un axe prioritaire d’investissement pour la France, compte tenu :

des enjeux environnementaux : l’hydrogène est pourvoyeur de nombreuses solutions pour décarboner l’industrie et les transports ;

des enjeux économiques : l’hydrogène offre l’opportunité de créer une filière et un écosystème industriels créateurs d’emplois ;

des enjeux de souveraineté énergétique : pour réduire notre dépendance vis-à-vis des importations d’hydrocarbures ;

des enjeux d’indépendance technologique : pour valoriser les atouts dont dispose la France dans la compétition mondiale.

Dotée d’une enveloppe significative de 2 milliards d’euros dans le cadre du plan de relance, la stratégie pour le développement de l’hydrogène décarboné s’étend au-delà de la période 2020-2022 et fixe une trajectoire qui court jusqu’en 2030 avec au total 7 milliards d’euros de soutien public.


La stratégie fixe ainsi trois priorités.


Première priorité : décarboner l’industrie en faisant émerger une filière française de l’électrolyse

Faire émerger une filière française de l’électrolyse : la stratégie retient l’électrolyse qui apparaît comme le plus prometteur des procédés, sur lequel la France dispose déjà d’industriels à fort potentiel. Le marché de la production d’hydrogène décarboné par électrolyse doit évoluer vers des projets de plus grande taille et de plus importante capacité. La France se fixe ainsi un objectif de 6,5 GW d’électrolyseurs installés en 2030.

Décarboner l'industrie en remplaçant l'hydrogène carboné : l’objectif est de remplacer les procédés de production à partir de combustibles fossiles pour décarboner cet hydrogène. C’est un des axes de la programmation pluriannuelle de l’énergie.

 

 

Deuxième priorité : développer une mobilité lourde à l’hydrogène décarboné

Développer une offre de mobilité lourde à l’hydrogène : particulièrement adaptées aux véhicules lourds, les technologies de l’hydrogène offrent une capacité de stockage complémentaire à celle des batteries électriques. L’hydrogène répond aux besoins de fortes puissances motrices ou aux besoins de longue autonomie, notamment pour les flottes captives parcourant de longues distances à flux tendus. Le déploiement de l’hydrogène sur ce segment répond à l’objectif de décarbonation de ces mobilités dites « lourdes ».

Développer des projets territoriaux d’envergure en incitant à mutualiser les usages : pour accélérer le déploiement des mobilités professionnelles à l’hydrogène sur le territoire national, la stratégie propose la mutualisation de la demande, à la fois dans le secteur industriel et dans celui de la mobilité, à l’échelle des territoires. Il s'agit de faire émerger des partenariats forts entre collectivités et industriels afin de synchroniser au mieux l’émergence de l’offre et le développement des usages.

 

 

Troisième priorité : soutenir la recherche, l’innovation et le développement de compétences afin de favoriser les usages de demain

Soutenir la recherche et l’innovation : pour accélérer la préparation de la future génération des usages de l’hydrogène, la stratégie propose un ensemble d’outils qui permettront de poursuivre l’effort de R&D dans le domaine de l’hydrogène et rester à la pointe au niveau international, la France possédant une recherche de premier plan dans ce domaine, de soutenir l’innovation en faveur de l’industrialisation de nouvelles technologies.

Développer les compétences : la stratégie mise sur le renforcement des compétences, afin de soutenir le développement des usages de l’hydrogène sur le territoire. L’enjeu est de former à la spécificité du gaz hydrogène et de ses utilisations, aux composants et aux modalités d’intervention.

En janvier 2021, l’installation du nouveau Conseil national de l’hydrogène a été annoncée, afin d’assurer la mise en œuvre de la Stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné. Ce nouveau conseil devra structurer les échanges entre l’État et les parties prenantes (en particulier les filières industrielles) de la mise en œuvre de la stratégie, et identifier les éventuels freins.

 

 



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