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Les frais de déplacements et de réceptions du palais présidentiel ont fortement augmenté au cours de l’année 2023, avec un déficit budgétaire annuel de 8,3 millions d’euros. La Cour des comptes demande à la présidence de la République d’accroitre sa vigilance quant à ses dépenses.
La Cour des comptes a publié
ce lundi 29 juillet son rapport intitulé « Les comptes et la gestion
des services de la Présidence de la République », dans lequel elle
fait état des dépenses et des recettes de l’Élysée durant l’année 2023. Un
exercice que l’institution réalise chaque année, depuis 2009. Selon le dernier
rapport de la rue Cambon, les charges de l’Élysée s’élèvent à 125,5 millions
d’euros au total, contre 109 millions d’euros en 2022. Ainsi, en 2023, le
budget annuel du palais présidentiel était en déficit de 8,3 millions d’euros.
La Cour des comptes précise
que le budget de l’Élysée était pourtant « excédentaire en 2022 »,
à hauteur de 300 000 euros. Une accalmie au sein des comptes justifiée par la
crise sanitaire entre 2020 et 2021 et la campagne présidentielle, qui a eu lieu
en 2022. Toujours selon la Cour des comptes, « le résultat déficitaire
de 2023 a rendu nécessaire un prélèvement sur la trésorerie de 9,5 millions
d’euros », avant d’ajouter que « des efforts significatifs
devront être entrepris dès 2024 afin de rétablir et de pérenniser l’équilibre
financier de la Présidence ».
Les dépenses de l’Élysée liées aux transports, aux déplacements et aux réceptions ont atteint 21 millions d’euros, en 2023, contre 13,3 millions d’euros en 2022 et 9,8 millions en 2021. Ainsi, en 2023, les dépenses de déplacements sont supérieures de 7 millions d’euros par rapport au budget prévisionnel. En cause, les nombreux voyages diplomatiques d’Emmanuel Macron, à la sortie de la crise de la COVID-19.
En effet, en 2023, Emmanuel
Macron a voyagé 112 fois, contre 105 fois en 2022, avec des voyages
internationaux pour 40 % d’entre eux. De ce fait, plusieurs grandes tournées du
président de la République ont eu lieu en Océanie (dont la facture du voyage s’élève
à 3,1 millions d’euros), en Afrique (avec un voyage de 1,9 million d’euros), en
Chine (qui aura coûté 1,8 million d’euros), ou encore au Japon pour le sommet
du G7 (qui aura également coûté 1,8 million d’euros). La rue Cambon précise que
la hausse de ces dépenses de déplacements s’explique en partie par « un
niveau élevé d’inflation nationale et surtout internationale ».
En plus des dépenses accrues
pour financer les déplacements d’Emmanuel Macron et de sa délégation, la Cour
des comptes relève une hausse des dépenses allouées aux réceptions. Une hausse
qu’elle explique par une « augmentation du nombre d’invités » mais
aussi par les rénovations des cuisines de l’Élysée qui étaient en cours. Ces
travaux ont obligé les équipes du palais présidentiel à faire plus fréquemment
appel à des traiteurs et à organiser des dîners officiels « délocalisés »
à Versailles et au Louvre, notamment. De ce fait, les prestations des traiteurs
s’élèvent à 1,3 million d’euros, en 2023. Aussi, le document de la Cour des
comptes révèle que les réceptions du roi d’Angleterre, Charles III et du
Premier ministre indien, Narendra Modi, au Louvre, ont respectivement coûté 475
000 euros et 412 000 euros.
La Cour des comptes remarque
des « problèmes d’organisation interne » qui ont pesé un poids
considérable dans les dépenses de la présidence de la République, malgré une
« démarche volontariste de cadrage des activités ». De plus,
la rue Cambon salue des « améliorations constatées au cours des années
précédentes en matière de gestion budgétaire et comptable », qui se
sont poursuivies en 2023, avec une « consolidation du contrôle interne
financier » ainsi qu’« un effort de définition et
clarification des procédures ». En revanche, la Cour des comptes
ajoute que les efforts doivent se poursuivre en mettant en œuvre ces procédures.
Aussi, la Cour des comptes
recommande une amélioration de la circulation de l’information entre les
services, une sensibilisation accrue « de certains acteurs aux enjeux
budgétaires », ainsi qu’une meilleure anticipation des événements. Sur
ce dernier point, elle développe : « la multiplication des
changements de dernière minute et des annulations sont génératrices de
désorganisation et de coûts. Si les fluctuations de l’agenda présidentiel sont
inévitables, l’anticipation de la prise de décision est un axe d’amélioration
majeur ». La rue Cambon préconise alors une meilleure anticipation des
évènements prévus de longue date, tels que les sommets internationaux (G7, G20
ou encore l’Assemblée générale des Nations Unies) et les évènements récurrents
(défilé du 14 juillet, journées européennes du patrimoine).
« Si plusieurs
facteurs externes expliquent ce niveau de dépenses non anticipé (inflation, activité
présidentielle conditionnée par le contexte international), des facteurs
internes sont à prendre également en compte et nécessitent une vigilance
accrue », poursuit la Cour des comptes. L’objectif étant d’infléchir
le solde de trésorerie de l’Élysée d'ici à la fin de l’année 2024.
Peu de temps après la
parution du rapport de la Cour des comptes, l’Élysée a réagi en affirmant que
la présidence « tiendra compte des remarques de la Cour pour améliorer
son organisation et ses dispositifs internes », avant d’ajouter
« être mobilisée pour gérer avec efficacité son budget ». Le
palais présidentiel justifie la hausse de ses dépenses par « un
contexte d'une part inflationniste et d'autre part géopolitique et politique
qui influence l'agenda de l'exécutif », mais que « malgré ces
fortes contraintes, le budget 2023 est à l'équilibre » puisque « les
8 millions d'euros d'écart sur le prévisionnel [ont] été comblés par de la
trésorerie dont la présidence dispose ». Enfin, les équipes du palais
présidentiel ajoutent que « la France entretient des relations
diplomatiques soutenues avec de très nombreux pays qui organisent des
événements équivalents lorsqu'ils reçoivent le Chef de l'État ».
Dans un communiqué de presse
publié le mardi 30 juillet, René Dosière, ex-député et spécialiste de la
gestion des finances publiques regrette que « la Cour n’ait pas mis une
limite à une vision strictement comptable de l’argent public en détaillant le
coût du diner d’État organisé en l’honneur du Roi d’Angleterre notamment ».
Avant d’ajouter : « C’est une muflerie que de dire à son invité ce
qu’il vous coûte. Or une visite d’un Chef d’État étranger est rare et sa
finalité est de montrer la meilleure image de la France ». Une image
qui est loin d’être gratuite, alors que, selon l’INSEE, la dette publique
s’établissait, à la fin du premier trimestre 2024, à 3,159 milliards d’euros.
Inès
Guiza
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