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Depuis la revalorisation des trois avantages fiscaux au 1er janvier 2016 - le crédit d'impôt international, le crédit d'impôt cinéma et le crédit d'impôt audiovisuel, la France apparaît comme une terre promise pour les producteurs tant français qu’étrangers. L’envers du décor de ce « paradis fiscal » ne doit cependant pas être négligé : la complexité des situations des comédiens étrangers et leurs implications en matière sociale et fiscale doivent faire l’objet d’une analyse approfondie en amont afin d’éviter un sad ending, tant pour les comédiens que pour les producteurs.
Les implications sociales : Il était une fois… un principe assorti de multiples exceptions
Les comédiens étrangers (ressortissants étrangers ou résidents à l’étranger) qui tournent en France ont en principe un statut de salarié et sont engagés par contrat de travail à durée déterminée. Les rémunérations qu’ils perçoivent en contrepartie du tournage en France sont généralement soumises aux cotisations de sécurité sociales françaises. Cependant, ces principes sont assortis de nombreuses exceptions qui dépendent à la fois du statut du comédien dans son pays d’origine et des divers accords internationaux liant la France avec ledit pays. Il est donc crucial d’en faire l’analyse afin que le budget du film soit correctement calibré par le producteur.
L'article L. 7121-3 du Code du travail pose une présomption de salariat pour les artistes quels que soient la nationalité de l’artiste, le type de spectacle (vivant ou enregistré) et la qualification juridique donnée par les parties au contrat. Depuis la condamnation de la France par la Cour de justice de l’Union Européenne, cette présomption ne s’applique cependant plus aux artistes reconnus comme prestataires de services établis dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen où ils fournissent habituellement des services analogues (article L. 7121-5 du Code du travail). Pour pouvoir bénéficier de cette « non-présomption », il faut s’assurer que l’artiste communautaire ait bien la qualité « d’indépendant » dans son pays d’établissement (immatriculation en qualité d’artiste, fourniture d’un numéro de TVA, etc.).
Une fois la forme juridique du contrat d’engagement arrêtée (contrat de travail ou contrat de prestation de services), se pose souvent la question des éventuelles charges sociales qui doivent être prélevées sur la rémunération artistique.
En vertu du principe de territorialité visé à l’article L. 111-2-2 du Code de sécurité sociale, les personnes qui travaillent en France sont obligatoirement affiliées à un régime français de sécurité sociale. Ce principe s’applique sous réserve des accords internationaux de sécurité sociale conclus par la France.
Dans la plupart des cas, le producteur peut ainsi faire face à trois types de schémas distincts : les artistes communautaires (ceux établis dans un Etat de l’UE ou dans un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen), les artistes établis dans un Etat ayant conclu un accord bilatéral de sécurité sociale avec la France et ceux établis dans un Etat avec lequel la France n’a pas conclu d’accord de sécurité sociale.
Pour les artistes communautaires, la législation de sécurité sociale applicable est déterminée par les dispositions des règlements (CE) n° 883/2004 et (CE) n° 987/2009 (règlement d’application). La situation des artistes établis dans un Etat avec lequel la France a conclu un accord bilatéral de sécurité sociale est organisée selon les dispositions propres de l’accord en question. Enfin, les artistes qui ne peuvent bénéficier ni des dispositions des règlements européens ni d’un accord bilatéral de sécurité sociale relèvent du droit commun (article L. 111-2-2 du Code de la sécurité sociale).
Les artistes communautaires restent assujettis au régime de sécurité sociale de leur pays d’origine lorsqu’ils fournissent, avant leur arrivée en France, un certificat A1 établi par l’autorité compétente du pays d’origine eu égard aux dispositions des règlements européens (artistes détachés, artistes auto-détachés ou artistes indépendants) (1).
Les artistes non-communautaires peuvent également être exonérés de la plupart des cotisations sociales en France en présence d’un accord bilatéral de sécurité sociale. Les cotisations qui ne sont pas couvertes par l’accord doivent en revanche être payées par le producteur (il s’agit principalement de l’assurance chômage, des congés spectacle et de la formation professionnelle). La plupart des accords bilatéraux s’appliquent aussi bien aux artistes salariés qu’aux artistes non-salariés. Ainsi, un artiste qui a un statut d’indépendant dans son pays d’origine et qui est engagé par contrat de travail en France du fait de la présomption de salariat peut obtenir un certificat de couverture sociale lui permettant de rester affilié au régime en vigueur dans son pays d’origine (par exemple, les artistes établis aux États-Unis se voient délivré le certificat TAJ A1 ou SE 404-02 si la durée du tournage est supérieure à 3 mois).
Les artistes non-communautaires non-couverts (par un accord bilatéral) relèvent obligatoirement du régime français de sécurité sociale. Le producteur doit ainsi s’acquitter de l’ensemble des cotisations sociales y afférentes. Dans l’hypothèse d’un producteur étranger sans établissement en France, celui-ci doit obligatoirement s’immatriculer à l’URSSAF du Bas-Rhin (seule compétente au plan national).
Enfin, à noter qu’une pratique répandue par le passé qui consistait pour certains pays de l’UE à délivrer des certificats A1 à des ressortissants de pays tiers n’ayant conclu aucun accord bilatéral de sécurité sociale avec la France (par exemple, une société de production anglaise qui salarie des artistes indiens pour le tournage d’un film en France) n’est plus d’actualité. La société de production qui embauche ces artistes doit ainsi s’acquitter de la totalité des cotisations sociales en France dans ce cas de figure.
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