Article précédent
.jpg)
Une étude sur les notaires en
Europe publiée début janvier souligne que la profession a réussi à alléger les
tribunaux de certaines tâches qui leur incombaient. Elle révèle également que
la France se classe 5e parmi les pays membres du Conseil de l’Europe
en termes de nombre de notaires par habitant, et met en évidence une hausse
importante du nombre de femmes notaires dans les 46 États.
+33 % de notaires en
France entre 2018 et 2020. C’est ce que révèle la nouvelle étude sur les notaires rédigée par le
Conseil des notariats de l’Union européenne (CNUE) dont les données ont été
fournies par la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (CEPEJ)
du Conseil de l’Europe ; rendue publique le 8 janvier dernier.
L’enquête
se base sur les données de 2020 collectées par la CEPEJ
auprès de 46 États membres du Conseil de l’Europe et 3 États observateurs, à
savoir Israël, le Kazakhstan et le Maroc. Elle met ainsi en exergue que si la
France compte moins d’avocats, de juges et de procureurs pour 100 000
habitants au regard des pays voisins, elle surpasse la plupart d’entre eux en
matière notariale, puisque l’Hexagone compte 23,6 notaires pour 100 000
habitants, se classant 5e à ce titre parmi les États membres du
Conseil de l’Europe, là où l’Italie en décombre 8,6, l’Allemagne 8,3, l’Espagne
6, et la Norvège ainsi que l’ensemble Angleterre – Pays de Galles seulement
1,1, le chiffre le plus bas.
Cet
ensemble enregistre en effet un recul important du nombre de notaires (-11 %),
alors qu’avait déjà été constaté un net recul dans l’édition portant sur les
données de 2018. D’autres États enregistrent également une baisse de 5 %
ou plus, à l’instar de l’Albanie, la Bosnie-et-Herzégovine ou encore le
Portugal, quand certains voient plutôt ce taux stagner, tels que le Luxembourg
ou de la Roumanie, ou légèrement augmenter comme en Belgique ou à Malte avec
5 % respectivement.
A
l’inverse, c’est l’Écosse qui arrive largement en tête, avec 163 notaires pour
100 000 habitants, suivie d’Israël (État observateur qui en recense 70,3),
de la Suisse (40), puis de la Grèce (26,2).
L’étude
précise néanmoins que pour le cas de l’Écosse et d’Israël qui suivent la
tradition de la Common Law, le chiffre se réfère aux « notaires
publics » et non à ceux de « type latin/de droit civil », comme
les distingue l’étude. Ces derniers sont en effet des « officiers
publics indépendants et impartiaux qui ont reçu une délégation de pouvoir de
l'État pour produire des actes authentiques ayant force probante et exécutoire »,
tandis que les « notaires publics » ne doivent pas nécessairement
être des juristes et n’ont « pas le pouvoir d’établir des actes
authentiques ».
Le
diplôme est l’accès privilégié à la profession de notaire
Sans
surprise, les notaires de « type latin/de droit privé » sont
les plus nombreux en Europe, avec 35 États ayant des notaires de cette
catégorie.
Les
onze autres membres du Conseil de l’Europe comme l’ensemble Angleterre – Pays
de Galles et l’Irlande du nord font quant à eux appel aux « notaires
publics » où ils sont prédominants, précise le CNUE, qui ajoute qu’en
Écosse par exemple, tous les avocats en exercice peuvent demander à être admis
en tant que « notaires publics », puisqu’il ne « s'agit pas d'une
profession distincte ».
Par
ailleurs, les notaires de 39 États ne sont pas rémunérés par l’État,
contrairement à la Finlande, la Norvège, la Suisse et l’Ukraine où les notaires
exercent en tant que fonctionnaires.
Pour ce qui est des conditions
d’accès à la profession, des disparités apparaissent également. Dans 38 États, l’accès
se fait par le biais d’un diplôme, parmi lesquels la Croatie, la France,
l’Allemagne, la Pologne et Malte, qui a d’ailleurs fait évoluer ses conditions
d’accès, le diplôme étant obligatoire depuis 2020.
Dans la grande majorité des
cas (31 États membres et le Kazakhstan), les candidats au notariat doivent
passer un examen spécifique, en particulier dans les États où les notaires sont
de « type latin/de droit civil ». Et si au Danemark, il est possible
de devenir notaire grâce au diplôme, l’examen spécifique, lui, n’est pas
reconnu, de même en Finlande, en Allemagne ou encore aux Pays-Bas. En revanche,
précise le CNUE, « l’examen fait partie intégrante de la procédure de
nomination en Belgique et Espagne ».
Le nombre de femmes notaires
en Europe augmente progressivement
Concernant l’égalité des
genres, les données 2020 recueillies par le CNUE sur le pourcentage d'hommes et
de femmes dans le notariat témoignent là aussi d’une augmentation du nombre de
femmes notaires en Europe.
Dans plusieurs États membres
entre 2018 et 2020, leur nombre a augmenté de façon légère, comme en Irlande,
en Autriche, en Croatie, à Malte ou encore au Monténégro. Cette hausse est bien
plus marquée en Belgique, avec + 82 femmes en deux ans, en Espagne (+116), aux
Pays-Bas (+137), en Italie (+177) et en France, avec + 3 320 femmes
notaires supplémentaires.
Une moyenne qui porte à la
hausse le nombre de femmes notaires en Europe, dont le nombre s’élève à
25 419. Les hommes notaires sont encore plus nombreux, puisqu’il en est
dénombré environ 28 446. À noter toutefois que tous les États membres et
observateurs n’ont pas communiqué les chiffres, pouvant faire varier le nombre
total.
Néanmoins, dans une grande
majorité d’États dotés de notaires de droit civil, plus de 50 % des
notaires sont des femmes, rapporte l’étude, prenant l’exemple de la Croatie
(206 femmes contre 121 hommes), la France (8 455 contre 7 445), ou
encore la Géorgie (215 contre 43).
Dans d’autres pays comme l’Italie
qui ont vu une hausse du nombre de femmes notaires sur deux ans, les hommes
« dominent » tout de même dans la profession, avec 3 182 hommes
contre 1 905 femmes, à l’instar de l’Allemagne, qui compte 5 478
notaires hommes contre 1 434 notaires femmes, ou de la Suisse (2 651
contre 819).
De nouvelles fonctions
Si
des tâches incombent principalement aux notaires, comme l'authentification, qui
est la principale compétence d’un notaire de « type latin/de droit
civil » rappelle le CNUE, ils se voient confier de plus en plus de tâches
initialement à la charge des tribunaux.
En
effet, les tribunaux et/ou ministères de 28 États membres du CE, dont la
Pologne, la Slovénie, la République Tchèque et la France, sont compétents pour
la certification des signatures, mais des notaires peuvent également exercer
cette mission et décharger les tribunaux. Des États comme l’Estonie, la
Macédoine du Nord ou encore la Suède ont pour leur part mis cette mission
exclusivement entre les mains des notaires de leur territoire, pointe l’étude.
Par
ailleurs, 19 États membres confient aux notaires la légalisation des signatures
ou l’apposition d’apostille, dont 8 États où la tâche est seulement exercée par
les notaires (Andorre, Finlande et Malte pour ne citer qu’eux), et autant
confient aux notaires la prestation de serment comme en Autriche et en
Allemagne.
En
outre, dans 19 États également, les notaires font office de médiateurs, comme
c’est le cas en Belgique, en France ainsi qu’aux Pays-Bas. En Roumanie par
exemple, depuis octobre 2011, il est possible pour un couple de régler leur
divorce devant un notaire « y compris lorsque des enfants mineurs sont
concernés », et ce « sans faire intervenir d’autres
professionnels du droit ». Une procédure notariale qui permet non
seulement d’alléger les tribunaux mais aussi une résolution « discrète
et rapide » de ce type de cas. Il est également observé une tendance
croissante à déléguer cette compétence aux notaires, est-il précisé, bien que
certains États ne l’autorisent pas (encore ?). Les notaires lettons et
espagnols ont pour leur part la capacité à officialiser le mariage.
De
plus, trois États membres ainsi que le Kazakhstan ont donné les « pleins
pouvoirs » aux notaires s’agissant des procédures judiciaires non
contentieuses, pouvant alors agir en tant que commissaires du tribunal dans une
affaire de succession ou pour un divorce (Arménie, Bulgarie et Pays-Bas), et
trois autres dans le domaine des enchères publiques.
Ils
effectuent aussi des transactions immobilières et interviennent dans le domaine
du droit successoral, à l’exception des notaires de Finlande ou de Norvège, en
délivrant notamment la certificat successoral européen (CSE), comme c'est le
cas en Autriche, en France, en Italie, à Malte ou encore en Pologne.
Les
notaires exercent également en droit de la famille dans 38 États membres et 2
États observateurs, ainsi qu’en droit des sociétés dans 35 États et en
protection des personnes vulnérables dans 14. Sur ce dernier point, l'étude
indique que « les procurations durables pour un adulte peuvent être
rédigées dans un acte authentique devant un notaire » selon la
législation nationale, en Belgique, en France et en Allemagne par exemple.
Le
CNUE témoigne d’ailleurs de l’efficacité de l’affectation aux notaires de
nouvelles compétences juridiques non contentieuses : cette décision « a
atteint son objectif, à savoir de réduire la charge de travail des tribunaux et
contribuer à l’efficacité de la justice ».
Sur
la question de la prévention du blanchiment d’argent et du financement du
terrorisme, les notaires, « collaborateurs essentiels des
administrations publiques », ont également un rôle clé à jouer. Ils ont
notamment vu leurs obligations de diligence davantage renforcées avec la 4e Directive AML (UE) 2015/849,
et la 5e Directive AML (UE) 2018/843.
Un nouvelle corde à leur arc qui, d’après le CNUE, fait du notariat un « pilier
essentiel des systèmes judiciaires des États, notamment dans une situation
d'urgence comme la crise du COVID-19, mais aussi un pionnier dans le domaine
des nouvelles technologies ».
L’utilisation des TIC s’est
très largement généralisée chez les notaires
Si les notaires n’ont pas
attendu le covid pour utiliser et/ou mettre en place des plateformes numériques
pour l’exercice de leurs fonctions et simplifier les échanges entre eux ou avec
leurs clients, à l’instar de l’Autriche, de la Belgique ou de la France qui ont
développé la possibilité pour leurs clients de communiquer avec les notaires
par voie numérique, cette pratique s’est toutefois largement démocratisée en
2020.
D’après les données
recueillies par la CEPEJ, sur les 46 États membres et 3 États observateurs, 40
utilisent les technologies de l’information et de la communication (TIC) dans
leurs relations avec d’autres notaires (visioconférence, système d’échange de
documents), et 28 les utilisent dans leurs relations avec leurs clients et dans
leurs relations avec l’État (tribunaux, chambres de commerce autorités
fiscales…) dont l’Arménie, la Bulgarie, la France, la Hongrie ou encore
l’Espagne.
À lire aussi : Conseil des notariats de l’Union européenne : la
présidence renouvelée pour la nouvelle année
L’étude opère notamment un
focus sur l’utilisation des outils TIC des notaires dans leurs relations avec
les clients, et révèle que le système le plus couramment utilisé dans ce cadre
est celui de l’archivage numérique, avec 26 États membres et un État
observateur qui utilisent cet outil.
Le système de visioconférence
est le second outil numérique le plus utilisé par les notaires avec 23 États
membres l’utilisant, suivi de l’identification numérique (19 États) et de
l’acte électronique (17).
Par ailleurs, dans certains
États, la possibilité de créer une société à responsabilité limitée en ligne a
été introduite, comme c’est le cas en Italie et en Espagne. Le notariat
allemand a pour sa part mis au point « une procédure très innovante et
sécurisée pour la constitution en ligne de sociétés à responsabilité limitée et
les inscriptions en ligne au registre du commerce, en utilisant un système de
vidéoconférence sécurisé développé et hébergé par le notariat »,
détaille le CNUE, qui ajoute que plusieurs notariats ont la possibilité de modifier
les registres informatisés (registres fonciers, du commerce, de l’état civil
etc.). C’est le cas d’Andorre, de la Belgique et de la République tchèque qui
peuvent modifier les registres du commerce et d’état civil, et de la Géorgie qui
elle peut modifier les registres fonciers et du commerce.
Les registres des
successions/du droit de la famille et d'autres non mentionnés peuvent quant à eux
être modifiés dans un nombre beaucoup plus important d'États tels que la Lettonie,
la Roumanie, ou l’Irlande du nord. Le notariat autrichien, également compétent
pour cette mission, peut également gérer le Registre central des testaments et
le Registre central de représentation/Registre des procurations avec le
notariat allemand. En France, le Registre des testaments ou le Registre des
certificats successoraux européens peuvent être gérés par les notaires français,
qui revêtent, comme les notaires européens, de multiples casquettes, aussi bien
à l’échelle nationale qu’européenne.
Allison
Vaslin
Infos locales, analyses et enquêtes : restez informé(e) sans limite.
Recevez gratuitement un concentré d’actualité chaque semaine.
0 Commentaire
Laisser un commentaire
Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *