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Marché de l'art : durcir la lutte contre les faussaires


lundi 15 janvier 20245 min
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15/01/2024 17:29:56 1 8 4414 13 0 La Leçon d'Anatomie du Docteur Nicolaes Tulp. Rembrandt (1632) 10181 3998 4149 Du POS au PLUi : la représentation des cours et jardins en zone urbaine

Les zones urbaines sont méthodiquement décrites sous forme de plans. Les cours et jardins n’échappent pas à ce référencement. Comment le système en vigueur a-t-il vu le jour ?

Adrienne Barthélemy, architecte des bâtiments de France, est revenue sur la réglementation des cours et des jardins, au titre du code de l’urbanisme et du patrimoine, lors d’une conférence au muséum d'Orléans pour la Biodiversité et l'Environnement, le 5 décembre 2023. Elle illustre son propos d’exemples et de cartes graphiques, et revient sur les points clés de l’évolution historique de cette matière.

Aujourd’hui, « une grande question nous est posée », lance Adrienne Barthélemy : « comment peut-on repenser le végétal en ville ? » Tel est le fil rouge de l’exposé technique, juridique et historique, auquel nous convie l’architecte. Également cheffe de l’unité départementale de l'architecture et du patrimoine (UDAP) du Loir-et-Cher, elle précise : « Je vais me concentrer sur les intérieurs d’îlots et non sur les grands espaces publics, avec un focus sur la réglementation. »

Un secteur à sauvegarder

Adrienne Barthélemy prend pour point de départ la « loi Malraux » de 1962. À l’époque, le ministre de la Culture met en place « des secteurs sauvegardés », en vue de protéger le patrimoine historique et esthétique des villes. C’est par exemple pour préserver le Marais insalubre d’après-guerre qu’André Malraux crée le premier des secteurs sauvegardés. Ce quartier de Paris était constitué avant tout d’hôtels particuliers, conçus entre cour et jardin. C’est-à-dire avec deux dominantes, l’une minérale et l’autre végétale.

Un secteur sauvegardé va alors de pair avec la création d’un plan graphique nommé plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV). « Ce document a valeur d’un document d’urbanisme, la même valeur qu’un plan local d’urbanisme, ou qu’un plan d’occupation des sols (POS), dans les années 60 », précise Adrienne Barthélemy. Sur une carte communale – très similaire au POS – sont délimitées de manière sommaire des zones urbanisées, dites U, et des zones naturelles, dites N.

De la sauvegarde à la mise en valeur

« J’ai pris conscience que le plan de sauvegarde et de mise en valeur était très en avance », assure l'architecte des bâtiments de France. Ce document identifiait déjà « des espaces libres à dominante végétale ou jardins, à conserver, améliorer ou créer ; des espaces libres à dominante minérale ou cours, à conserver, restaurer ou créer ; et puis des arbres remarquables à conserver ».

À titre d’exemple, le PSMV de Richelieu et celui de Blois, conçus dans les années 70, distinguent le minéral et le végétal. « Le PSMV identifie des espaces boisés classés, espaces considérés non constructibles. Et c’est grâce à cela, qu’on arrive à recréer des jardins, à ramener du végétal. »

Adrienne Barthélémy pointe sur le plan de Blois des îlots entièrement bâtis, sans aucun espace libre. « On n’est pas loin de la misère. Il y a une telle densité que forcément c’est invivable dans un îlot. La seule façon de faire est de recréer des cours et des jardins à l'intérieur. »

Et c’est bien là le projet du plan de sauvegarde et de mise en valeur : redonner des espaces libres non bâtis ! L’architecte rappelle l’idée originelle de Malraux : « L'insalubrité naît d’une surdensification des bâtiments, qui était du grand n’importe quoi. Des verrues, des choses pas honnêtes qui font que la vie à l’intérieur de l’îlot devient insupportable. »

Le PSMV donne le pouvoir à un architecte des bâtiments de France d’imposer une démolition, dès lors qu’il y a des projets derrière.

Qu’en reste-t-il aujourd’hui ?

Depuis, les règles qui régissent les conditions d’aménagement et d’utilisation des sols ont évolué avec la création du plan local d’urbanisme (PLU) et du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi), qui ont progressivement remplacé le POS et le PSMV à partir de la loi solidarité et renouvellement urbain (SRU) de 2000.

L’architecte cite les articles L 151-19, L 151-22 et L 151-23 du code de l’urbanisme comme les plus importants. Ils disposent que « le règlement peut identifier et localiser les éléments de paysage à protéger, à conserver, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d’ordre culturel, historique, architectural, ou écologique. Et définir le cas échéant les prescriptions ».

Adrienne Barthélemy illustre son propos avec le PLUi de l’agglomération blésoise. Le document n’est plus seulement découpé en zones urbaines et naturelles, mais montre également des projets. Il s’intéresse à l’intérieur des îlots : aux mares, aux sources, aux arbres remarquables… « Les plans de sauvegarde et de mise en valeur faisaient déjà du projet urbain. Ils allaient loin dans l’inventaire, dans ce que devaient devenir les sols, les lieux… Beaucoup de choses testées dans les PSMV ont été introduites dans les PLU. »

Et le PLUi a un atout supplémentaire, grâce à sa légende : « Elle est définie par le lieu, explique la conférencière. C'est-à-dire, que ce sont les caractéristiques du lieu qui permettent de faire telle ou telle légende.  Le code de l’urbanisme dit uniquement que le règlement peut identifier et localiser les éléments du paysage. C’est très souple. On fait ce qu’on veut, on identifie ce qu’on veut. C’est à mon sens une grande force ! »

La dichotomie entre végétal et minéral manque de finesse

La loi relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, en 2016, est venue réformer les secteurs sauvegardés. Elle les a fondus au sein de l’entité « sites patrimoniaux remarquables » (SPR), avec les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) et les aires de valorisation de l'architecture et du patrimoine (AVAP).

Mais, demeure ancrée dans la légende de ces documents, la dichotomie entre végétal et minéral, et l’idée qu’une cour est minérale, et un jardin végétal. « Or, ce côté binaire minéral / végétal aujourd’hui me semble compliqué, s’inquiète l’architecte. Il faudrait sûrement le nuancer. »

Des zones grises existent. Une cour pavée transformée avec des joints enherbés, est-elle encore à dominante minérale ? « On est dans un moment particulier où l’on a une obligation de faire bouger des choses. Nous allons peut-être vers une évolution à venir de la réglementation, qui apparaît parfois aujourd’hui un peu en décalage. »

Maricygne di Matteo

 

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