Article précédent

Avec 69 000 faillites recensées depuis le début de l’année, dont 14 000 rien que pour le troisième trimestre 2025, la situation des entreprises en France s’est grandement dégradée. Toutefois, la question du remboursement des prêts contractés durant la crise Covid joue un rôle mineur dans ces défaillances et certains secteurs, comme le commerce ou l’industrie, résistent à cette tendance.

L’année 2025 n’est pas terminée, mais elle enregistre déjà un nombre record de défaillances d’entreprises. Les chiffres sont parlants : 69 569 faillites recensées sur les neuf premiers mois de l’année, dont 6 900 rien que pour le mois de septembre, soit près de 10% des fermetures de firmes, selon le cabinet Altares.
Un niveau dépassant celui de l’an dernier – 68 000 -, qui lui-même dépassait le record établi en 1993 avec 64 500 défaillances d’entreprises recensées (cf capture d’écran).
Des données qui sont surtout en augmentation par rapport à 2024. Selon Infogreffe, les défaillances d’entreprise par trimestre sont en hausse de plus de 14% par rapport aux trimestres équivalents en 2024. Signe de difficultés structurelles dans le paysage entrepreneurial français, et non pas conjoncturelles, notamment avec la question de l’inflation post-Covid et la guerre russo-ukrainienne.
Selon le cabinet Altares, les secteurs concernés par une hausse significative des défaillances d’entreprises sont l’hôtellerie-restauration (+10%), le transport (+10%) ou encore les services aux entreprises (+9%). A l’inverse, le secteur du commerce connaît une faible hausse des défaillances en 2025 (+1%), tout comme l’industrie (+3%) ou encore la construction (+3%), même si ce secteur est celui qui recense, en valeur absolue, le plus de défaillances d’entreprises : 17 770 depuis le début de l’année.
À lire aussi : DOSSIER. Vivre une défaillance : si j’avais su, je m’y serais pris plus tôt
Au niveau régional, des disparités s’observent également. Si des régions comme la Guyane, la Guadeloupe, Auvergne-Rhône-Alpes, le Centre-Val de Loire, la Corse, les Pays de la Loire et Nouvelle-Aquitaine connaissent des hausses significatives de défaillances d’entreprises par rapport à 2024, d’autres affichent une meilleure résistance. Le Grand Est, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, la Bretagne, la Martinique, la Réunion et Mayotte enregistrent moins de défaillances d’entreprises en 2025 qu’en 2024.

À noter aussi que les firmes de moins de 10 salariés représentent la très grande majorité des défaillances d’entreprises recensées au troisième trimestre 2025, avec 13 172 défaillances recensées, soit plus de 90% du total des faillites. Puis viennent les PME de 10 à 19 salariés (739 défaillances), les PME de 20 à 99 salariés (414 défaillances), et enfin les firmes de plus de 100 salariés (46 défaillances).
L’interventionnisme a partiellement compté dans la sauvegarde des entreprises ces dernières années. « 110 000 à 165 000 entreprises peu productives qui auraient dû faire faillite » ont été sauvées grâce aux multiples aides publiques au prix d’une « zombification de l’économie », avait ainsi souligné l’économiste Éric Heyer, directeur du département d’analyse de l’OFCE, lors d’une audition au Sénat le 22 octobre dernier.
Durant le Covid, plus de 600 000 entreprises ont pu bénéficier de prêts garantis par l’État (PGE) pour un montant global de 145 milliards d’euros, détaille le commissaire aux comptes Michel di Martino, qui ajoute que « l’encours restant au 30 septembre 2025 s’élève à 20 milliards d’euros ». Entre 2020 à 2022, 35 000 défaillances d’entreprises ont ainsi pu être évitées, avec un nombre de faillites inférieur à 20 000, ce qui n’avait plus été observé depuis le milieu des années 1980.
Michel di Martino estime que ces défaillances évitées au plus fort de la crise sanitaire ont été retardées et finalement étalées sur les trois dernières années, et que les PGE ont été grandement efficaces, avec une perte estimée à trois milliards d’euros seulement, « soit 2,25% du montant des PGE accordés ».
L’incertitude liée aux débats sur le projet de loi de finances de 2026 pèse cependant sur l’avenir des entreprises. Olivier Redoulès, directeur des études de l’institut Rexecode, alerte sur le maintien de la surtaxe des entreprises de quatre milliards d’euros. Fin octobre, l’Assemblée est même allée plus loin en votant une hausse de la surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises, qui devrait rapporter deux milliards d’euros de plus.
Les firmes hexagonales sont surfiscalisées par rapport à leurs homologues européennes, à hauteur de 65 milliards d’euros, s’alarme Olivier Redoulès. Cette surtaxe pourrait constituer un frein à l’investissement, qui devrait être en hausse de 1% en 2026, selon les prévisions de l’institut Rexecode. « Ce qui compenserait à peine la baisse enregistrée en 2025 », précise-t-il durant son audition au Sénat.
Cependant, pour l’économiste Éric Heyer, le principal frein des entreprises n’est pas celui des impôts de production mais celui de la demande, et ce depuis 2023 déjà, en raison des carnets de commande qui « n’ont jamais été aussi faibles ». Selon lui, cette tendance à l’affaiblissement de la demande va s’accentuer « avec la guerre commerciale, les prévisions d’emploi et d’investissement des entreprises », et notamment les 170 000 suppressions d’emplois salariés prévues en 2026. Et ce, alors même que la productivité retrouve des couleurs après un recul observé durant la période Covid. Un contexte qui rend difficilement envisageable un reflux des défaillances d’entreprises à court terme.
THÉMATIQUES ASSOCIÉES
Infos locales, analyses et enquêtes : restez informé(e) sans limite.
Recevez gratuitement un concentré d’actualité chaque semaine.
0 Commentaire
Laisser un commentaire
Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *