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CHRONIQUE. Une femme a porté plainte le 10 juillet 2025 contre son conjoint, pour des faits de violences et d’agression sexuelle. Régulièrement, leur enfant a assisté aux scènes de violences, mais cette circonstance aggravante n’a pas été retenue. Ils se présentent tous deux à l’audience de la 12e chambre correctionnelle du tribunal de Créteil, mardi 30 septembre.
Les prévenus de violences conjugales, quels que soient leur profil, nient rarement en bloc tous les faits qu’on leur reproche, surtout quand ils sont nombreux et s’étalent sur des années. On admet une « bousculade » mais on nie le coup de poing ; les insultes, c’est vrai, mais les menaces, jamais de la vie. C’est à la foi une stratégie de défense et l’expression banale d’une mauvaise foi qui s’est renforcée au fil des conflits. Dans un prétoire, si certains « assument », le but est généralement de s’en tirer le mieux possible.
« Je reconnais sans problème les faits de violences », dit Thierry, 41 ans, en costume bleu à l’audience. Il est prévenu de « violences habituelles », ce qui présage généralement d’une longue série de violences. En effet : elles débutent juste avant Noël 2022. Une dispute éclate car Mélodie ne souhaite pas fêter Noël dans la famille de Thierry car ils ont tous les deux le Covid, et que ce n’est pas raisonnable de traîner avec les vieux tontons. Il se met en colère, l’insulte, la menace. Elle quitte le domicile pour échapper à son courroux. Dès lors, s’installe une angoisse.
Dix mois plus tard, il découvre qu’elle le trompe. Alors qu’elle tient leur bébé d’un an dans les bras, il l’attrape par les épaules, lui arrache l’enfant et la sort sur le palier. Elle le supplie de la laisser rentrer, et pendant de longues minutes, elle entend son fils hurler derrière la porte.
En août 2024, en vacances en Guadeloupe, sur le balcon de leur chambre. Il est ivre, elle le lui reproche : « Il m’a asséné un violent coup de poing à la tête, je suis tombée, inconsciente.
-J’ai mis le coup mais elle n’est pas tombée inconsciente.
-(Juge) Et l’enfant, il était où ?
-Il était avec nous. »
Le 11 novembre 24, elle s’isole dans la chambre avec le garçon. « Thierry me traine par les cheveux, m’étrangle, me dit ’t’es qu’une pute je vais te tuer’.
–Elle revenait d’un week-end avec son amant, j’ai eu ces mots mais je ne l’ai pas étranglée. »
Le 16 novembre, elle décrit : « il explose d’un coup, devient violent physiquement et explose mon téléphone au sol. Je veux me réfugier chez mon ami avec notre fils, mais il ne veut pas. Je laisse l’enfant et me décide à partir pour apaiser les choses.
-C’est vrai.
-(Juge) Vous utilisez votre fils comme élément d’un chantage pour qu’elle reste.
-Elle partait en week-end, je gardais le petit et elle ne répondait pas à mes appels.
–On peut s’interroger sur la manière dont vous traitez votre fils. Quand vous lui dites que sa mère l’abandonne, comment pensez-vous qu’il le perçoit ? »
Ses accès de colère menacent l’intégrité physique du petit, lui lance la présidente. Il admet.
Ce qu’il n’admet pas en revanche, ce sont les agressions sexuelles. « Alors qu’elle est occupée, vous arrivez par derrière et vous lui imposez des attouchements sur les fesses et les seins, elle décrit même des pénétrations digitales forcées (ce qui constitue un viol, ndlr). Elle indique qu’à chaque fois elle manifeste son refus.
-Doigté, j’ai jamais fait.
-Vous n’êtes pas poursuivi pour ça. Vous reconnaissez le reste ?
-C’est courant dans un couple.
-C’est moins courant que vous continuiez alors qu’elle crie stop et qu’elle vous griffe.
-Quand elle disait stop, je m’en allais.
-Est-ce que vous l’avez déjà fait en présence de l’enfant ?
–Non, c’était seulement quand il jouait dans le salon et qu’elle était en train de préparer à manger. »
La présidente lit la déposition de Mélodie : « Il me disait ‘coquine t’aimes ça’. » Thierry n’est pas du tout d’accord.
La procureure, en toute logique, lui demande : « Pourquoi elle mentirait sur une partie des faits ? » La réponse fuse : « Pour l’intérêt financier, évidemment. »
L’avocate de Mélodie fait dans le pathos : « je ne pense pas qu’on puisse oublier le regard d’un homme qui nous étrangle ». Elle décline les traumatismes causés chez sa cliente par cette série d’actes violents, et demande une série d’indemnisation. Un homme tousse dans le public : « c’est pour le fric, évidemment », marmonne-t-il.
La procureure liste douze faits de violences rapportés par la partie civile, qu’elle pense être tous advenus, tout comme l’agression sexuelle. Elle requiert 24 mois de prison avec sursis probatoire, et c’est ce que le tribunal prononcera, mais seulement pour les violences, car Thierry est relaxé les faits d’agression sexuelle. L’exercice de l’autorité parentale lui est en outre retiré.
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